Sur les traces du passé

Jeune maman, j’ai habité dans le XVIIème arrondissement de Paris. Le plus proche parc était loin, mais cela ne me faisait pas peur. J’emmenais donc, quand mes études le permettaient, mon « bébé en poussette » au Parc Monceaux. Depuis, je suis souvent passée devant ce parc, mais n’y était jamais retournée. Aussi la visite au Musée Cernuschi fut-elle l’occasion de le revoir. A vrai dire, je ne me le remémorais pas du tout tel qu’il est : je le voyais plus vaste, plus « sauvage », moins cerné d’immeubles. Mais il offre cependant quelques sources de belles surprises, et surtout d’étonnement.

Ainsi, par exemple, j’ignorais cet épisode de l’histoire de l’aéronautique.

C’est bien un parachute que vous voyez sur la plaque. Pourquoi? Tout simplement parce que c’est ici qu’atterrit le 22 octobre 1797 le premier parachute. Je me suis demandé (et vous aussi, peut-être?) comment on pouvait faire du parachute alors qu’il n’y avait pas d’avion… et pourquoi? Réponse 1 : en sautant d’une montgolfière. Réponse 2 : pour permettre aux habitant-e-s d’un immeuble en feu de sauter en sécurité. Il paraît que, ce jour-là, il y avait foule au Parc Monceau, pour voir s’écraser le téméraire. Mais Jacques André Garnerin s’en sortit indemne, ou presque : une entorse.

« Il monte à 700 mètres d’altitude à bord d’une montgolfière puis fait exploser le ballon. La corbeille à l’intérieur de laquelle il se tient descend alors, simplement accrochée à une voilure.L’aérostatier arrive au sol sain et presque sauf, avec une entorse à la cheville. »

Mais la suite de l’histoire est étonnante…

« En 1799, c’est au tour de sa femme de tenter et réussir l’exploit ! Le 11 octobre 1802, elle dépose le brevet du parachute au nom de son mari, après que celui-ci a amélioré la stabilité de son engin. » (source)

Puisque j’en suis à vous parler d’histoire, un peu de toponymie? Je me suis demandé qui était « Monceau » ou ce qu’était « Monceau ». Or ce nom serait en réalité une déformation de « Mousseaux », nom du village sur lequel il a été créé (source). Mais comme il est situé face à la ville de Batignolles-Monceaux, il en aurait pris le nom. Attention cependant, je ne connais pas le sérieux de la source. Mais allez lire ce passage, à défaut de l’ouvrage, il en vaut la peine. Merci, Gallica!

La nature est très en avance encore cette année, et les fleurs sont déjà bien épanouies en cette mi-février. Malheureusement, le soleil n’est pas là pour sublimer les couleurs…

J’ai tenté de photographier une curiosité : un tronc tordu comme un linge qu’on essore. Pas très réussi, mais je vous le montre quand même.

Guère mieux réussie, mais j’aime cet arbre, un saule pleureur fait figure de statue.

Je ne dirais pas que ce parc est magnifique. Mais il est étonnant à plus d’un point de vue. D’abord parce qu’il est littéralement prisonnier, encerclé par des immeubles. Pas un point de vue sans l’un d’eux. Certes, leur architecture est parfois belle…

L’un d’entre eux m’a interpellée. Je pensais à un édifice ultra-moderne. mais en y regardant de plus près, ce sont des travaux qui sont en cours, bien dissimulés derrière des panneaux d’une blancheur éclatante.

A l’intérieur, un seul bâtiment, une rotonde.

Elle faisait partie du Mur des Fermiers Généraux, datant d’un peu avant la Révolution. C’est l’une des 7 enceintes successives de Paris, aujourd’hui élargi en particulier par les « Bois » (surface plus claire ci-dessous).

Long de 24 kilomètres, ce mur fut détruit en 1860. Sans regret pour les Parisien-ne-s, à qui il évoquait surtout l’impôt fort décrié, sur les marchandises entrant dans la ville : « Le mur murant Paris rend Paris murmurant. »

Une autre construction étonne dans ce parc (je vous passe la pyramide et autres ornements…), mais, cette fois, l’effet est assez réussi. Oubliez l’horrible immeuble derrière, et concentrez-vous sur le bas de la photo.

