Tiens, voilà du Boudin…

Bon, je suis d’accord avec vous, ce titre n’est pas digne d’un blog censé « se tenir »… Mais je n’ai pu m’empêcher de faire référence à cette vieille chanson entendue moultes fois dans mon enfance. Ce n’est toutefois ni de noir ni de blanc, et encore moins de jeune fille, que je veux vous parler aujourd’hui, mais bien de Boudin, de son prénom Louis-Eugène, né à Honfleur en 1824, et mort tout près de là, à Deauville, âgé de 74 ans. Le voici à l’oeuvre (c’est le cas de le dire!)…

On comprend qu’il ait aimé produire des marines!

Et des marines, on voit, on en déguste, et on s’en lasserait presque, dans cette exposition du Musée Marmottan.

Pourtant, j’aime ce genre, et j’aime ce peintre. Mais il y en a vraiment beaucoup, et la faiblesse de la muséographie n’aide pas à éviter la lassitude. Dommage! J’ai compris pourquoi, lorsqu’à la sortie j’ai découvert qu’il s’agissait d’une collection particulière, celle d’un homme que Beaux-Arts qualifie de « mathématicien fou », Yann Guyonvrac’h. Or celui-ci, réputé « prodige des algorithmes » a réussi, à 52 ans à peine, à réunir une incroyable quantité de tableaux de Boudin!

Mais il n’y a pas que des marines : comme son nom l’indique, ce Breton a aussi focalisé sur sa région, et j’ai découvert de charmants tableaux représentant femmes et paysages de « ma bro » d’adoption. Pour les curieux/euses, un peu de langue : son nom est un ancien surnom breton, signifiant « digne d’avoir des chevaux »….

On voyage donc sur les côtes de Bretagne et de France, mais aussi un peu ailleurs, en particulier à Venise, qui donna du fil à retordre au peintre, la lumière écrasant davantage les reliefs naturels ou architecturaux, ce qui explique peut-être que j’aie trouvé ces tableaux moins intéressants…

Voici donc quelques tableaux que j’ai choisis pour illustrer mes propos… Commençons par le plus évident : sur la mer, il y a des bateaux, et, dans ceux-ci, des marins.

Des pêcheurs, mais aussi la marine marchande, voire la Marine Nationale, comme ici à Brest:

Sur la côte, la population est variée, et l’hétérogénéité des scènes saisies par l’artiste est impressionnante. Tantôt une vie laborieuse…

Tantôt la Haute Société qui tient salon sur le sable, comme ici à Trouville…

Mais on s’éloigne parfois des rivages, pour s’intéresser à la vie des villages, lors de noces ou de marchés, par exemple.

J’ai découvert un aspect du peintre que j’ignorais, plus drôle, voire satirique.

Avec un faible, je l’avoue, pour cette jeune Normande…

Un « Moulin » devenu « Smok »

Il était une fois un moulin. Celui-ci était situé sur la Vilaine, non loin de Rennes. La photo, empruntée à ce site, le montre en l’état, au siècle dernier.

« Les moulins d’Apigné sont de datation ancienne mais ont été reconstruits au cours du XIXe siècle. Mise en faillite en 1904, la minoterie est rachetée par J.-M. Huchet pour y installer une briqueterie. Le 5 octobre 1906, des travaux de restauration et de réhabilitation des bâtiments, ainsi que la construction d’un four à briques sont entrepris. Le 1er janvier 1923, constitution d’une société en nom collectif sous la raison sociale Huchet frères et soeurs pour la fabrication et la vente de briques, pour une durée de vingt ans. En 1923, la briqueterie consiste en un grand bâtiment comprenant au rez-de-chaussée : le moteur, les appareils divers à filer et à mouler, les presses, les pompes et du matériel divers, et aux trois étages supérieurs : les séchoirs et un grenier. Un hangar abrite par ailleurs un four à flamme renversée avec sa cheminée, et plusieurs bâtiments sont à usage de logement, de bureaux, de magasins, d’entrepôts ou de séchoirs. Dans les années 1920, la production se cantonne à de la brique pleine, alors qu’elle se diversifie après la crise économique des années 1930 avec de la brique creuse, de parement, de gros oeuvre, de cloison et du hourdis de plancher. Jusqu’en 1940, elle est dirigée par la famille Huchet, puis M. Chatel prend la tête de l’entreprise. De 1954 à 1956, la briqueterie bénéficie d’un développement technologique tourné vers une mécanisation systématique qui va entraîner plusieurs campagnes de travaux et accroître la production. En 1956, mise en place du four-tunnel alimenté au fuel et atteignant 1000°C. La briqueterie cesse toute activité en 1971. Aujourd’hui, les bâtiments abritent différentes associations de sports nautiques.. En 1859, mention d’une machine à vapeur locomobile. En 1906, attestation d’une tuilerie système Bürher. En 1923, existence d’un grand four à feu continu de douze chambres avec ses accessoires. Le matériel d’exploitation comprend des wagonnets, des rails, des plaques tournantes, deux presses à main, des séchoirs mobiles et une turbine hydraulique.. En 1920, la briqueterie emploie une trentaine d’ouvriers et une quarantaine dans les années 1950. » (Source)

