Le livre des solutions

Voilà longtemps que je n’étais pas allée au cinéma, avant cette froide semaine de janvier. Et maintenant trois films à la suite! Après la campagne, encore la campagne. Mais, cette fois, la campagne-refuge, dans les Cévennes, pour un réalisateur hors-normes qui veut (doit???) fuir les studios parisiens.

Et hors-normalité.

Je ne vais pas vous en dire plus, car je ne m’attendais pas du tout à ce genre de film quand je suis partie le voir, sur la gentille invitation d’une jeune femme qui signalait, sur le site OVS, que le cinéma UGC Montparnasse proposait de revoir les films que l’on avait « ratés » dernièrement, pour la modique somme de 5 euros. Une excellente initiative. Pas seulement pour le montant de l’entrée, mais surtout parce que je suis LA spécialiste du « trop tard », pour aller voir les films que je souhaite découvrir. Du printemps à l’automne, parce que je préfère profiter des belles journées et longues soirées. L’hiver, parce que je privilégie danse, concert, théâtre ou restaurant (de préférence au coin d’une cheminée, comme vous l’avez lu dernièrement)!.

Je ne vous dévoilerai donc pas davantage le scénario. Mais si vous voulez voir un film original à différents points de vue, aux acteurs convaincants (bien que le premier rôle soit un peu trop omniprésent à mon goût), au scénario inédit (à part une scène dont je me serais bien passée), et qui offre des moments inoubliables… Alors c’est celui qu’il faut aller voir.

Attendez-vous à être bousculé-e, voire dérangé-e… bref, un film qui est loin de détendre, distraire (même si certains membres du public ont beaucoup ri) et reposer… Il m’a poursuivie toute la nuit, et cela continue…

Deux films promouvant la vie à la campagne…

J’avais très envie de voir « 5 hectares », car un peu fan, je l’avoue, de Lambert Wilson… Un peu plus frileuse pour le « Bonnard » sur lequel certains critiques étaient très réservés. Néanmoins, grâce au mauvais temps de ces derniers jours, je suis allée voir les deux, et ne puis m’empêcher de vous en faire retour.

5 hectares

Si vous recherchez un film « intellectuel », puissant, savant, passez votre chemin. Si vous avez envie de vous détendre et que vous appréciez l’humour au deuxième, voire au troisième degré, filez vite le voir, il ne va sans doute pas rester longtemps sur les écrans…

Pourtant, que cela fait du bien de voir un tel film, aussi vivant, dynamique, optimiste, rafraîchissant! J’ai passé un excellent moment, loin de la fureur du monde. Et partagé l’amour du héros pour les tracteurs… et la campagne, peut-être un peu trop esthétisée (si j’ose ce néologisme?)…

Et une scène d’anthologie : celle qui montre l’homme hyper-policé foncer sur les douaniers et contrôleurs qui viennent poser problème aux fermiers travailleurs! Un moment inoubliable! Mais il en est d’autres plus calmes, voire romantiques… je vous laisse les découvrir…

Bonnard

Pierre et Marthe

J’apprécie le peintre, mais je crains toujours les « biopic », comme on dit maintenant, ces films qui retracent la vie ou une partie de la vie d’un être célèbre… d’où la frilosité dont je vous faisais part plus haut… La personne qui m’accompagnait pour cette séance hivernale n’avait, elle, guère envie de voir ce film, assez bien démoli par les critiques de l’émission Le Masque et la Plume. Mais à la sortie, le contentement était partagé, nous y avions trouvé notre compte, et passé un excellent moment en compagnie de Pierre et de Marthe. Car le héros du film n’est pas vraiment le peintre. C’est plutôt celle qui est devenue sa femme tard, très tard, au crépuscule de sa vie.

