Boudin fasciné par les laveuses ?

Durant la sinistre période du confinement, j’avais noué des liens virtuels, médiés par le Net, avec l’auteur de Un Jour Un Tableau, sur Facebook. Entre autres, nous avions travaillé l’un et l’autre sur les laveuses, alias plus au sud lavandières, ou bugadières (voir articles sur ce blog, mais il faut « remonter » loin dans le temps…). Depuis, nous continuons à jouer « en écho », et il glisse de temps à autres de nouvelles oeuvres découvertes. A mon tour, cette fois, car, lors de ma visite de l’exposition consacrée à Boudin, au Musée Marmottan, j’ai été surprise de découvrir que ce peintre s’était intéressé aussi aux scènes de lessive.
Pas au bord de la mer. Pas dans les lavoirs. Mais sur les fleuves et rivière, et dans les estuaires.
Je lui dédie donc ces photos prises au Musée. Sans doute le mathématicien collectionneur s’y intéresse-t-il aussi, car il n’y en avait pas qu’une…

Le 12 août 1874 était jour de lessive au bord de la Touques. Et tandis que Belles Dames et Beaux Messieurs se promenaient ou tenaient salon sur la plage, on lavait de concert.

Mais on lavait jusque dans les ports asséchés partiellement par la marée basse. J’ai malheureusement oublié de noter le nom de celui-ci, mais ai identifié, après recherches, Trouville, grâce notamment à la position de l’église, au-dessus de l’estuaire de la Touques.

A Deauville aussi, on lave le linge des plus riches… J’ai découvert cette oeuvre dans un autre blog, « Des nouvelles de la Butte aux Cailles », qui présentait une exposition au Musée Jacquemart-André en 2013.

Plus de calme, et moins de monde pour cette séance de lessive à la campagne…

En recherchant sur le net le titre des tableaux, j’en ai découvert d’autres! Cette fois, c’est à Etretat qu’oeuvraient les dames.

Il est au Musée des Beaux-Arts de Gand.

Une petite remarque pour finir : le ciel n’est jamais vraiment bleu, et les nuées font craindre des difficultés pour le séchage… qui n’a jamais, semble-t-il, intéressé le peintre au point qu’il en fasse son sujet…

Joies de la nature

Au-delà du canotage et de la voile, la nature offre d’autres plaisirs à Gustave, qui aime notamment jardiner. Avec passion et avec soin. Car ce perfectionniste ne fait rien sans rigueur… Dans l’exposition, davantage tournée vers la vie urbaine comme vous le découvrirez par la suite, peu de tableaux représentant cette nature, domestiquée ou non. Mais on découvre d’une part le peintre qui aime à représenter des promeneurs, solitaires ou non, et d’autre part le jardinier prenant soin de ses plantations.

Cela commence dès la maison de Yerres, que voici représentée avec des soldats, donc à l’époque où Martial Caillebotte père était encore en activité. Et cela se poursuit à l’autre extrêmité de l’Ile de France, sur les bords de Seine, à Gennevilliers où on le voit travailler dans le jardin et la serre y attenant, ou se promener avec ses amis humains et canins.

Les paysages sont toujours peuplés de promeneurs/euses, quand ce n’est pas de pêcheurs…

Et d’aucuns font la sieste, tandis que d’autres soignent les rosiers ou s’adonnent à des cultures bien ordonnées…

Deux films promouvant la vie à la campagne…

J’avais très envie de voir « 5 hectares », car un peu fan, je l’avoue, de Lambert Wilson… Un peu plus frileuse pour le « Bonnard » sur lequel certains critiques étaient très réservés. Néanmoins, grâce au mauvais temps de ces derniers jours, je suis allée voir les deux, et ne puis m’empêcher de vous en faire retour.

5 hectares

Si vous recherchez un film « intellectuel », puissant, savant, passez votre chemin. Si vous avez envie de vous détendre et que vous appréciez l’humour au deuxième, voire au troisième degré, filez vite le voir, il ne va sans doute pas rester longtemps sur les écrans…

Pourtant, que cela fait du bien de voir un tel film, aussi vivant, dynamique, optimiste, rafraîchissant! J’ai passé un excellent moment, loin de la fureur du monde. Et partagé l’amour du héros pour les tracteurs… et la campagne, peut-être un peu trop esthétisée (si j’ose ce néologisme?)…

Et une scène d’anthologie : celle qui montre l’homme hyper-policé foncer sur les douaniers et contrôleurs qui viennent poser problème aux fermiers travailleurs! Un moment inoubliable! Mais il en est d’autres plus calmes, voire romantiques… je vous laisse les découvrir…

Bonnard

Pierre et Marthe

J’apprécie le peintre, mais je crains toujours les « biopic », comme on dit maintenant, ces films qui retracent la vie ou une partie de la vie d’un être célèbre… d’où la frilosité dont je vous faisais part plus haut… La personne qui m’accompagnait pour cette séance hivernale n’avait, elle, guère envie de voir ce film, assez bien démoli par les critiques de l’émission Le Masque et la Plume. Mais à la sortie, le contentement était partagé, nous y avions trouvé notre compte, et passé un excellent moment en compagnie de Pierre et de Marthe. Car le héros du film n’est pas vraiment le peintre. C’est plutôt celle qui est devenue sa femme tard, très tard, au crépuscule de sa vie.

