Une église questionnante

Nous étions, dans notre promenade à Trouville, arrivés face à un édifice étrange, à l’architecture tout aussi interpellante que ses décors. La rue voisine indique où il est situé…

Son architecture extérieure n’incite vraiment pas à la visiter, mais vous connaissez ma curiosité! J’ai, depuis, compris les raisons de son étrangeté : des remaniements hétéroclites.

« Inscrite au titre des monuments historiques depuis 1926, l’église Saint-Thomas de Touques a été énormément remaniée depuis sa construction au XIIe siècle, et ne conserve plus d’origine que sa tour clocher (haute de 21 mètres), surmontée d’une flèche octogonale néo-gothique ajoutée après la réfection du clocher en 1870 »

Mais par où entrer? C’est désormais le grand jeu dans de nombreuses églises : trouver la bonne porte, la principale étant la plupart du temps bien close. En l’occurrence, on entre par une petite porte accessible par un petit escalier, qui conduite dans un petit couloir avant d’arriver enfin à gauche du choeur, face à de petites orgues.

Il s’agit de ce que l’on nomme « orgue de choeur », car l’église comporte deux instruments, comme je viens de l’apprendre grâce à Wikipédia, article que je vous cite intégralement, liens compris, pour votre culture personnelle…

« L’église possède un orgue de tribune de Cavaillé-Coll installé en 1870 et restauré en 19872 et un orgue de chœur, également de Cavaillé-Coll, d’une qualité sonore remarquable, construit en 1894. Ce dernier possède neuf jeux sur deux claviers et pédalier. Il a fait l’objet d’un relevage en 20163. Le compositeur Édouard Devernay y fut organiste titulaire de 1912 à 1952. »

On remarque d’entrée de jeu (c’est le cas de le dire!) la croix de Malte, omniprésente dans l’édifice. Une porte dérobée, dans le choeur permettait aux lépreux d’assister aux offices. Je regrette de ne pas l’avoir su avant, car je ne l’ai pas remarquée. A moins qu’il ne s’agisse de celle par laquelle je suis arrivée?

J’ai eu du mal à comprendre le nom de l’église. En effet, elle est présentée comme « Notre Dame des Victoires ».

Mais, à l’intérieur, figure tout un développement sur « Saint Thomas de la Touques ».

Une lecture toute fraîche du blog à ce nom m’a fait comprendre que l’église était devenue « église-relais » d’une paroisse étendue à plusieurs localités, dont Trouville, et que c’était le nom de cette paroisse. En effet, la seconde église, que je vous ai présentée hier comme étant plus ou moins à l’abandon, a été désacralisée, et il ne reste plus que celle-ci pour la paroisse qui s’est, comme beaucoup d’autres, élargie aux villages et bourgs environnants. Mais qui est ce saint patron? Je ne l’avais pas deviné. Et pourtant il est célèbre! Ce n’est ni plus ni moins que Thomas Becket.

« L’attachement de la Normandie à saint Thomas Becket s’explique d’autant mieux qu’il était lui-même normand d’origine. Raymonde Foreville assure que son père, Gilbert, appartenait à la bourgeoisie de Rouen et sa mère à celle de Caen.

Notons en passant qu’il y a en Normandie bien des Becquet, Béquet et Béchet, sans parler des toponymes. » (source)

Rien d’étonnant, donc, à ce que, bien que né en Angleterre, il soit venu à Trouville avant de devenir Archevêque de Canterbury. Il fit en effet de nombreux passages en Normandie.

« Thomas séjourne avec Henri II en Normandie en février 1156 (à Rouen), en septembre et en novembre de la même année (à Domfront, Caen et Argentan), puis de janvier à mars 1157 (à Falaise, Caen, Bayeux et Rouen). Nous le trouvons encore en Normandie, vraisemblablement durant la seconde moitié de l’année 1158, puis certainement en janvier 1159 (à Argentan et à Rouen). Il y est encore au printemps et durant l’été 1160, au moment où il fallait se prononcer sur le schisme entre Alexandre III et Victor IV, candidat de l’empereur Frédéric Barberousse. Thomas est sans doute encore en Normandie plus tard au cours de cette même année et, avec quelques interruptions, jusqu’en mai 1162. À ce moment, à Falaise, Henri II lui fait part de sa volonté de le faire élire archevêque de Cantorbéry et lui arrache son consentement. Le chancelier se rend ensuite en Angleterre et retourne seulement en mai 1163 brièvement sur le continent pour prendre part (alors en tant qu’archevêque de Cantorbéry) au concile de Tours, réuni par le pape Alexandre III« 

En outre, on sait à quel point il est relié à la lèpre, car considéré comme l’auteur de nombreux miracles concernant les victimes de cette maladie.

Benoît et Guillaume, dont les textes, analysés par Raymonde Foreville, font état d’un certain nombre de pèlerins venus de Normandie et favorisés de la guérison d’infirmités, de maladies ou de séquelles traumatiques graves. Parmi eux il y eut notamment, dès 1171, un chevalier prénommé Eudes venu de Falaise.
Vint ensuite et fut guéri à Cantorbéry le lépreux Gautier, originaire de Lisors, paroisse voisine de l’abbaye de Mortemer (Eure). Cette guérison mérite d’autant plus d’être rapportée que l’on vit plusieurs léproseries normandes se mettre sous le patronage de saint Thomas le Martyr. Sont encore mentionnés : un adolescent de Villedieu (les-Poèles), une femme aveugle du diocèse de
Bayeux, un pèlerin d’Eu, un autre de Valognes, pour ne citer que des miraculé
s » (ibidem)

Le choeur est d’une architecture saisissante, ne serait-ce que par ses proportions, mais aussi par ses ornements.