Je ne connaissais pas l’histoire lorsque j’ai connu « Le Moulin d’Apigné » voici quelques années… et j’ignorais qu’on employait naguère le pluriel, d’ailleurs. En effet, j’allais parfois dîner dans cet endroit plein de charme : un des bâtiments avait été transformé en restaurant.

En route vers le Pen Ar Bed, il était temps de faire une pause déjeuner : midi sonnait à l’entrée est de Rennes. Or le restaurant est situé à l’extrêmité ouest. Appel. Réponse positive. Vite, direction l’Occident. Mais plus de « Moulin », malgré l’indication des signalétiques voisines. A la place, un « Smok », et une affiche qui donne envie de fuir. Je pense m’être trompée, mais non : les environs sont toujours aussi dignes de Courbet…

… Si l’on excepte les péniches, d’états variés…

Mais c’est bien le moulin, pas d’erreur possible…

Sur la photo ci-dessous, j’ai encadré (à gauche) le petit panneau, à peine visible, indiquant « Moulin d’Apigné ».

Pas de doute possible : le « Smok » est bien l’avatar du « Moulin ».

Fatigue de la route et curiosité aidant, tant pis, allons découvrir ce qu’est devenue notre chère auberge.

Le lieu a été modernisé, c’est le moins que l’on puisse dire, accueillis par deux athlètes.

Mais l’accueil est toujours aussi agréable, et je bénéficie d’une jolie table en bois, non caché sous ou par une nappe, avec une vue sur la rivière, agrémentée par une belle bruyère (pas de triche, la photo est bien prise de ma place, position assise!).

Sagement orientée au départ vers un simple ceviche, je suis séduite par le menu complet.

Alors, me direz-vous, pourquoi ce nom? La suite du menu l’explique : regardez ce que sont les « viandes smokées » :

Se sont donc ajoutées au ceviche (très fin) une Picanha de veau (délicieuse, avec sauce aux champignons frais) et une Tarte au citron (moins aimée, car trop éloignée de la classique de Menton, que j’aime tant… mais originale, avec son goût spécifique).

D’autres avaient préféré le jarret de porc (aussi « smoké ») accompagnés de cocos… de Paimpol, bien sûr! avec une sauce chimichurri.

J’ai évidemment goûté le plat. Et ai trouvé le chimichurri plus fade que celui du restaurant argentin dont je vous ai déjà parlé, El Sur, à Paris. Mais depuis, j’ai appris qu’il y a deux sauces différentes à base de cette épice sud-américaine qu’est le chimichurri :

« C’est un mélange d’herbes et d’épices originaire d’Argentine mais aussi très populaire en Uruguay, au Nicaragua et au Mexique. Il sert à confectionner la sauce du même nom, ainsi que des marinades et des viandes en croûte.

Les deux versions sont légèrement différentes : le Pampeano est particulièrement relevé alors que le Patagonico sera plus doux. » (source)

J’ai ainsi découvert que j’aimais le Pampaneo davantage que le Patagonico!

Quant au Malbec, il faut reconnaître que les Argentins le travaillent mieux que nous. Mais le Madiran proposé à ma demande de Malbec n’était, une fois réchauffé et aéré, pas si mauvais que dans mes souvenirs de ce vin.

Bref, un bel accueil, un repas de qualité pour un prix acceptable, et un lieu qui méritera d’être revu à la belle saison, car en terrasse ce doit être encore mieux!