La colonnade fait un peu « déplacée ». Normal : elle le fut. Elle provient de la Basilique Saint Denis, où Catherine de Médicis avait imaginé la Rotonde des Valois pour honorer son époux.

Le bassin qu’elle borde porte un nom surprenant : la Naumachie. Traduction pour les non-héllénistes : bataille navale (pas le jeu, la guerre). Pourquoi? Mystère…

Puisqu’on en est aux « mystères », en voici un autre : que fait ici cette étrange composition? une fermette en bois, et des animaux faits de bric et de broc. Et une échelle bizarre, comme vous allez le constater.

Mais ce qui m’a le plus choquée, c’est la représentation de la Femme dans la statuaire du Parc. Littéralement toujours aux pieds de l’Homme. Alanguie, admirative ou séduite, mais toujours à Ses pieds. Je vous laisse en juger par vous-même (la photo 2 n’est pas de moi) : dans l’ordre, Edouard Pailleron, Guy de Maupassant, et, le comble, Chopin. Et Gounod a même droit à trois femmes (vous me direz : les Muses?) !

Un dimanche après-midi radiophonique…

En revenant de week-end, j’écoute toujours France Musique, car je reste étonnée de la conversation quasi-surréaliste pour moi entre les expert-e-s musicaux/ales, qui commentent des interprétations différentes d’un même air. Aujourd’hui, il s’agissait de quelques Polonaises de Chopin.

Frédéric Chopin / d'après le portrait de P. Schick (1873) | Gallica

Le ton sentencieux, les débats derrière une entente cordiale, les coups bas au-delà de l’apparente courtoisie, le jargon utilisé sans souci de la compréhension possible par les auditeur-e-s… tout cela me laisse pantoise. Le tout pendant une heure et demie… de quoi faire Le Tréport-Beauvais, en admirant au passage la superbe vallée de la Bresle. C’est finalement Rubinstein qui l’a emporté, malgré des dissensions évidentes autour des 5 autres pianistes (pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas cette émission, codés par des lettres, de A à F. Premier morceau : deux éliminés. Deuxième : un éliminé. Restent en lice 3 interprètes pour le dernier morceau, en l’occurrence l’Opus 53, connu sous le nom d’Héroïque.

Un podium où l’on ne retient que la médaille d’or, en quelque sorte. Je ne sais pas si c’est exactement cette version, mais j’ai trouvé pour vous en ligne ce film, où on le voit jouer en personne…

Pour finir le trajet, en entrant dans la banlieue parisienne, je me suis redirigée sur France Inter car j’avais entendu le programme : c’est Claude Lelouch qui était l’invité dans l’émission Hors Piste, à l’occasion de la sortie de son nouveau film « L’Amour, c’est mieux que la vie ».

Plusieurs surprises à l’écoute de cette émission. Mais je dois d’abord dire que, si j’aime des films de Lelouch, je ne le connais pas spécialement en tant qu’homme. J’ai apprécié sa sincérité. Il ne cherche pas à frimer, visiblement. Et semble extrêmement émotif. Une première surprise : les hommes qu’il a déclaré admirer. Dans l’ordre où ils ont été cités : Bernard Tapie, Jean-Paul Bnelmondo, Johnny Hallyday, et… Dupond-Moretti, dont j’ai appris à cette occasion qu’il avait joué un procureur dans ce film :

Soudain, un chanteur. Une affreuse chanson, totalement « has been », une voix comme je ne les aime pas… surprise, à nouveau : c’est… Tapie… Vous pouvez le voir ici, chantant « Réussir sa vie » (le titre vous étonne?). De lui, Lelouch dit « Il était sincère, quand il trichait ».

Autre surprise, belle, celle-ci : une chanson interprétée par Jean Gabin, une chanson qui me parle : « Je sais ». Si vous avez un moment, écoutez-la… , ici par exemple. Je ne l’ai malheureusement pas en film authentique…

Une autre encore : 7 enfants (de plusieurs femmes), dont chacun-e porte un prénom commençant pas un S : Salomé, Stella, Simon, Sarah, Sachka, Shaya et Sabaya. En l’honneur de son père Simon… et d’ajouter que les mères n’avaient pas le choix…

Enfin, la dernière : dans la chanson célèbre du film Un homme et une femme, ce n’est pas « Chabadabada », mais « dabadabada », qui a été inventé au départ pour combler les vides des paroles non encore écrites, puis gardé pour laisser, dit-il, à chacun et chacune la possibilité d’imaginer sa propre histoire. Je vous ai proposé la version avec film, mais la véritable version de la chanson, la voici, sur une archive de l’INA.

