Soy de Cuba por una noche

Une soirée muy caliente ce 23 mars… dans les rues, certes, mais aussi au 13ème Art, Place d’Italie, où un groupe de musicien-ne-s et de danseurs/euses a entraîné durant presque deux heures un public survolté dans l’histoire d’une jeune ouvrière d’une fabrique de cigares.

Pourtant, quand on arrive dans cette vaste salle, la scène est bien sobre, d’un gris qui contraste peu avec le noir ambiant. Mais très vite les couleurs explosent, dans une déclinaison violente des rouges, bleus, violets…

Le principe de la mise en scène est simple: le fond est un vaste écran où sont projetées des images de Cuba, mais aussi des symboles d’autres villes lorsque l’histoire narre le voyage de la troupe de danse à laquelle appartient l’héroïne, une troupe composée d’ouvrières et ouvriers d’une fabrique de cigares (au fond, sur cette photo de mauvaise qualité, vous pouvez peut-être lire son enseigne). Quelques éléments suffisent à planter le décor : au début, des tables et chaises, et une représentation très épurée des outils utilisés, dont les presses.

Pour en savoir plus sur ce point, voir par exemple l’article dont est tirée cette belle photo

Tout y est figuré, jusqu’au contremaître ou patron boîteux dont l’apparition, annoncée par le bruit de sa canne, provoque l’arrêt des danses et la reprise du travail.

Les images projetées, les objets déplacés et surtout les lumières vont ainsi faire voyager au travers de l’espace, mais aussi de la narration. Une des ouvrières, objet de plaisir d’un des leaders de la bande, va tomber amoureuse d’un catcheur minable… Je ne vous raconte pas la suite, pour ne pas gâcher la découverte si vous allez voir le spectacle. On est donc littéralement « transporté » de l’usine à la rue, de la rue à la salle de sports, à la salle de danse, etc.

Excusez une nouvelle fois la mauvaise qualité des photos, mais il est bien difficile de saisir le mouvement dans une telle ambiance lumineuse… J’ai cependant tenu à vous les montrer, pour que vous puissiez avoir une idée de la performance des danseuses et danseurs, que ce soit ensemble, à deux, ou en solo. Chorégraphie de qualité, danses endiablées, et duos romantiques à souhait par moments… tout y est, et les amateurs/trices de salsa ont pu se régaler. Pour ma part, je ne suis pas une grande fan de ce type de musique, mais j’ai apprécié la qualité des artistes sur scène.

Ce qui se voit rarement, l’orchestre respecte la parité. Au piano, à la trompette et à la batterie, trois hommes. Vous voyez les deux premiers ci-dessous, et le troisième ci-dessus, au fond à gauche.

Au violon, aux congas et au trombone, trois femmes. Un des plus beaux moments de la soirée a été pour moi le solo de la jeune femme que vous pouvez voir sur la photo ci-dessous.

Les voix sont aussi très belles, et j’ai particulièrement aimé celle de la musicienne qui joue des congas avec une force étonnante. Vous pouvez la voir au centre de cette photo, avec l’homme qui « raconte » l’histoire.

Elle a été prise à la fin du spectacle, juste après que la troupe ait entraîné la foule par une danse déchaînée qui a provoqué mon admiration : cela faisait près de deux heures qu’ils et elles dansaient à un rythme rapide!

Que vous soyez ou non adeptes de cette musique ou de ces danses, une telle soirée « réchauffe », dans tous les sens du terme. Et cela fait du bien de s’évader vers les Caraïbes. Retrouver ensuite la Place d’Italie sous la bruine fut un choc!

L’orchestre de Budapest à la Philharmonie

On a beau vouloir tout découvrir – comme c’est un peu mon cas, l’avouerai-je? -, certains lieux échappent à votre curiosité, pour des raisons qu’il est difficile de définir. Tel est le cas de la Philharmonie de Paris, que je ne connaissais que de l’extérieur, notamment pour être allée à plusieurs reprises à la Grande Halle de la Villette (en particulier pour la magnifique exposition Toutankhamon) et au Musée de la Musique (à propos, n’hésitez pas, si vous êtes dans le coin, à aller à la Nuit du Rossignol, dont j’ai déjà parlé dans ce blog : c’est le 31 mars cette année). Aussi étais-je bien contente de la découvrir pour un concert en ce mardi soir encore bien frais pour la première soirée complète du printemps.