Au pied du Mont Frugy

Echappée ce week-end en Bretagne… et, bien sûr, envie de vraies krampouz… Mais un dimanche soir, pas facile de trouver une crêperie ouverte! Alors, direction la Grande Ville, à savoir Quimper. Celle de la Place au Beurre, annoncée ouverte sur le net, est en réalité fermée. Et ce fut une chance. Car cela m’a permis de découvrir une petite merveille cachée dans une rue où je ne passe quasiment jamais, car située de l’autre côté de l’Odet. Je m’explique. Cet été, un jour où j’avais aussi du mal à trouver un petit restaurant sympa et pas trop encombré de touristes, j’avais découvert un adorable restaurant oriental rue Sainte Catherine (pas celle de Bordeaux, celle de Kemper). Donc, ce dimanche soir, l’idée m’est venue de retourner dans ce coin un peu à l’écart du centre ville. Et c’est ainsi que je suis arrivée à la crêperie du Frugy.

Le Mont Frugy fut le lieu d’implantation d’un site gallo-romain avec temple, sans doute pour sa position dominante et la proximité des rivières. J’emprunte le plan qui suit à un site sur l’histoire de la ville et le commentaire à un article d’un autre site.

« C’est d’Aquinolia et de son port sur l’Odet (fleuve et non rivière) que les galères romaines venues de l’oceanus Atlanticus débarquèrent légionnaires puis marchandises avant de rejoindre la voie antique de Carhaix (Vorgium, la capitale des Osismes… « les plus lointains » en celtique), mais pour ceux-là pas sans avoir offerts quelques sacrifices sur le plateau de la Déesse qui supporta la guillotine à la Révolution tandis que l’église primitive était fermée par ordre du préfet, celui-ci appuyé par le prudent évêque car le recteur avait refusé de prêter serment à la Constitution civile du clergé (1791) ! Principe de précaution qui n’est pas sans en rappeler d’autres ! Ainsi naquit Kemper, lieu de la confluence entre l’Odet, le Steir et le Jet ! »C’est d’Aquinolia et de son port sur l’Odet (fleuve et non rivière) que les galères romaines venues de l’oceanus Atlanticus débarquèrent légionnaires puis marchandises avant de rejoindre la voie antique de Carhaix (Vorgium, la capitale des Osismes… « les plus lointains » en celtique), mais pour ceux-là pas sans avoir offerts quelques sacrifices sur le plateau de la Déesse qui supporta la guillotine à la Révolution tandis que l’église primitive était fermée par ordre du préfet, celui-ci appuyé par le prudent évêque car le recteur avait refusé de prêter serment à la Constitution civile du clergé (1791) ! Principe de précaution qui n’est pas sans en rappeler d’autres ! Ainsi naquit Kemper, lieu de la confluence entre l’Odet, le Steir et le Jet ! »

Au IIe siècle, les Bretons d’outre-Manche étaient venus s’installer en Armorique pour y fonder leurs communautés celtiques avant d’être évangélisés par les 7 saints de Bretagne au VIe siècle puis, vers l’an mille, de participer à ce fameux « blanc manteau d’églises » dont celle de Locmaria« .

Ce petit détour historique m’a permis de me rendre compte que je ne connaissais pas la nécropole de Locmaria à Quimper! Il faudra que je voie cela aux beaux jours, et que je vous y emmène si vous le souhaitez… Mais revenons à ce dimanche soir de décembre, alors que les clochers de Saint Corentin s’illuminent des couleurs vives de la projection en cours. Et à la crêperie qui porte, comme vous l’avez compris, le nom du Mont au pied duquel elle se situe, rue Sainte Thérèse.

Une petite devanture, un espace restreint, mais de vieilles pierres et un lieu que je qualifierais volontiers d’authentique et de chaleureux.

Et qui allie « plaisir des yeux » et « plaisirs gustatifs », tout en rendant hommage au Pays.

Côté « plaisir des yeux », c’est une incroyable broderie qui orne le mur au pied duquel se situe notre table (photo prise de ma place, ce qui explique l’angle bizarre).

La carte apporte quelques explications à son propos.

Vous ne connaissez peut-être pas Pascal Jaouen? C’est lui qui a donné son nom à une Ecole de broderie d’art renommée dans la ville, dont vous trouverez le site ici. Allez le visiter, vous y verrez des merveilles ! La photo suivante, empruntée au site de la crêperie, montre Pascal Jaouen et Chantal le Bars signant l’oeuvre, inspirée de motifs du pays bigouden.

Chantal Le Bars est une élève de cette prestigieuse école. Un article de Ouest France la présentait en 2015.