La nef ne manque pas de beauté, et sert d’écrin à l’orgue dont il fut question plus haut.

Loin de moi l’idée de vous lasser en passant en revue tous les détails de cet édifice. Je vous laisse le soin de les découvrir vous-même! Juste, en passant, une idée des vitraux dont la modernité saisit mais ne choque pas.

Tout aussi modernes, les fresques sur les parois ont déjà subi des vicissitudes…

La coquille du bénitier me laisse coite, par ses imposantes proportions. Mais nous ne sommes pas loin des ports faisant commerce avec les contrées lointaines où l’on pêche le tridacne géant.

Il n’est pourtant pas dans la liste des nombreux objets classés de cette église, contrairement à bien d’autres. Remarquable, aussi, cette plaque ovaloïde, que malheureusement j’ai eu des difficultés à photographier car une ombre lui nuit. J’espère que vous réussirez à la lire.

Moins pérenne, mais tout aussi remarquable, la crèche à laquelle un écrin de verdure procure une certaine originalité, pour ne pas dire une originalité certaine.

De chapelle en dolmen… découvertes plus ou moins ratées…

Je voudrais revenir sur l’article d’hier, pour signaler une erreur. En me promenant le lendemain matin dans le centre d’Erquy, j’ai visité l’office du tourisme, où l’on m’a remis un plan de la ville et des environs.

Ce que je désignais dans mon précédent article comme une église est en réalité la Chapelle des Marins. Rien d’étonnant donc à ce qu’elle domine ainsi la ville et le port. Elle ne défie pas le phare (ou vice-versa), selon l’image que j’en avais, mais au contraire lui répond, en protection bienvieillante des héros de la Mer.

Impossible de pénétrer à l’intérieur… J’aurais aimé voir si elle est aussi belle dans sa simplicité que celle de Sainte Marine… Apparemment, elle abrite aussi des pièces évoquant les risques vécus par les marins du coin qui, peu avant sa construction (1867), remplacèrent la pêche en Terre-Neuve par celle d’Islande. Beaucoup de ces jeunes marins qui partaient au printemps ne revenaient pas à la fin de l’été. C’est à Paimpol que Loti a situé son roman, mais on pourrait imaginer les mêmes scènes à Erquy… Pour en connaître davantage sur la chapelle actuelle, qui en a remplacé une autre, détruite au moment de la Révolution, dédiée aux sept saints de Bretagne.

Quant à l’église elle-même, bien sûr, je ne l’ai pas oubliée et voulais la visiter. Hélas un corbillard arrêté devant indiquait clairement que ce n’était pas le bon moment… ce que confirma un charmant jeune croque-mort qui attendait là.

Mais après ce détour précisant l’erreur commise la veille, revenons au petit matin. Les chambres de ce petit hôtel ont été bien pensées, car leur baie vitrée offre une vue incomparable de 180 degrés sur la baie…

A gauche
… comme à droite

Aussi belle vue de la salle de restaurant, où le petit-déjeuner est aussi copieux que délicieux.

Après une petite sieste post-prandiale, départ pour une visite du bourg. Le petit centre ville est très animé, mais peu caractéristique de l’architecture bretonne, à quelques exceptions près…

Je cherchais en vain la halle annoncée… elle est réduite à une espèce de mini hangar, qui doit abriter le marché hors temps de fête. Décevant, donc, globalement, ce centre, mais orné d’étonnants décors….

Quand balais et pelles rivalisent avec le Street Art…
Les feuillages auraient pu s’aligner aux troncs et branches!
Vous avez dit « coquilles »?

Chose promise, chose due… je me dirige vers l’église. Séduite par une petite place située sur son flanc nord, je regrette que la terrasse soit fermée. Il doit faire bon s’y attarder au soleil!

Elle a succédé à un café peint par un natif de la ville, Léon Hamonet.

Si vous voulez en savoir plus sur ce peintre, né en 1877 à Erquy, je vous conseille le site qui lui est dédié. Son petit-fils a écrit une biographie émouvante, accessible en ligne.

Une ruelle m’attire. Elle permet de contourner l’église, et je m’y engage donc.

Une date qui me questionne…

Au passage, une date m’intrigue. J’avais l’impression que l’église était plus ancienne… Je continue à être surprise par les formes surprenantes des différentes parties de l’église, qui forment un ensemble assez hétérogène…

Comme dit plus haut, je n’ai pu visiter l’église. Ce n’est donc que plus tard que j’ai mieux compris cette impression. L’édifice a en effet été remanié à de multiples reprises.

Je regrette d’autant plus de n’avoir pu voir l’intérieur qu’il abrite un remarquable bénitier à cariatides du XIIème siècle.

Laissant l’église derrière moi, je repars vers le centre ville, délaissant des ruelles pourtant bien tentantes… décidément, il me faudra revenir!


Un dolmen est annoncé par le dépliant. Direction donc la campagne proche. Mais tours et détours n’y ont rien fait… Il n’est signalé nulle part dans le coin où je le recherchais, et je dus donc me résoudre à abandonner mon projet. Voici donc tout ce que j’ai pu en voir… une des photos du site de la ville

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Dolmen avec cairn, dit de La Ville Hamon

Une petite devinette : de quel type de pierres est-il fait? (facile!)… c’est pour en savoir plus à ce sujet que ma destination suivante fut le Cap d’Erquy. Mais ce sera un autre article…