Il ne faut pas souffrir de vertige, comme moi, pour fréquenter le balcon du 6ème étage, où j’ai eu la chance d’être au premier rang, ce qui offre une vue splendide sur la salle et sur la scène.

L’architecture en est sidérante, et bat en innovation, à mon sens, celle de la Seine Musicale. J’ai entre autres apprécié son asymétrie et l’audace du balcon blanc, projeté comme un vaisseau spatial… Mais le long balcon plus calme et serein qui lui fait face n’est pas mal non plus…

La scène est disposée pour accueillir un orchestre symphonique, ainsi qu’un piano. Cela obligera d’ailleurs le chef d’orchestre, Ivan Fischer, à tourner le dos à une partie des musicien-ne-s, avant l’entracte qui fera disparaître l’instrument.

Dans cette salle, l’acoustique est telle que le moindre petit bruit des spectateurs/trices résonne partout. Ce qui contraint à un silence absolu, qui fut d’ailleurs respecté tout au long du spectacle. Mais cela permet aussi de prendre des places moins chères et d’entendre tout aussi bien! Soit dit en passant, une place comme celle que j’avais est pour moi excellente, car on y voit à merveille les doigts courir sur le clavier du piano comme sur les cordes des harpes…

Vous ne verrez pas de photos de l’orchestre, car il est interdit de saisir des images dans la salle. Je vous renvoie pour le découvrir à son site, accessible en anglais pour celles et ceux d’entre vous qui ne sont pas magyarophones. Ce Budapest Festival Orchestra a enthousiasmé la salle. Par la qualité de son jeu, et une harmonie remarquable entre ses membres, sous la direction d’un chef dynamique et original, qui termine le concert par des « mini-impros » de deux groupes de musiciens, sur des thèmes de musique hongroise, qui n’ont rien à voir avec le programme annoncé. Mais revenons à celui-ci. Je dois dire que j’ai préféré la première partie à la seconde, qui était composée de trois morceaux de Richard Strauss aux tonalités très différentes : Dom Juan, Danse des sept voiles, Till Eulenspiegel. Le dernier en particulier ne m’a pas vraiment « emportée », même si j’ai apprécié la virtuosité des artistes et la véritable sym-phonie, au sens propre du texte, de l’orchestre.

Une mention spéciale, donc, pour le début de la première partie, d’un compositeur hongrois dont je crois n’avoir jamais entendu parler : Ernö Dohnänyi (1877-1960). Les Minutes Symphoniques op.36 m’ont littéralement emportée par leur mélodie et leur poésie. J’en ai trouvé pour vous une interprétation par deux autres orchestres : la première, que je trouve personnellement moins bonne car trop « enlevée » à mon goût, mais qui vous en donnera une idée. La seconde, par un orchestre plus modeste mais à la tonalité plus proche. Il faudrait que la Tribune des Critiques de Disques consacre une de ses émissions du dimanche après-midi à cette oeuvre!

Une seconde mention spéciale pour le concerto n°4 de Beethoven. Si je devais expliquer à quelqu’un ce qu’est un concerto pour piano et orchestre, c’est sans conteste ce spectacle que je conseillerais… L’instrument et l’orchestre se complètent, se répondent, s’opposent discrètement parfois, en une synergie parfaite. Il faut dire que Rudolf Buchbinder, est exceptionnel. Ce pianiste né en Bohême d’une famille originellement allemande a maintenant 77 ans. Vous pourrez le voir et l’entendre, mais beaucoup plus jeune et avec un autre orchestre, sur cette vidéo. Après moults rappels, il a joué deux autres morceaux, seul, cette fois, et l’admiration des membres de l’orchestre était évidente. Les ovations du public sont la preuve que je n’étais pas la seule à l’admirer… Si vous voulez l’entendre, il revient jouer à Paris les 5 et 6 avril, à la Maison de la Radio et de la Musique, ce concerto mais aussi d’autres oeuvres, et avec un autre orchestre, celui de Radio France.

Inutile de vous dire combien l’on vit intensément durant un tel concert, en oubliant le fracas du monde, et comme il est dur d’en sortir… mais la musique résonne encore en soi, n’est-ce pas?