Une très belle surprise, donc, dans cette petite crêperie qui ne payait pas de mine, vue de l’extérieur. Et une seconde, avec de délicieuses krampouz, fines et au goût délicat servies par une adorable jeune femme. Le tout, bien sûr, arrosé de Menez Brug. Car on accepte le pays fouesnantais aussi, en ces lieux qui fleurent bon la vraie Bretagne d’hier et d’aujourd’hui. Et où l’on n’arnaque pas le client : deux plats, deux bouteilles (plus une bière locale), quatre cafés… 5 personnes ravies pour moins de 100 euros ! Mérite de figurer dans mes « restos à moins de 50 euros à 2 » !

La Bretagne, du nord ouest au sud est… Saint Pol de Léon

Revenons un peu en arrière, si vous me le permettez. Souvenez-vous, je vous ai laissé-e-s à la cathédrale de Saint Pol de Léon…

Un dernier regard à l’édifice, et direction « La Maison de l’Artichaut ». Je ne sais si cela fait partie de votre bagage de connaissances, mais le Léon est une grande région productrice d’artichauts. Et il existe même une Confrérie de l’Artichaut, à laquelle j’ai emprunté cette photo et le texte qui suit, qui organise en juillet une Fête de l’Artichaut.

« C’était en 1989 ! Dans l’indifférence générale, une poignée d’amis, producteurs, journalistes… décidaient de s’associer pour fonder la Confrérie de l’Artichaut. Les réunions des « frères » devinrent vite un creuset d’idées. Un peu plus tard, une délégation se rend aux Etats-Unis dans le but de comprendre comment la petite ville de Castroville en Californie a réussi à s’autoproclamer « capitale mondiale de l’artichaut ». Sur la côte Pacifique, trois producteurs cultivent à eux-seuls la même surface que 3.000 Bretons…. »

Eh bien, j’ai été déçue! Rien. Absolument rien. Ni accueil, ni exposition, ni dégustation. Ce n’était pas LE bon jour ni LA bonne heure de la semaine! Enfin, rien… si, il y a un artisan qui fait honneur au légume de son bra. Devinez son métier?

Eh oui! c’est un sabotier qui m’a fait découvrir les fleurs dont j’ignorais l’apparence…

Par contre, les commerçants profitent du joyau de leur région : on peut le déguster sous toutes ses formes, y compris en glace! et un restaurant gastronomique le décline en farci.

Déçue, je reprends la visite de la ville, pour découvrir une architecture hétéroclite mais quelques beaux joyaux.

Déjeuner à la petite crêperie, que vous apercevez sur cette photo. Deux heures pour deux krampouz!!! Une jeune femme se démenait, tandis qu’une seconde « glandait »… et plus d’une dizaine de client-e-s ont été refusé-e-s pendant que je patientais entre deux bières, entre deux crêpes… Bon, d’accord, cela valait le coup car elles étaient excellentes, et originales. Notamment la crêpe à… l’artichaut, bien sûr!

Une erreur s’est glissée dans mon texte : je n’ai pas bu de bière! Non, c’était de la cervoise!

Au fait, savez-vous quelle est la différence entre les deux?

« Ancêtre de la bière de l’époque gauloise, la cervoise est concoctée avec de l’eau, des céréales et des herbes aromatiques. Le mélange d’herbes aromatiques est appelé « gruit ». En fait, ce qui va caractériser la cervoise par rapport à une bière, c’est qu’elle ne contient pas de houblon. »

Mais l’étiquette m’a quelque peu interpellée…

Quant au plat, jugez plutôt : aussi beau que bon…

Promenade digestive à travers la cité… direction, les lavoirs.

Il y avait plusieurs lavoirs dans la cité.

« Pendant longtemps, la rue des Lavoirs a été un axe principal de la commune. L’accès à la ville, y compris pour les diligences du XIX ème siècle, empruntait un itinéraire sinueux depuis le Kreisker pour aboutir dans cette rue. L’hôtel attenant était autrefois un relais de poste. Avant de servir à laver le linge domestique, les lavoirs étaient utilisés pour blanchir le fil de la toile de lin mais aussi pour nettoyer les abats des boucheries de la rue aux Os (aujourd’hui aux Eaux !). » (source)

Le premier, que vous apercevez à gauche de cette photo, est davantage une fontaine, en breton « lenn« .

« A l’origine, la fontaine Lenn ar Gloar ( de la Gloire) portait le nom du premier évêque, Saint Pol qui l’aurait bénite en arrivant dans la ville au VI ème siècle.