« Bon public », peut-être, comme disent d’aucun-e-s avec mépris de celles et ceux qui s’émeuvent devant un grand écran? Je ne sais. Mais le film ne se contente pas de nous faire revivre le passé, de nous faire voyager, des bords de Seine à ceux de la Méditerranée, de nous montrer les processus de création… Il nous fait vivre aussi intensément toutes sortes d’émotions, du rire aux larmes, de l’enthousiasme à la sidération…

A voir donc absolument, que vous aimiez ou non les oeuvres des Nabis…


Magnificat

Non, ce n’est pas de musique ni de choeur dont je vais vous parler aujourd’hui… Quoique la musique soit bien présente dans le film, mais davantage en écho au scenario et à ses fondements qu’en accompagnement de l’intrigue, contrairement à d’autres musiques de films. Film… le mot est lâché… car c’est du 7ème art dont il est question. L’affiche est elle-même riche de symboles, que je vous laisse découvrir.

« Mon âme exalte le Seigneur,
exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur !
Il s’est penché sur son humble servante ;
désormais, tous les âges me diront bienheureuse. »

Qui est « l’humble servante » dans cette oeuvre si forte? La Vierge, statue abîmée abritée par des lierres en une cache sylvestre, à qui l’adolescent confie le canif avec lequel il s’auto-mutilait ? Sara la Kali, que les Gitan-e-s honorent chaque année, le 24 mai, aux Saintes Maries de la Mer? La transgenre, dont le certificat de décès révèle qu’elle a pu devenir puis rester prêtre pendant des années et sur laquelle va enquêter la chancelière diocésaine? Cette dernière elle-même, dont on découvre progressivement le drame et la richesse de sa vie passée? La jeune diacre, qui s’épanouit dans l’exercice de ses fonctions… en attendant de pouvoir devenir prêtre? Autant d’avatars de la Femme placée devant les injonctions limite contradictoires de l’Eglise catholique…

Vous le voyez, le scénario est riche… un peu trop foisonnant peut-être, il aurait pu être « purifié » à mon sens. Mais un film étonnant, prenant, émouvant à plus d’un titre, qui questionne la place des femmes dans cette Eglise qui devrait être ouverte sur le monde et accueillir chacun-e en égalité… Rassurez-vous, ce n’est pas un plaidoyer. Mais l’intrication d’histoires personnelles qui entrent en résonances.

Bref, j’ai été totalement séduite. Et le jeu des acteurs et actrices est impressionnant. Berléand assume les contradictions de son personnage. La jeune Anaïde Roland-Manuel, alias Anaïde Rozam, est lumineuse. Le choix de cette actrice a-t-il été guidé par sa ressemblance avec l’une des héroïnes du film italien au titre similaire, sorti en 1993, qui porte, lui, sur le Moyen-Age?

Avouez qu’il y a une troublante ressemblance entre la novice du film italien, incarnée par Consuelo Ferrara, et la diacre du film français, non?

Les critiques n’ont pas été tendres avec ce film. Et certains de mes amis ont trouvé le jeu de Karin Viard inégal. Mais je n’ai pas honte de dire que j’ai apprécié. Pas pour le côté « féministe ». Il est surpassé par le côté « quête de spiritualité transculturelle, transgénérationnelle, trans… tout ce que vous voudrez »…Si vous ne craignez pas les salles obscures en ce début d’été, filez vite voir ce film, vous y trouverez beaucoup de Lumière(s)…

Un homme heureux

Qui est cet « homme » bienheureux? Le titre semble simple, mais, à la sortie du cinéma, on peut se poser la question…

J’avais hésité à aller voir ce film qui a été lancé à coup de grands campagnes médiatiques, et traite d’un sujet très à la mode. Dans un tel cas, je suis toujours méfiante.

Et si vous me demandez maintenant « faut-il aller le voir? », j’hésiterais…

Oui pour avoir osé aborder ce thème.

Oui pour la performance de Fabrice Lucchini, pour une fois pas trop cabotin et assez sobre (quoique…), et pour celle de Philippe Catherine, pas trop « humoriste, j’en fais beaucoup ».

Oui pour la satire de la vie « politique » dans une petite ville du Pas-de-Calais. Satire qui prend cependant au sérieux quelques-uns des problèmes de ses habitant-e-s, dont certain-e-s gagnent leur vie grâce aux emplois fournis par EDF, en travaillant à la centrale nucléaire de Graveliens qui a massacré un coin de leur magnifique côte.