Le Musée Jean-Jacques Henner : la demeure de Guillaume Dubufe

Ce nom vous dit quelque chose? Normal, si vous me suivez… Car vous vous êtes déjà promené-e-s dans une des pièces de cette demeure du 17ème (arrondissement, pas siècle) : le jardin d’hiver. En effet, c’est là que je suis allée écouter le trio dont je vous parlais dans un précédent article. Un peu injuste qu’on nomme ainsi ce musée, alors qu’il s’agissait de la demeure d’un autre artiste, Guillaume Dubufe.

« Issu d’une dynastie d’artistes, dont le père Edouard et le grand-père, Claude-Marie, ont acquis une grande notoriété de portraitistes au fil du siècle, Guillaume Dubufe (1853-1909) se détourne de la tradition familiale pour se lancer dans la grande décoration. Il a ainsi réalisé plusieurs décors monumentaux importants comme certains plafonds du buffet de la gare de Lyon, de la bibliothèque de la Sorbonne et du foyer de la Comédie française, ou encore de la salle des fêtes de l’Élysée.

En 1878, il achète au peintre Roger Jourdain (1845-1918) « un rez-de-chaussée et deux étages sous comble ». Son architecte, Nicolas Félix Escalier (1843-1920), est aussi celui de l’hôtel particulier de l’actrice Sarah Bernhardt, situé rue Fortuny » (site officiel)

C’est lui qui a fait agrandir la demeure, l’a aménagée, a créé le jardin d’hiver, etc. Bref, en a fait, avec une créativité certaine, ce qu’on en voit aujourd’hui, même si cela a été vidé, épuré…

Le quartier était alors très « à la mode », comme on peut le constater en visitant l’ancienne salle de séjour, qui lui est partiellement consacrée, avec des plans papier et numérique. Je me suis d’ailleurs promis d’aller le visiter plus en détail une autre fois.

Autre intérêt de cette salle de séjour : les parements en carreaux de Delft, plutôt inattendus à cet endroit.

La demeure comporte trois étages. Au premier, salons et salle de séjour, ainsi que le jardin d’hiver. Les escaliers qui permettent d’accéder aux trois étages m’ont évoqué un certain Escher…

Les paliers ne manquent pas de surprendre par leur originalité. L’un, par exemple, est ouvert par un moucharabieh.

Des escaliers partent de ci, de là. Deux d’entre eux, sur le dernier palier, mènent à l’atelier qui occupe tout le troisième étage. Pourquoi deux? Dont l’un très étroit… Mystère!

L’atelier est vaste, avec une hauteur de plafond à faire pâlir d’envie plus d’un-e artiste.

Un magnifique tapis, d’une taille tout aussi impressionnante, orne le plancher.

Si vous regardez bien cette photographie de Dubufe dans son atelier, prise autour de 1900, vous pouvez voir le tapis en question… ou un similaire…

Dubufe dans son atelier, par Edmond Benard, 1880-1910 © INHA

Je vais vous laisser sur cette image, car l’atelier a été transformé en lieu d’exposition. Et c’est de celle-ci que je vous parlerai dans un prochain billet. Elle ne concerne pas Dubufe, mais Henner. Laissons donc notre hôte dans ces lieux, en attendant d’y retrouver celui qui les squatte maintenant…

Raza. Episode 3 : retour(s) en Inde

La dernière photographie de l’épisode précédent comportait, comme je vous le disais, un indice sur la thématique d’aujourd’hui…. Cela aurait pu vous frapper, car une forme inattendue, assez géométrique, envahit l’angle supérieur droit du tableau. Vous l’avez vu, ce cercle noir? En voici un autre exemple, hélas avec une photo un peu floue.

C’est à partir des années 80 un motif que l’on retrouve dans beaucoup d’oeuvres de Raza, ce cercle. Cela coïncide aux va-et-vient, puis à l’installation du peintre en Inde, son pays de naissance, où il va retrouver l’influence de la tradition, de la philosophie, de la religion. Ce « cercle », plus ou moins rond, plus ou moins elliptique, est l’un des symboles prégnant d’une pensée bouddhiste.

Discret au départ, puis prenant de l’ampleur.


Noir au départ, puis prenant des couleurs.

Seul au départ, puis se multipliant… Essayez de compter combien il y en a, dans ce tableau où il se démultiplie, mais aussi se scinde, jouant avec les triangles.

Cette forme, c’est le bindu. Difficile de trouver LE terme qui traduirait ce mot, tant il a de significations symboliques. On pourrait les faire converger vers la notion de Vie, peut-être?

