Qui d’entre vous ne s’est pas un dimanche soir heurté à cette difficulté? Trouver un lieu vivant, un petit restaurant où clore le week-end avec des copains/copines ou ami-e-s ? Se restaurer dans tous les sens du terme avant d’aborder la semaine de travail?
Les Parisien-ne-s pouvaient, jusqu’à 2020, échapper à « la malédiction du dimanche soir ». La crise a quelque peu changé la donne : même en semaine la capitale « vit » moins… que dire de cette soirée qui clôt ou ouvre la semaine, selon les cultures. Rappelons qu’en langue arabe, par exemple, la dénomination des jours de la semaine indique qu’elle commence le dimanche : son nom signifie « le premier », le lundi étant « le deuxième », le mardi « le troisième », etc. Seul le vendredi échappe à cette règle, puisque son nom désigne une « assemblée ». En effet, c’est le jour saint de la semaine, celui d’une Prière spécifique. Il correspond dans l’histoire à la veille du Sabbat. Le « week-end » est donc, pour les pays musulmans, le vendredi-samedi et non le samedi-dimanche. Mais revenons à Paris un dimanche soir… je viens de rentrer de Picardie. Il fait froid dans mon studio. J’ai faim… Un appel d’amis qui me proposent de sortir. Il est déjà plus de 20 heures… Nous décidons de nous retrouver près du Panthéon. Chose dite, chose faite. Il est maintenant 21 heures. Où aller dîner dans une ambiance chaleureuse? Ils connaissent une adresse à la Contrescarpe. Que je ne connais pas? Eh oui! Je n’ai pas encore exploré tous les recoins de ce quartier…
Alors que les rues environnantes sont quasi-désertes, y compris ma rue si vivante la semaine avec tous les bars pour étudiant-e-s ouvrant leur terrasse le soir même en hiver, le quartier que j’aime beaucoup est toujours aussi animé. A vrai dire, la crise a eu du bon en éloignant les touristes : la Contrescarpe a retrouvé son allure de quartier où règnent les mixités.
Je vous laisse deviner le type de nourriture qui y est servi, en vous donnant un indice.
Dos du Menu
Avez-vous remarqué deux choses ?
D’abord, on dirait une île!!!
Ensuite, je vous propose un jeu : situez Saïgon… A vous…
En entrant, je suis saisie par l’atmosphère à la fois calme, sereine et chaleureuse qui règne dans ce petit restaurant. Les gens ont l’air bien, heureux… ça tranche avec la morosité ambiante!
La carte est d’un goût étrange, très colorée. Les plats plus connus des Français y cohabitent avec d’autres plus originaux. Les prix sont abordables (autour de 10-15 euros le plat principal ou unique). Les plats sont aussi joliment présentés qu’ils se révèlent pleins de saveurs fines et diverses. Les beignets sont un régal, les nems aussi. Le canard au tamarin est un ravissement. Quant au poulet à la citronnelle, il enchante les papilles…
Quatre trésors
A propos de « trésor », je suis preneuse de l’explication de ce terme très employé dans la cuisine vietnamienne. Qui sait à quoi il correspond? Je n’ai pas trouvé la réponse sur le net!
Le décor de la salle est un peu trop chargé, comme souvent dans ce type de restaurant, mais certains détails le distinguent de la plupart d’entre eux.
J’ai beaucoup apprécié ces mini-vanneries… Excusez la mauvaise qualité des photos, mon Iphone n’est décidément pas bon pour oeuvrer la nuit! Et ici, lumière douce pour ambiance feutrée…
Il ne me reste plus qu’à vous donner l’adresse de ce petit repaire convivial. Retour au Menu…
Le plaisir de retrouver la Ville. Pas l’Eternelle. En ce moment, on ne peut plus l’atteindre. Mais, vous savez, celle dont le bateau vogue mais ne coule pas?
Ecole avec date 1904 portant fièrement le blason de la Ville
Je me suis donc offert une petite promenade de 16.30 à 17.30, couvre-feu oblige, en ce 15 février moins froid que les journées précédentes. Rue Monge, rue Pestalozzi, rue de l’Epée de Bois, rue Mouffetard, et retour vers la Seine. Je vous sens frémir de curiosité toponymique, n’est-ce pas?
Monge, vous connaissez, même si vous n’aimez pas les mathématiques. Mais connaissez-vous son prénom? Gaspard! Non, pas le « pauvre Gaspard » de Rutebeuf… Il était Comte (de Péluse), et, si son nom a été donné à la rue et la place de ce quartier, c’est qu’elles sont proches de l’ancienne Ecole Polytechnique dont il fut l’un des fondateurs et où il enseigna. Je ne vais pas disserter sur lui, il y aurait beaucoup à dire. Du bon comme du mauvais. Donc je vous laisse vous plonger dans sa biographie, ses cours et/ou ses oeuvres scientifiques, voire sa « correspondance mathématique » éditée en 1947 par René Taton (un Ardennais ! – il faut rappeler que Monge avait épousé une riche veuve propriétaire d’une fonderie ardennaise).