Mais aussi film qui rappelle l’importance, pour la population locale, de se défouler chaque année au Carnaval de Dunkerque.

Et oui, bien sûr, pour les magnifiques photos de Montreuil-sur-Mer et de ses environs.

Un coin de France dont on parle peu et qu’on montre encore moins, à l’exception des natifs/ives. Pourtant si beau et si accueillant, comme je l’ai constaté à maintes reprises. Mais, si j’y suis allée et retournée, ce n’est pas de mon propre chef. C’est parce que des ami-e-s d’Aire-sur-la-Lys me l’ont fait découvrir. Vous ne connaissez pas non plus cette ville? C’est ce que je disais…

Point d’interrogation cependant pour l’interprétation de Catherine Frot, en contre-emploi, peu crédible à mon sens dans ce rôle difficile.

Non pour la manière dont l’entourage familial est présenté sous un angle très optimiste, avec des enfants idéaux notamment.

Idem pour les électeurs/trices qui tout à coup défendent une cause dont on sait que, « in the real Life », elle ne le serait pas. Un peu trop « eau de rose »…

Je sais, je ne vous ai pas dit grand’chose du film. Mais c’est volontaire. Il faut le découvrir par vous-même, si la question de la « transition » et de son lourd processus vous intéresse. Et si vous voulez voir un (tout) petit bout des Hauts-de-France, en passant par tout le spectre des émotions…

Une belle course

Envie de me distraire… Pourquoi pas un petit ciné en cette fin de semaine ? Un de ces films dont on a un peu honte de les avoir vus, vous voyez le genre? Un Dany Boon / Line Renaud, par exemple… Pas intello pour deux sous, qualité esthétique non avérée, scénario simplissime, etc. Mais j’avais besoin de rire un peu, de choses simplissimes, justement.

Erreur grave! J’aurais mieux fait de regarder avant quelques critiques. Car tout y est de ce que je viens de dire… sauf le rire… Enfin, pas jaune…

Mélodramatique à souhait, scénario convenu comme ce n’est pas imaginable, avec la fin attendue… Et même des invraisemblances dans les parcours au sein des voies parisiennes, qu’elles soient ou non sur berges… Tournage d’ailleurs fait sans mettre une roue de la voiture dans lesdites voies…

« Un dispositif totalement immersif. « Nous avons installé des écrans 4K avec une définition de dingue en forme de “L” autour du taxi en studio, sur lesquels nous avons diffusé pendant le tournage tout le trajet qu’emprunte le taxi. Trajet que nous avions filmé avant sous tous les angles et tous les axes grâce à un camion plateforme avec de multiples caméras… Cela concerne même le ciel car nous avions un autre écran, celui-là face au véhicule, qui nous ramenait de la lumière sur le pare-brise et ramenait de la vie à l’intérieur de l’habitacle…« , explique le réalisateur. » (source)

Et qui plus est, une déprime assurée à la sortie, si on est un peu fragilisé par des deuils récents ou des maladies rampantes!

Vous l’aurez compris, je ne vous encourage pas vraiment à aller voir ce film, qui recèle tout ce que l’on peut craindre ou fuir… Sauf les beaux yeux bleus de l’actrice… Le comble de la coquetterie : elle a deux ans de plus (94 vs 92) que le personnage qu’elle incarne!

Archipop

Non, ne craignez rien, je suis et reste profondément laïque, et ne ferai donc pas de prosélytisme religieux ! Donc je ne parlerai pas ici de la hiérarchie orthodoxe : il faut décomposer, certes, en « archi » et « pop », mais pour « archives » et « populaires ».

Ancien logo : depuis, ce n’est plus « Picardie », mais « Hauts-de-France »!

« Archipop est une association régionale qui a pour mission de collecter, sauvegarder, conserver et valoriser les archives cinématographiques et audiovisuelles sur les Hauts de France.« 

J’ai découvert en ce dimanche à l’aube un site qui collecte des archives, et en particulier des archives familiales.