Jamais on ne l’a vu tarir, même par les temps de grande sécheresse. La fontaine de dévotion qui alimente le lavoir voisin abrite une niche supportant une statue de la Vierge à l’Enfant en kersantite du XVI ème siècle. Pendant très longtemps, un pardon s’y tint chaque année le 15 août. Elle est réputée fontaine guérisseuse : souvent en versant cette eau sur soi, beaucoup d’infirmes et de malades auraient retrouvé la santé. »

Effectivement, il y avait de l’eau, à cette époque de sécheresse.

Un peu plus bas, un grand lavoir attend celles que l’on ne nommait pas ici « bugadières », mais « kannerez » ou « gwalc’herez ».

Il est désormais bien déserté, et les lentilles d’eau posent question quant à sa fonction première, mais naguère il fut très fréquenté, comme en attestent photos et tableaux. Comme celui-ci, exposé à l’autre bout de la France : au Musée de Lunéville auquel il a été donné en 1909.

On y reconnaît les maisons photographiées ci-dessous (source).

L’heure tourne, il est temps de revenir à Gwen Glass (mon vieux Master), pour aller explorer les alentours… Non sans m’intéresser à d’autres aspects de la ville…

Fantaisies ligneuses

Alors qu’il s’est passé une semaine depuis, je poursuis la visite de la cathédrale de Saint Pol de Léon, pour vous faire découvrir de petites merveilles…

Dans le choeur, des stalles. Beaucoup de stalles. 16 d’un côté, 17 de l’autre, sur deux rangées. Si vous comptez bien, cela fait 66. Les stalles hautes jouissent d’un dossier à baldaquin. L’ensemble date du 16ème siècle. Mais ce n’est ni pour l’histoire ni pour les mathématiques que je vous en parle, mais pour leur extraordinaire richesse iconographique.

Comme on le voit sur la photo précédente, mais aussi sur la suivante et d’autres, de nombreux graffitis ne peuvent être datés, et leur sens n’est pas vraiment évident.

Leurs concepteurs s’en sont donné à coeur joie. Certes, on s’attend à des motifs religieux. Et il y en a. Peu. Essentiellement des personnages.

Mais on s’attend moins à un bestiaire varié.

Et l’Ardennaise en moi a été ravie de voir l’animal emblématique de la région d’origine!

Bien sûr, le Dragon est présent.

J’ai particulièrement apprécié l’aspect réaliste, voire caricatural, de certains personnages. En voici quelques-uns…


On découvre enfin des scènes difficiles à interpréter.

Un Dragon, un poisson et un taureau…

J’expliquais dans mon précédent article que je le poursuivrais par deux autres. Voici donc le deuxième, que je consacrerai au fondateur légendaire de la ville, Saint Pol.

Kantik sant Paol

Sant Paol, patron benniget
Hor bro gaer a Leon
Ni’fell d’eomp oll ho karet
Kennerzit hor c’halon
Enn hon touez ho relegou
‘Zo hor brasa tenzor
Evel gwechal hon tadou
Ni rento d’eo henor

 
Saint Paul, patron vénéré
de notre beau pays de Léon
Nous voulons tous vous aimer
Raffermissez nos coeurs
Parmi nous, vos reliques
sont notre plus grand trésor
Comme autrefois nos pères
Nous leur faisons honneur.
 
Kristenien vad Bro Leon
En enor d’an Dreinded
Ha da sant Paol, hor Paeron
Hon tad meurbed karet
Holl kanomp mil meuleudi
Karantez ha bennoz
Ra vo d’eomp-ni eun dudi
E veuli deiz ha noz.
C’houi, hor patron benniget
Diouallit ac’hahomp
Er iec’hed hag er c’hlenved,
Ouz-oc’h en em bedomp
Keit a ma vezo reier
Var bord aochou Leon,
Grit ma vo nerzuz, tener,
Ar feiz enn hor c’halon.

Je n’ai pas trouuvé la traduction des des deux dernières strophes. Si quelqu’un peut m’aider?

Je ne sais pourquoi on le désigne par un nom plus complet : Pol Aurélien. Peut-être pour le distinguer du Paul romain?

Vous aviez remarqué le dragon sous les pieds de la statue? C’est à cet animal si symbolique que je vais consacrer la suite… Mais continuons au préalable avec la vie du Saint, en particulier la cloche censée lui avoir été apportée par un poisson (d’avril?). Une autre version raconte qu’elle aurait été découverte dans le ventre d’un poisson présenté comme mets lors d’un repas.

Trois verrières sont consacrées à des épisodes de cette vie de légende. La première, à son entrée dans la « ville morte ».

La seconde le montre intimidant un superbe taureau (pour quelqu’une qui est du signe du Taureau pour les Occidentaux et du Dragon pour les Chinois, un homme à fuir!)