Quelques phrases de l’entretien…

« La seule chose qui nous appartienne, c’est le présent ».

« La mort est une récompense, c’est une promotion… je crois beaucoup au recyclage, au recyclage des âmes… On a tous les qualités de nos défauts… »

Petite parenthèse : une déception après l’émission, car il n’a pas inventé cette expression. Elle court sur le net, sans que j’aie pu comprendre qui l’avait initiée…

« Je crois que si je crois en Dieu, c’est parce que j’ai beaucoup observé le monde ».

Enfin, l’épitaphe qu’il souhaiterait sur sa tombe : « A suivre »

Des chants moraves au « cello »… Chronique d’une matinée ordinaire

Cello, c’est le violoncelle, vous le savez sans doute? Joli mot, qui me fait penser aux oiseaux italiens… mais des oiseaux graves, aux sonorités prenantes et prégnantes…
J’avais commencé en ce gris matin de novembre par une tentative de réécouter les Chants Moraves de Dvorak… Rien à voir avec le violoncelle, me direz-vous.

Hier en effet je suis allée écouter le choeur Polycantus.

Le concert de ce mardi 26 novembre

Le concert avait lieu dans l’église de l’Annonciation, dans le 16ème arrondissement, église qui en réalité est un lieu de culte protestant, comme l’attestent le livret de chants et la Bible offerts à la lecture des spectateurs/trices ( j’ai passé un bon moment à essayer de trouver des chants communs au culte protestant et au culte catholique, en attendant le début du concert! ).

« Eglise »- temple de l’Annonciation

J’ai beaucoup aimé les Chants Moraves et la Messe, et seulement regretté l’interprétation trop « appliquée » du choeur, qui ne permettait pas de faire jaillir l’émotion que j’attendais, que j’espérais. Un peu trop « amateurs » sans doute, avec une exception, un jeune homme que j’avais remarqué, et qui d’ailleurs a été salué par le chef. Qui est-il? Je ne puis vous le dire, hélas… Mais vous le verrez sur cette photographie (hélas très mauvais, désolée!) : il est à droite, devant la colonne. Si vous le reconnaissez, merci de me dire de qui il s’agit, j’aimerais le réentendre chanter!

Le choeur

Six chants moraves, dont les textes évoquent la culture rurale et les troubles de l’amour… Six mélodies très différentes, dont certaines très entraînantes invitent à la danse (difficile sur un banc d’église, de surplus fort inconfortable!)…

Puis un intermède au piano, trois mazurkas de Chopin…

Ensuite, la messe en ré… avec de curieuses séquences… L’Agnus Dei scindé, par exemple, apparaît à deux moments… Ma voisine, perturbée, a même recherché dans le programme ce qui pouvait se passer…

Elle est belle, cette messe! Dommage qu’elle ait été aussi platement interprétée… En voici une autre version

Bref, pour revenir au fil de cet article, je suis allée rechercher sur le net d’autres interprétations des chants moraves… en vain, à l’exception d’un autre choeur amateur… Mais You Tube poursuit son chemin, et propose d’autres titres… selon quelle ontologie??? je l’ignore, mais il est parfois fantaisiste… j’ai donc eu droit à un certain nombre de chants, et ai réécouté avec plaisir certains d’entre eux…

Puis un morceau de violoncelle m’a donné envie de réentendre une artiste découverte par hasard hier… Sol Gabetta… Si l’on regarde les photos obtenues par une recherche « images » sur son nom, on ne peut, je pense, qu’être saisi-e par l’intensité de ses expressions, et imaginer celle du jeu de cette violoncelliste argentine qui désormais vit et travaille en Suisse.

Superbe aussi, cette interprétation , modèle pour moi de beauté liée à une extrême simplicité qui apure l’oeuvre – déjà très épurée – du compositeur estonien Arvo Part

Bref, me voici passée de Dvorak à Part… de la Tchéquie à l’Estonie, en passant bien sûr par la Pologne avec Chopin… Ne manquent que la Lituanie et la Lettonie… une prochaine fois?