« Archipop rassemble aujourd’hui plus de 1 403 heures de films issues de plus de 609 collections soit plus de 7 679 bobines sauvegardées.

Archipop fonctionne principalement grâce à :

  • des dépôts spontanés
  • des projets mis en place sur un territoire donné et co-financés par les collectivités et les institutions
  • des collectes thématiques ciblées et à notre initiative. »

On y trouve donc un peu de tout. C’est parfois drôle, parfois ennuyeux, parfois émouvant… Mais ça « parle ». Les films notamment parlent de la vie d’autrefois, souvent en occultant les aspects laborieux et difficiles. Mais ils permettent d’imaginer les moments forts vécus par nos aïeux.

J’ai trouvé ce matin, par exemple, un film sur une fête que je connais et que j’ai moi-même filmée l’an dernier. La fête de Jeanne d’Arc au Crotoy. Il y avait dix fois plus de participant-e-s que maintenant! Autant dans le défilé lui-même que dans la foule.

Statue de Jeanne d’Arc au Crotoy

On y constate par contre le peu de différences entre la vie des enfants en 1935 et celle d’aujourd’hui, si l’on excepte les tenues, comme dans ce film familial tourné à Mers-les-Bains, une station qui m’est chère.

C’est aussi l’occasion de découvrir ce qui étonnait, surprenait, dans l’actualité, comme dans ce film de 1937 sur les conséquences des perturbations météorologiques à Montreuil sur Mer.

On y trouve des petits bijoux, comme ce film étonnant et très émouvant autour de la seconde guerre mondiale et de l’évacuation, qui en dit plus que tous les livres d’histoire…

Je ne sais pas s’il s’agit de la même famille, mais en recherchant des informations sur son auteur, Paul Bertrand, je suis arrivée à ce site qui ouvre sur les archives et la généalogie d’une famille…

Une belle découverte, donc, qu’Archipop, et une excellente idée, que de préserver toutes ces « petites » archives qui valent bien les grandes! Et, pour occuper les enfants, des jeux… Si vous connaissez un équivalent pour une autre région, n’hésitez pas, parlez-en!

En allant vers le Luxembourg… la rue Champollion

Passer devant la Sorbonne ne se fait jamais sans une bonne dose de nostalgie… De même devant le Champo, qui permettait à l’étudiante que j’étais de retrouver les cinéastes d’antan. Les films à l’affiche sont toujours aussi tentants ! Et, en écrivant cet article, je viens de découvrir qu’il était classé monument historique depuis 2000… Si l’histoire des cinémas du quartier latin vous intéresse, en voici une présentation.

Vous l’avez deviné, nous allons donc quitter la rue des Ecoles pour prendre la rue Champollion. J’aime beaucoup cette petite rue, même si elle a perdu dernièrement quelques-uns des lieux pleins de charme qui la rendaient si attirante. Notamment une de ces librairies où l’on a du mal à trouver l’hôte tant il est perdu entre les rangées et piles de livres tous plus anciens et intéressants les uns que les autres. J’aimais beaucoup aller le voir et l’entendre parler de ses trésors. Hélas, comme la plupart des librairies de ce quartier, son antre aux trésors a disparu… J’ai trouvé un blog sur ce thème, Le cercle des librairies disparues

Mais il subsiste les cinémas… Après le Champo, c’est le Reflet Médicis, dont les affiches sont une invitation au voyage dans le cinéma d’art et d’essai.. Le Quartier Latin a changé d’enseigne (et de son cachet), et est devenu La Filmothèque du Quartier Latin. Mais il propose toujours des versions restaurées des films anciens, et, une fois par mois, des « leçons de cinéma », analyse par un-e expert-e d’un film après la projection de celui-ci.

Je n’ai pas cité les cinémas sis plus haut… C’est une spécificité de cette petite rue que de concentrer un si grand nombre de cinémas… Autre originalité, ses murs regorgent « d’oeuvres » éphémères, tout au moins quant à leur support. En voici un petit florilège…