La troisième est bien sûr consacrée au terrassement du dragon, sur l’Ile de Batz toute proche.

La biographie de Pol Aurélien a été écrite par un moine au 9ème siècle. Cela donne des repères, même si l’on sait que l’on ne peut accorder tout crédit à ce type de Vita.

« D’après l’hagiographie, la Vie de Paul Aurélien, écrite en 884 par le moine Uurmonoc de l’abbaye de Landévenec1, Paul Aurélien serait un moine venu du Pays de Galles pour évangéliser le territoire des Osismes vers 525. Il aurait été le premier évêque de la ville, peut-être une abbaye-évêché sur le modèle irlandais. » (article fort bien documenté de Wikipédia)

Sa tombe est située devant le maître-autel.

Le dragon est représenté sur le mobilier funéraire de la cathédrale. Par exemple, sur le tombeau de Roland de Neufville (évêque de 1562 à 1613… ça fait 51 ans!!! pas mal, non?)

(source de la photo)

Un autre exemple : le tombeau de René de Rieux, évêque qui lui a succédé, monument provenant de l’abbaye du Relec.

Je n’ai pas réussi les photos des autres tombeaux, et vous devrez me croire sur parole. Seule la position de la lance varie…

Laissons là le Monstre et son Vainqueur, et dirigeons-nous vers les stalles pour admirer le travail et l’humour des menuisiers et (ou?) ébénistes… Mais ce sera l’objet d’un autre texte… A bientôt!

… Léonarde d’un jour

Après une agréable nuit sur la Baie de Morlaix, direction la ville. Pas question de quitter le coin sans être allée rendre visite à cette Gloire Bretonne de jadis, dont j’ai tant entendu parler. J’avais emprunté, la veille, à l’accueil du camping, un ouvrage pour me cultiver. Mais je dois bien avouer que je ne l’ai pas lu en entier!

Partons donc à la découverteUn joyeux bric-à-brac jouxte le théâtre catholique…

Le monument aux morts a un petit côté nationaliste (mais breton).

Le bar du coin fait référence à Robin des Bois….

… mais les bières quittent la Bretagne des Romans de la Table Ronde pour revenir au Pays Bigouden, pourtant loin de Saint Paul… et de Carhaix d’ailleurs.

Bien sûr, première destination, la cathédrale. N’oublions pas que cette ville fut le siège d’un des sept évêchés de Bretagne! La paroisse actuelle correspond à un doyenné de jadis, avec ses 19 « clochers », comme on dit.

« Le haut Léon est la partie occidentale de l’ancien évêché du Léon, dont la capitale était Saint Pol de Léon, ( en breton Kastell Paol ). Il s’étend entre la côte des légendes et le pays de Morlaix.
Posées sur le littoral du Finistère, les communautés de la paroisse Saint Paul Aurélien du haut Léon sont implantées sur une terre fortement rurale mais qui possède également une facade maritime importante.
La paroisse s’étend de la communauté de Tréflez à l’ouest, à celle de Locquénolé à l’est
. »

Comme il y a beaucoup à dire sur la ville, je me propose de scinder mon propos en trois parties : les « étonnements », les « dragons », et « autres découvertes ». Commençons donc par ce qui m’a étonnée, en visitant la cathédrale.

« La cathédrale St Paul-Aurélien est en fait l’ancienne cathédrale du diocèse du Léon, lequel fut supprimé lors de la révolution française en 1790, seul restant le diocèse de Quimper. Cet imposant édifice de style gothique et d’influence normande a été construit entre le 13ème et le 16ème siècle. Ses fondations reposent sur les ruines d’une précédente église romane du 12ème siècle. La nef du 13ème siècle a été bâtie en pierre de Caen, ce qui est inhabituel pour la région. Le reste de l’édifice est en granit. L’abside, le chœur et les chapelles latérales datent des 15ème et 16ème siècles. » (source)

Entrons donc dans l’édifice.

En premier lieu, ce damier qui rend l’orgue si original.

Evidemment, le damier noir et blanc m’a poussée à faire des recherches sur le facteur d’orgue. Venu d’outre-Manche, le Stuartiste Dallam s’est réfugié dans la ville de Morlais, toute proche, et, durant son séjour, a conçu plusieurs orgues, dont celui-ci. Mon hypothèse s’est révélée confirmée par un article du Télégramme, faisant référence à des recherches que je n’ai hélas pas trouvées en ligne.