Le bindu finit par devenir thème principal du tableau, souvent associé au jeu des « axes » (nord-sud, est-ouest… je devrais plutôt les placer dans l’ordre inverse car, comme nous le verrons dans un quatrième article né de ma visite dans une autre exposition, que je vous relaterai ultérieurement, les axes des mandalas situent l’est là où nous plaçons le sud…). Ils peuvent être discrets, marqués simplement pas le jeu des couleurs dans ce que j’ai envie de nommer les « écoinçons » – même si ce terme ne s’utilise qu’en architecture, menuiserie, sculpture…

Mais les axes peuvent aussi être très marqués.

Le tableau qui suit trace autour d’un premier bindu un second, suggéré dans une sorte de jeu des formes, simplement tracées : cercles et traits droits découpant l’espace en formes plus ou moins régulières, des triangles marquant les quatre points cardinaux.

Le « bindu », c’est aussi le symbole tracé en rouge sur le front (bindi), que ce soit du jina ci-dessous ou des humains, en lien avec le tantrisme. Nous y reviendrons…

Raza. Episode 2 : rouge… Indien?

Je vous ai entraîné–e-s hier dans les premières décennies de la vie de Raza, durant lesquelles on le voit tenter, essayer, voyager à travers sa vie mais aussi sa peinture. Il est cependant un élément que l’on retrouve tout au long de celle-ci : le rouge. Vous l’avez vu dans l’un de ses premiers tableaux, qui représentaient de jeunes femmes d’Inde, puis dans ses paysages bien « français », et enfin dans des peintures plus abstraites. Plus on avance dans sa carrière, plus cette couleur va devenir prégnante, au point que l’on pourrait considérer qu’elle caractérise l’artiste à partir d’une certaine époque.

Je ne suis pas parvenue à trouver ce qu’il utilisait comme matériau pour que ce rouge soit si éclatant. Mais je suis allée chercher si cette couleur avait en Inde une signification particulière. Oui, elle évoque la joie, le bonheur, l’amour. C’est d’ailleurs la couleur du mariage. Considérant l’aspect pragmatique, le rouge dit « indien » est un oxyde de fer naturel, provenant des sols de latérite rouge. Mais il n’est pas dit que cela soit la composition utilisée par Raza. Car son rouge est si éclatant qu’il me paraît autre. Et car il est bien d’autres « rouges »… Voir par exemple les pigments proposés sur ce site. A ce propos, un joli carnet de voyage en « couleurs ». Bref, si l’un ou l’une d’entre vous sait ce qu’utilisait Raza pour son rouge si lumineux, merci de le mettre en commentaire!

Pour en revenir à l’exposition, même si l’on peut considérer que cette couleur constitue un « fil rouge » (c’est le cas de le dire!), elle devient plus présente lorsque Raza s’intéresse à l’histoire de la peinture de son pays, en lien avec la religion et la philosophie. En témoigne ce tableau, moderne par sa structure, mais relié par le texte à une tradition ancienne (pardon pour la mauvaise qualité!).

Dans certaines oeuvres, le rouge intervient en force parmi d’autres teintes. En voici un petit florilège, commençant par les « transparences », continuant avec les « dégoulinures » (j’ignore le terme technique, excusez-moi!), pour finir en « force »… jusqu’au dernier de ces « extraits » où c’est lui qui domine, dans un panel de nuances qui s’opposent tantôt aux déclinaisons de noir, tantôt aux variations de jaune.

Les salles progressivement sont ainsi envahies par la couleur rouge, qui devient omniprésente et, de discrète, se fait rayonnante, éclatante.

Une explosion de rouge à la fin du parcours, dont je vous parlerai dans l’épisode 3. Juste, avant de nous quitter, un avant-goût avec indice de ce que sera sa thématique.

Raza. Episode 1 : de l’Inde à la France

Encore une belle lacune dans ma culture : je ne connaissais pas Raza. Pourtant, en visitant l’exposition qui lui est consacrée au Centre Pompidou, je me suis aperçue que j’avais déjà vu des tableaux de lui. Difficile de rendre compte d’une exposition aussi riche. J’ai fait le choix de vous proposer un triptyque, dont voici le premier volet.

Nous commençons en Inde, en 1948, avec une sélection de deux tableaux très différents, comme vous pouvez le constater.