Avec son copain Napoléon, je ne vous dis pas où…
Mais Pestalozzi??? Plus difficile, non? Qui le connaît? Si vous n’avez pas entendu parler de lui, c’est vraiment triste, car cet homme mena de nombreuses expériences pédagogiques, fort en avance sur son époque, ce qui lui valut de nombreux déboires. Prenez le temps de le découvrir sur le site de La Ligue de l’Enseignement belge. Et, ce qui ne gâte rien, dans la lignée de Rousseau. « Rousseau brisa avec la force d’un Hercule les lourdes chaînes de l’esprit humain » écrit-il en 1826.
Johann et Anna Pestalozzi
Ne cherchez pas qui était Mouffetard… le nom proviendrait d’un lieu-dit jadis dénommé Mont Cétard. J’ai eu bien du mal à en trouver trace, de ce « Mont »…
« Nous ne reproduirons pas ici toutes les opinions de nos écrivains qui semblent, en traçant l’origine de l’église Saint-Marcel, avoir pris à tâche de se contredire. Il est certain cependant que saint Marcellus ou Marcel, évêque de Paris, fut enterré vers l’an 436 dans cet endroit, sur une éminence appelée Mons Cetardus (Mont-Cétard), depuis, par altération, Mouffetard. Le tombeau de l’évêque, bientôt illustré par des miracles, attirait un grand concours de fidèles qui construisirent autour du mausolée, des habitations qui peu à peu formèrent un bourg ou village que Grégoire de Tours appelle vicus Parisiensis civitatis. Sous nos rois de la première race, la tombe de saint Marcel avait disparu et sur son emplacement s’élevait un oratoire dédié au pieux évêque. Vers cette époque le bourg de Mont-Cétard avait change de nom et portait celui de Chambois. La petite rivière de Bièvre le séparait du bourg de Saint-Médard. Ce village de Chambois, dans les siècles suivants, eut sa juridiction particulière et fut même entouré de fossés.Dès le XIe siècle il portait le nom de Saint-Marcel, et s’accrut tellement par la suite qu’il fut considéré comme une ville. Les lettres-patentes de Charles VI, de l’année 1410, le désignent sous ce titre. Le roi, par ces lettres, confirme l’octroi par lui fait aux manants et habitants d’icelle ville de Saint-Marcel, d’un marché chaque semaine et de deux foires par an. Au XVe siècle, la capitale avait déjà absorbe plusieurs villages environnants et atteignait la petite ville de Saint-Marcel. Envahie bientôt par cette marée montante, elle perdit ses privilèges et devint faubourg de Paris. L’église Saint-Marcel avait été détruite par les Normands ; elle fut reconstruite au milieu de XIe siècle ainsi que le prouvent certaines parties de l’édifice, notamment les chapiteaux déposés aujourd’hui dans une des cours du palais des Beaux-Arts. » (source)
Impossible d’en savoir plus sur le net, mais j’ai trouvé la source de l’histoire : une publication de 1815 (page 312), que vous pourrez lire en ligne : Histoire civile, physique et morale de Paris (rien que ça!!!). Par J.-A. Dulaure, volume 1.
Reste l’Epée de Bois, qui n’est pas suspendue sur vos têtes, mais qui a donné son nom à un cinéma que vous connaissez peut-être – et à un théâtre mais à ne pas chercher dans celle-ci… voir la Cartoucherie! Son nom serait lié à une ancienne enseigne, et aurait détrôné la dénomination précédente : rue du Petit-Champ. Si vous voulez en savoir plus, plongez page 202 dans le Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris, par Lazare, en ligne ici.
Mais revenons à aujourd’hui – ou plutôt à hier, au moment où j’écris ces lignes – pour sourire aux jeux de mots, plus ou moins bons, présents dans les enseignes.
On ne file pas la laine, ce sont les toiles qui filent…
Et si c’étaient des objectifs? ou des objections?
Certaines vitrines m’interpellent. C’est le cas de celle-ci, que l’on pourrait dénommer « Chat-rentaises »…
L’architecture est un peu tristounette, dans certaines zones, car des immeubles sans intérêt esthétique (en tout cas pour moi) ont remplacé les anciennes demeures. Quand ils ne les ont pas « sur-montées »!
Jolie vue…
… mais il ne faut pas lever le nez!
Les librairies survivent, dans ce quartier de la Contrescarpe. J’ai discuté avec la patronne de celle que je préfère, l’Arbre du Voyageur. Elle me dit « tenir le coup », mais impactée surtout par la limitation horaire à 18h, car c’est le soir qu’elle avait le plus de client-e-s. Heureusement, elle en a de fidèles, comme moi, qui ont modifié leurs habitudes pour continuer à fréquenter ce petit coin de paradis. En ce moment, clin d’oeil à deux de mes amis dont je parlais hier, tous deux fans de la culture nipponne, une vitrine consacrée à sa littérature.