« Des travaux récents d’un jeune docteur en musicologie et histoire de l’art ont révélé à ce sujet un document de taille : le grand orgue de la cathédrale de Saint-Pol-de-Léon, cet extraordinaire instrument, serait, sans doute, l’un des témoins les plus éloquents et le moins discutable des idées maçonniques circulant dans l’entourage de la reine Henriette d’Angleterre, la mystérieuse veuve du symbolisme maçonnique, suivant certains auteurs. »

« Pour rappel, les historiens font remonter la fondation des premières loges sur le territoire français à l’installation au château de Saint-Germain de la cour des rois anglais catholiques Stuarts en exil, en 1649. Autour d’Henriette de France, fille d’Henri IV et veuve de Charles Ier d’Angleterre, décapité à l’instigation de Cromwell, et de ses deux fils qui régneront successivement sous le nom de Charles II et Jacques II, les fidèles catholiques écossais et irlandais dissimulaient derrière le secret maçonnique leurs agissements politiques en vue du rétablissement de la monarchie catholique en Grande-Bretagne. Après le retour de Charles II, à Londres, et le rétablissement de la monarchie anglaise sur le trône, en 1660, Robert Dallam rentra en Angleterre, et c’en fut provisoirement fini, en France, des relations de la musique et de la franc-maçonnerie. »

Les Dallam sont facteurs d’orgue de père en fils. Le père de Robert, Thomas Dallam, est à l’origine des orgues de Westminster et d’une partie de Canterbury. Outre la Bretagne, Robert a oeuvré à York, Oxford et Londres. Et son fils, Charles, est resté en Bretagne, où on lui doit de nombreux instruments.

Mes « étonnements » furent de divers ordres. Commençons par ce que je n’avais jamais vu ailleurs.

Au-dessus de l’autel, comme une grosse clochette florale. Qu’est-ce?

Visiblement, je ne suis pas la seule à l’ignorer, car un panonceau bien placé apporte les explications souhaitées.

Une liste des défunts et défuntes de l’année, mise en évidence par une sorte de petit retable.

Puisque nous parlons de mort, voici une autre source d’étonnement, pour ne pas dire d’effroi…

35 boîtes, sous forme de chapelles surmontées d’une croix, dans lesquelles sont placés des crânes, identifiés et datés. L’ensemble porte le beau nom d’ « Etagères de la Nuit ».

Mais laissons le côté sombre, pour parler de lumière… La cathédrale est astucieusement éclairée de lumière jaune qui mettent en relief architecture et décors.

Et je terminerai par la magnifique rosace…

Léonarde d’un soir…

Avez-vous déjà essayé de trouver un camping en Bretagne (plus précisément non loin de Morlaix), un 5 août, à partir de 17h30? Une vraie gageure! Statistiques personnelles : un tiers ne répond pas au téléphone; un tiers précise par répondeur interposé qu’il ferme à 18h; et le dernier tiers, qui répond enfin, est complet… J’ai quand même fini, après une demi-heure d’efforts, par obtenir une réponse positive, à Saint Pol de Léon.

Voilà qui tombe bien : je ne me suis jamais arrêtée dans cette ville! L’accueil ferme à 19h, pas une minute à perdre (au sens vrai du terme : Waze annonce une arrivée à 18h59). Mais quand même rassurée par la voix qui me précise qu’on peut avoir le numéro de l’emplacement au bar…

Un endroit inattendu : un promontoire sur la plage de Sainte Anne, caractérisée par une longue languette s’avançant dans la Baie de Morlaix. Un emplacement tranquille, bien à l’abri du vent… et des voisins fort aimables habitant… à quelques kms de Mers-les-Bains, à Bouttencourt!

Installation faite, reste à trouver à manger… pas de pain au camping, ni de petite restauration. Tant pis, ce sera resto… Il y en a 4 en bord de plage, pas difficile! Petite marche, donc. Et analyse des cartes et menus. Puis appels. D’abord, celui qui tente le plus. « Complet ». Et l’on continue… Tous « complets »! On nous conseille d’aller en ville. Mais il y a plus de 3kms, et il est déjà fort tard pour une région où l’on dîne traditionnellement assez tôt. Il ne reste plus que le resto-plage, Effet-Mer. Pour des raisons liées au droit à l’image, je n’ai pas pris la photo de l’ensemble. En voici une empruntée au site Restaurant Guru.

Une terrasse sympa, en bordure de sable.