« Bon public », peut-être, comme disent d’aucun-e-s avec mépris de celles et ceux qui s’émeuvent devant un grand écran? Je ne sais. Mais le film ne se contente pas de nous faire revivre le passé, de nous faire voyager, des bords de Seine à ceux de la Méditerranée, de nous montrer les processus de création… Il nous fait vivre aussi intensément toutes sortes d’émotions, du rire aux larmes, de l’enthousiasme à la sidération…

A voir donc absolument, que vous aimiez ou non les oeuvres des Nabis…


Van Gogh et la campagne auversoise

Je vous avais promis de vous emmener visiter champs, jardins et bois tels que représentés par Van Gogh dans les derniers mois, voire jours de sa vie. Nous y voici donc.

Vous en avez eu un aperçu, déjà, dans les deux premiers articles de cette série. Mais aujourd’hui, allons humer l’air printanier ou estival d’Auvers-sur-Oise et de ses environs. C’est en effet un des aspects de l’exposition qui m’a le plus marquée : l’attention, voire une forme de passion, pour « rendre » l’atmosphère de cette ruralité « du nord » qui contrastait tant avec ce qu’il venait de vivre dans le sud.

Par quoi commencer? Les jardins? Allons-y…

Les jardins

Deux jardins notamment sont assez abondamment représentés : celui du Docteur Gachet, dont vous avez déjà eu un aperçu, et celui de Daubigny.

Commençons par le premier… Vous vous souvenez? C’est ce médecin homéopathe, spécialisé dans la « mélancolie » (on ne parlait pas de « déprime » ni de troubles à l’époque), qui était davantage porté sur les arts que sur la médecine…

Son jardin a inspiré Van Gogh… à moins que ce ne soit cette belle jeune fille qui s’y promenait?

Quant à Daubigny, c’est un peintre qu’admirait beaucoup l’artiste.

« « L’oncle m’a dit que Daubigny est mort. Cela m’a fait de la peine, je l’avoue sans honte,…Ce doit être une bonne chose d’avoir conscience en mourant d’avoir fait des choses vraiment bonnes, de savoir que, grâce à cela on restera vivant dans la mémoire d’au moins quelques-uns, et de laisser un bon exemple à ceux qui nous suivent. » (Vincent Van Gogh, lettre à Théo, 1878.)

Il avait installé un atelier à Auvers en 1860, soit trente ans avant, et ses amis le convainquirent d’en faire un lieu unique, en le décorant ensemble. Corot notamment y peignit des paysages d’Italie.

Le « Botin », foyer artistique d’Auvers. Source : site de l’Atelier

Le jardin de Daubigny a inspiré des oeuvres qui se rapprochent d’une forme de pointillisme, si j’ose dire.

D’autres tableaux sont plus proches de la facture à laquelle nous sommes habitué-e-s.

Vous l’aurez peut-être remarqué : les jardins semblent associés aux femmes, quel que soit leur âge : à la fille du Docteur Gachet se substitue ici la veuve de Daubigny.

Ce sont aussi des femmes qui se promènent dans la campagne (vous n’êtes pas sans remarquer l’habile transition!). Sans doute l’épouse et la fille de Gachet, si l’on en juge par le chapeau de cette dernière.

Les champs

Je me suis demandé, en préparant ce texte, quelle structuration choisir pour la présentation des nombreux tableaux qui les magnifient. C’est finalement pour un choix par couleur que j’ai opté.

Bleus et verts contrariés par le rouge et le jaune

Je ne sais pas si je vous l’ai dit, mais je confonds certains bleus et verts. C’est pourquoi j’ai choisi de les associer dans cette partie. Mais ce n’est pas la seule raison : ils le sont souvent dans la campagne peinte! L’exemple le plus frappant me paraît être cette oeuvre.

Approchons-nous un peu…

Le contraste s’amplifie quand vient l’orage…

Ici une touche de rouge, pour les coquelicots. Ailleurs, de jaune, pour la paille, mais un jaune qui se cache dans le vert…

Dans le tableau qui suit, c’est le ciel qui devient jaune, au crépuscule.

Néanmoins parfois le vert prédomine…

Le rappel des couleurs du sud : le jaune et le violet

Le rouge

Dans les environs d’Auvers, le rouge fait irruption, porté par les coquelicots qui, plus tard, deviendront le symbole du sang versé lors de la « Grande Guerre ».

Les bois

Peu représentés par le peintre, ils semblent plus de l’ordre du symbolique que de la représentation. Connaissait-il le poème de Baudelaire lorsqu’il peignit, dans les derniers temps de sa vie, ce couple dans une forêt de « piliers »?

Le couple est-il celui de Gachet et de son épouse, de Théo et de sa jeune femme, ou le couple idyllique auquel il a pu rêver parfois dans sa triste vie?