L’Arbre du Voyageur
La littérature résiste aux lieux d’alimentation (épiceries, supermarchés, fastfoods, boutique de « fooding » en tout genre, et heureusement encore quelques vrais restaurants), et survit par les librairies, les lieux de culture (s’ils survivent à la fermeture prolongée!) et les plaques rappelant la mémoire des écrivain-e-s qui y ont vécu.
Hemingway
James Joyce et Valery Larbaud
J’ai beaucoup aimé le quasi vis-à-vis de l’Ancien et du Moderne-rappelant-l’Ancien, en haut de la rue du Cardinal Lemoine.
Ses propriétaires ne manquent pas d’humour, et je vous conseille d’aller voir leur site.
« Tripot Littéraire & Artistique, Bar Cabaret, Estaminet, Dicentrarchus labrax, Cambuse, Lupanar, fondé le mercredi 2e aoust 1589, à deux heures après minuit à Paris », selon le site de ce lieu.
Et inutile de vous dire que j’ai apprécié leur annonce liée à la situation.
Le gouvernement a décidé de fermer les bars et restaurants jusqu'au 20 janvier dans le cadre de l'Etat d'urgence. Le Conseil d’État a conclu, s’appuyant sur une étude scientifique, que les restaurants et bars (comme les hôtels et les salles de sport) présentaient un risque significativement plus élevé de transmission du virus que les autres lieux de brassage de population, commerces notamment.
Lamentations 3:26 Il est bon d'attendre en silence Le secours de l'Éternel.
La Place de la Contrescarpe reste une bulle de vie, malgré tout. Si les établissements historiques, comme le Café Delmas et son voisin d’en face, sont fermés, les autres sont restés ouverts et offrent toutes sortes de breuvage et de nourriture aux jeunes qui les dégustent… assis à même le sol ou sur les bancs, debout, marchant, sur cette place qui est restée bien vivante. J’aurais aimé filmer, mais pour cause de droit à l’image… vous vous contenterez de mon témoignage.
Pour finir, une photo qui, je vous le souhaite, vous permettra de garder le sourire…
En cette semaine d’anniversaire, j’ai eu l’occasion de découvrir quelques cafés, et de revenir à quelques-uns de mes préférés… Une invitation à vous y rendre, quand vous serez dans ces quartiers de Paris…
… à l’Ebouillanté
6 rue des Barres, dans le 4ème
Un de mes « repaires » dès les premiers beaux jours, que l’Ebouillanté, cet endroit tranquille entre Seine et Marais. Cet ancien atelier d’artiste – il appartenait au peintre François Gall qui le transforma en lieu de rencontres et échanges voici un peu plus de 40 ans – offre un abri à la fois serein et chaleureux.
Un petit mot d’abord sur l’environnement… La rue n’est pas longue, mais on peut y admirer entre autres une belle maison à colombages, à l’angle de la Rue du Grenier sur l’Eau… Que de noms évocateurs du passé, et de l’importance qu’a joué l’eau dans l’histoire de la ville, si l’on sait que la rue en question permettait aux potiers, nombreux dans ce quartier au Moyen-Âge, un approvisionnement en eau et en bois pour leurs fours « des Barres » est le raccourci de « Moulin des Barres ».
La rue, enserrée entre quais de Seine et rue de Rivoli, offre un havre de paix surprenant et bien tentant entre deux occupations… Reste à trouver une place en terrasse de ce café, qui est assez fréquenté. Mais quand on y arrive, quel bonheur de siroter des boissons aussi exotique que le bissap.
Pour ma part, j’aime particulièrement ce qu’ils dénomment « citronnade », que je consomme chaude durant les jours hivernaux et froide lorsque la chaleur revient…
Citronnade de l’Ebouillanté Version hiver
Une boisson à base de citron, mais riche aussi en gingembre et menthe… Un régal!
… à la Brasserie La Contrescarpe
Un véritable refuge par les froides journées d’hiver, et l’occasion, en été, de profiter de la joyeuse vie de la petite place de la Contrescarpe. Bon, le personnel est digne d’une brasserie parisienne, ne vous attendez donc pas à un accueil chaleureux. Mais les fauteuils de cuir dans cette ambiance « bibliothèque anglaise » vous le feront oublier.
Canapés et fauteuils confortables pour confidences entre ami-e-s
La Contrescarpe offre aussi un jardin intérieur, et de nombreux recoins où discuter tranquillement. Vous ne pourrez pas la rater : elle fait face au Café Delmas (dont je vous parlerai sans doute un jour, mais il est actuellement fermé pour rénovation) sur la place.
Un Mojito délicieux !
Et, pour faire une étude comparative des Mojito
(saviez-vous que ce nom est une contraction de l’espagnol, signifiant
« légèrement mouillée?) servis dans les bars français, je peux vous
assurer que, dans leurs bons jours (hélas pas toujours…), c’est l’un
des meilleurs…