L’engagement dans l’art n’est pas un isolement, comme on peut l’observer tout au long de l’exposition; il milite, se bat, et crée avec d’autres. A cette époque, au sein du PAG (Progressive Artists Group), qu’il fonde à 25 ans.

On le retrouve une dizaine d’années plus tard en France. D’abord à Paris. Les tableaux de l’époque font émerger un style tout en trahissant la recherche du jeune artiste.

Il commence à être remarqué, à remporter des prix…

Une série d’oeuvres « informelles », si j’ose dire, montre qu’il dessinait finement, sur n’importe quel support, comme sur ce journal, en 1953.

C’est aussi à ce moment qu’il rencontre l’artiste qui va l’accompagner jusqu’à la fin de sa vie… et s’installer avec elle dans un village que mes fidèles abonné-e-s connaissent bien, car je leur en parle au moins une fois par an, en aficionada de ce petit bourg perché au-dessus de Menton, que j’affectionne particulièrement, Gorbio. A ce propos d’ailleurs, je me demande pourquoi il n’y est pas fait état de la présence de ce peintre?

L’hétérogénéité de son oeuvre jusqu’aux dernières décennies n’a pas dû rendre aisée la scénographie. Mais je l’ai trouvé très réussie, riche et épurée, toute en finesse.

Impossible, bien sûr, de rendre toute la richesse de cette exposition. Voici une petite sélection des 20 années suivantes. D’abord avec l’émergence de ce rouge si intense qui caractérise une partie des oeuvres.

Puis avec les jeux de superposition et la transparence extrême de certains tableaux, en particulier dans une série datant des années 60, dont celui-ci dont j’ai photographié un extrait.

D’autres « extraits » de ses voisins, pour clore ce premier volet.

Pas de bijou chez les orfèvres

Je n’étais jamais allée au Petit Montparnasse. Une de mes amies m’ayant demandé de l’y accompagner en ce dimanche après-midi de mars, d’un froid glacial et, qui plus est, date funeste pour moi, j’ai découvert cette petite salle cachée derrière sa grande soeur, que je connaissais, elle. Aucun charme. Et, qui plus est, des sièges peu agréables. Mais nous n’y étions pas pour le confort. Juste pour voir cette pièce sur laquelle les critiques sont globalement élogieuses.

Le début est plutôt prometteur, avec une belle scène évocatrice des films policiers en noir et blanc de jadis. Comme d’ailleurs les tenues des acteurs et actrices. Seul le roux flamboyant de la chevelure de l’une d’elles tranche.

Bien sûr, je ne vous raconterai pas l’histoire. Cela ne se fait pas, n’est-ce pas, quand il s’agit de deviner qui est le ou la coupable? Sauf quand on regarde Colombo…

Nous avons été toutes deux très déçues par cette pièce, assez insipide. Sans nous être cependant trop ennuyées, car le jeu des acteurs est intéressant, voire parfois surprenant, et le rythme est assez soutenu. Et les pas dans l’invisible escalier de métal ne manque pas de réveiller celle ou celui qui s’assoupirerait. Mais cela ne suffit pas à prendre du plaisir. Et je n’en ai pas vraiment pris. Seul l’acteur qui joue l’inspecteur de police, Philippe Perrussel, réussissait à me faire sourire, avec son air de faux Colombo (justement!) et de mauvais Maigret.

Source : site du théâtre

Je ne vous dis pas de ne pas aller voir cette pièce. Je pense que des amateurs/trices de films et romans policiers peuvent y trouver plaisir, car elle doit être pleine de références que je n’ai pas. Peut-être me manque-t-il cette culture pour l’apprécier?

Le pari à la mode : un repas pour un billet

On nous le serine, mais aussi tout le monde en souffre : tout augmente, et il devient difficile de s’offrir ne serait-ce que le nécessaire. Alors, pour le superflu! Des ami-e-s et moi avons donc fait le pari de pouvoir déjeuner ou dîner au restaurant pour un billet. Bien sûr, ni 10 ni 20, mais 50.

A deux, deux plats au moins, avec du vin ou de la bière et du café. Voici donc les trois premières adresses où l’on peut se régaler à ce prix, dans des styles très différents.

Je vous ai déjà parlé des deux premières, mais je vais vous les rappeler… D’abord, ce petit restaurant vietnamien de la rue Galande, dans le 5ème (ou limite 6ème?), la Fraternité Vietnamienne. Entrée, plat, une bouteille de vin à deux… simple et très bon.