Un accueil tout aussi sympa, mais… « On n’a plus rien ». Je n’y crois pas et insiste. « On a recommandé 30kgs de moules cet après-midi, et tout a été liquidé en un rien de temps ce soir ». J’insiste à nouveau « Même pas un petit encornet? ». « Non, plus rien ». Devant mon air désespéré, les serveurs se concertent. « On pourrait à la limite vous faire un steak haché frites ». Et voilà comment on se retrouve devant une bière, un steak haché et des frites, à 21h, en laine polaire, en plein mois d’août!

Mais pas de regrets. Les gens sont très aimables, convives comme serveurs, et la musique est bien choisie. Lynurd Skynyrd, par exemple…

Stéphane Gilet entre les deux Nicolas, en salle et aux fourneaux. (emprunt au Télégramme). Je parlais entre autres des « Deux Nicolas », les deux autres personnes rencontrées ne sont pas sur cette photo

La bière est bonne… Et l’on m’offre même un Calva! Pourquoi? Apparemment, ils n’ont pas l’habitude qu’on aide en débarrassant sa table… et ça les a fait bien rire. Et puis, j’avais demandé un Lambig, et me suis fait traiter de « touriste ». Avec le sourire, bien sûr!

Bref, une super soirée qui avait pourtant bien mal commencé…

Un fest-noz en Normandie

Je vous ai laissé-e-s hier à Belleville-sur-Mer, plus exactement à l’entrée de la salle de spectacle, Scène-en-Mer. Trois groupes étaient annoncés pour fêter la Saint Patrick. Pénétrons donc dans ces lieux de culture celtique en plein pays normand…


Le premier a suscité mon étonnement. Un groupe de grands gaillards que l’on pourrait imaginer tout droit sortis des Highlands. En tenue superbe d’Ecossais. Le nom du groupe? Celtik en Caux. Voilà qui fait moins écossais, n’est-ce pas? Effectivement, ils sont bien du Pays de Caux, en Normandie. Un groupe de passionnés qui a fait partager sa connaissance du pays du Chardon, en présentant un savoureux cocktail d’histoire de l’Ecosse et de ses héros, de films consacrés à ce pays et de musique du cru. Je ne résiste pas à l’envie de vous faire voir leur « blason », qui allie Normandie et Ecosse…

Les musiciens se répartissent ceux des héros, au gré de ressemblances plus ou moins fantaisistes, car l’humour ne leur fait pas défaut.

J’ai tenté de capter quelques extraits, pour que vous en ayez une idée, mais le résultat n’est pas formidable. En ce petit village, la soirée a compté presque 500 participants payant!

Changement de tonalité (dans tous les sens du terme) avec le deuxième groupe, Ormuz. Beaucoup plus chantant, beaucoup plus poétique aussi. Et beaucoup plus breton, même si la plupart des chansons étaient hélas interprétées en français. Le fil conducteur choisi par le groupe est une noce bretonne, archive INA des années 1900. Vous pouvez regarder la vidéo sur YouTube. A chaque épisode les artistes relient une chanson. Par exemple, cette interprétation d’une chanson religieuse, Santez Anna, qui venait d’être introduite par une scène comique et quelque peu satirique : un prêtre sur scène, dont il est dit qu’il ne monte pas en chaire à moins de 8 grammes (d’alcool dans le sang!) et qu’il a inventé le Godspel breton…

Pour entraîner dans les ridées et andro, un petit groupe de personnes en magnifiques costumes bretons était venu d’une association, Les Bretons du Havre (source des photos : le site de l’association).

Les coiffes de Lorient adaptées à l’âge des femmes : la plus âgée avait la plus ancienne, mais aussi la plus belle.

Le public s’est élancé sur la piste… de quoi constater que peu provenaient de Bretagne, à en juger par l’inexpérience et la difficulté à apprendre!

Le dernier groupe va reprendre le flambeau, côté danse.

Le premier groupe était local, le deuxième venait du Nord, ce dernier arrivait de Dijon… et, si le morceau écouté vous a paru assez calme, Lemonfly a fait une entrée fracassante avec du Métal, qui rompait avec ce qui avait précédé. Son répertoire est très varié, et le batteur a le sens de l’animation, c’est le moins qu’on puisse dire! On a même eu droit à un demi strip-tease… et au déploiement d’une grande banderole pour nous apprendre le breton. Qu’était-il écrit dessus? Nanananananananananeno!

Saint Patrick peut donc reposer en paix (il a été bien fêté!) mais pas trop, si ces musiques et chants, entonnés à la fin par tout le public, lui sont parvenus, en alliant le trèfle au chardon et aux coquelicots.