La deuxième est située dans le 15ème arrondissement, au 36 rue Dantzig. J’aime beaucoup son nom, La Cantine des Tontons. Et c’est bien une espèce de cantine, car il faut s’y servir en partie. Mais rien à voir avec un self-service : un véritable accueil du patron et de son épouse japonaise. Ce que j’aime, outre cet accueil? La simplicité. La convivialité. Le fait qu’on puisse manger asiatique ou français. Autant que l’on veut (entrée, plat, fromage, dessert) pour un prix dérisoire. Et c’est bon. Je me suis régalée des nems avec une laitue composée d’autre chose que d’eau et une sauce épicée à souhait. Et du léger gâteau à la mangue et passion, que j’ai choisi en délaissant les délicieux éclairs, l’excellent baba au rhum ou encore la tarte au citron et la tarte Tatin… Une « cantine » telle qu’on aimerait en trouver partout où l’on travaille! Et ici, beaucoup viennent y manger chaque jour de labeur… Plutôt une clientèle d’âge moyen et masculine le midi. Le soir, très mixte à tout point de vue. Avec 25 cl de vin, le compte est bon…

Les bois ont été trouvés… Le patron est violoniste, pas chasseur!

Je vous ai promis un choix varié. La troisième adresse se trouve dans un quartier « chic », le 7ème arrondissement, rue Saint Dominique. Un restaurant tout aussi « chic », mais qui a décidé de casser ses prix le midi en offrant deux plats au choix dans la carte (indiqués par une étoile) à 19 euros. Bon, d’accord, si on prend du vin, cela va dépasser légèrement les 50 euros. Mais la cuisine y est raffinée et les assiettes, dressées avec goût. Jugez-en par vous-même, avec le vol-au-vent en entrée, et la selle d’agneau en plat.

Un vrai régal (même le pain y est très bon), dans un cadre serein. Un peu trop, peut-être? Mais plutôt reposant, avec ses banquettes en cuir… et j’ai apprécié les coupelles en bois, moi qui adore la vaisselle dans ce matériau!

J’allais oublier de vous donner son nom! Le Comptoir des Fables. Je me suis demandé s’il s’agissait d’un jeu de mots, car il est situé en face de la Fontaine (de Mars)…

La servante de Proust

Celles et ceux d’entre vous qui suivent ce blog régulièrement savent qu’il est un petit théâtre que j’affectionne, le Poche Montparnasse. Non pour son confort (plus que sommaire) ni pour la facilité du stationnement, mais pour l’accueil aimable et surtout la qualité des spectacles.

Cette fois encore, je ne fus point déçue…

Pourquoi avoir choisi de le voir, moi qui n’aime pas trop les « one (wo)man show » (même si ce n’en est pas tout à fait un)? Tout simplement parce que j’ai vu l’an dernier la très belle exposition sur Proust au Musée Carnavalet, où l’on parlait longuement du rôle étonnant de cette « servante ». Un rappel, donc. Un contrepoint. Un complément?

« Servante » ne me paraît pas tout à fait adapté, comme terme, car, telle que présentée dans cette pièce, je l’appellerais plutôt « dame de compagnie ». Même si elle ne prétend pas être une « Dame », Céleste Albaret, de son vrai nom Augustine Célestine Gineste.

Une performance remarquable de l’actrice, Annick Le Goff. Qui parvient à tenir les spectateurs/trices en haleine pendant 1H15, les faisant passer par toutes les émotions, leur faisant visualiser ce qu’est censée avoir vécu la jeune femme qui accompagna les dernières années de l’écrivain si particulier que fut Marcel Proust.

J’ai moins apprécié le jeu de celle qui intervient dans la seconde partie, Clémence Boisnard, trop statique, presque « empesée ». Dommage… mais peut-être est-ce voulu pour accentuer le contraste?

Je ne vous en dirai pas plus, préférant vous laisser découvrir ce beau spectacle qui nous plonge dans un univers si spécifique, au début du XXème siècle : l’appartement de l’écrivain qui sacrifia son présent au futur de son oeuvre. Et pour celles et ceux qui sont loin des scènes, il reste le livre de Belmont.

Monsieur Proust - Céleste Albaret - Robert Laffont - Poche - Librairie Le  Failler RENNES

Un roman graphique en a été tiré.