Quatre acteurs, une actrice… Un beau délire !

En quête d’évasion à la suite de difficultés professionnelles et de mauvaises nouvelles concernant la santé d’amis, je décidai que rien ne valait une bonne comédie. Quand je dis « bonne », je ne parle pas de la qualité de l’écriture, mais de son impact sur le public : une comédie qui fasse vraiment rire. Un délire, quoi! Et je fus servie… Mon choix, un peu à l’aveugle au départ, mais ensuite étayé par des commentaires en ligne, s’est porté sur une pièce qui se joue actuellement au Théâtre Gaîté Rive Gauche à Montparnasse. « Mission Florimont ». Peut-être attirée par l’affiche, car Florimond « Long Minton » est le « Géant » de Doullens, dans la Somme.

Oui, c’est comme les Dupont/d, l’un avec un t, l’autre avec un d… Comme Florimond Robertet, fort apprécié de Charles Quint

« Ce personnage a marqué l’Histoire de France. Jugez plutôt : il a servi pas moins de trois souverains, Charles VIII, Louis XII et François Ier, remplissant pour eux les plus hautes fonctions comme les missions les plus sensibles (…) ’activité de ce bourreau de travail fut surtout diplomatique et ses interventions revêtent très souvent un caractère dramatique, voire romanesque. (…) Charles Quint le considérait comme le seul interlocuteur valable. » (source Historia)

La pièce ne le met pas en scène, mais il y a des liens… à commencer par Charles Quint. Drôlatique à souhait, son interprétation : l’acteur adopte tour à tour les accents slave, allemand, italien, espagnol, pour évoquer l’aspect international de son pouvoir. Charles Quint qui tente d’intercepter, avec l’aide d’un policier digne des plus noirs polars humoristiques, le dénommé Florimond, bâtard de La Courneuve. Lequel lui a confié trois graines qui permettent de se sauver des situations les plus difficiles.

Je ne vais pas vous narrer l’intrigue, car mieux vaut la découvrir. Quant à l’humour, il utilise toutes les gammes possibles… Et même moi qui n’aime pas trop les gauloiseries ni le burlesque, je dois reconnaître que je me suis amusée tout au long du spectacle. Même si je n’ai pas compris toutes les références, extrêmement nombreuses et empruntées à toutes sortes de contexte, y compris la chanson contemporaine! Le tout pour une histoire censée se dérouler entre François Premier, Charles Quint et Soliman le Magnifique, et qui nous entraîne à travers l’Europe et la Turquie. Et l’exploitation des anachronismes permet de jouer les Voltaire, en attaquant les politiques de notre époque.
A aller voir absolument pour une cure de rire! Et bravo aux acteurs et à l’actrice qui, à 5, jouent d’innombrables rôles… Le site du théâtre annonce 30 personnages, mais l’un des acteurs en interprète seul, par jeux de mimiques, une trentaine à la fois!!!

Peut-on rire de tout ?

Vaste question, n’est-ce pas? Mais la pièce vue hier soir m’a poussée à me la poser à nouveau.

Car je dois avouer que, comme la grande majorité du public dans la salle du Théâtre Fontaine, j’ai beaucoup ri à certains moments. Le dialogue est amusant. Une vraie comédie de boulevard. Mais le sujet l’est moins, surtout pour quelqu’un comme moi, qui ai connu la vie de l’Allemagne dite de l’Est sous l’autorité soviétique, qui ai partagé les craintes de mes amis allemands, et ai pu voir les conséquences horribles de la répression permanente.

Car la pièce met en scène cette période sombre qui a précédé la chute du mur de Berlin. Période où nombre d’habitants de la RDA ne pensaient qu’à fuir de l’autre côté, en se faisant une image un peu trop idyllique de ce qui se passait à l’ouest… Et certains des personnages illustrent les fanatiques du régime, voire les tortionnaires de la STASI.

Un des films projetés durant la séance, évoquant le Berlin de l’époque (source)

Alors, me direz-vous, pourquoi tant de rires?

Car certaines répliques y poussent, et, au comique de mots, s’ajoute celui des situations. Le jeu exagéré de certains acteurs, et surtout de l’actrice principale, m’a certes gênée, mais il faut dire que je me suis bien amusée. Tout au moins pendant la première moitié de la pièce. Pendant la seconde, j’étais partagée entre rires et horreur, tant remontaient des souvenirs noirs…

A la sortie, avis partagés. Le public a ovationné les acteurs. Certes, ils et elles se sont littéralement démené-e-s pour maintenir un rythme effréné tout du long. Et la mise en scène, avec « irruption » (je choisis volontairement ce mot, tant on s’y attend peu) de films et animations, est assez originale.

Mais la question demeure : peut-on rire de tout? Comment la pièce parle-t-elle aux générations pour qui cette période relève désormais de l’histoire?

La voûte étoilée du théâtre évoque une autre Dimension…

Ne restons pas sur une note trop sombre. Car, à la sortie, j’ai ri à nouveau en découvrant la décoration du théâtre…

Quand le théâtre se joue de lui-même

Quelle pièce aller voir une fin de semaine, quand les autres partent en week-end ou en vacances et que l’on reste à Paris? Une idée me vient en consultant le web : les Faux British ! Je ne l’ai pas encore vue, mais, quand j’en parle, on me dit qu’elle est tellement bonne qu’on irait bien la revoir…

Direction donc les beaux quartiers, où je trouve heureusement une place non loin de la Comédie des Champs-Elysées. A la limite… Quelle idée d’avoir ainsi avancé les heures de spectacles! Maintenant, on se trouve placé-e devant un choix cornélien : dîner ou « spectater »… Combien de salles se trouvent moins fréquentées à cause de cela? Car d’aucun-e-s .ne peuvent se passer de repas. Ce n’est pas mon cas, et j’arrive donc à l’heure sans avoir mangé… enfin, pas depuis 5 heures, ce qui reste supportable, n’est-ce pas?

J’adore l’ascenseur gigantesque de ce théâtre, avec son liftier, à qui je n’ai pas osé demandé pourquoi il n’était pas vêtu comme Spirou. Ce qui aurait été très seyant, car il est mignon comme tout. Et très aimable, ce qui ne gâche rien. Impossible de le photographier, car il est pris d’assaut… Mais quelques vues (pas très bonnes) du théâtre, dont je vous ai déjà parlé sur ce blog, voici bien longtemps…

Plusieurs surprises à l’arrivée au théâtre, mais je ne vous en dirai rien. Je vous laisse les découvrir, si vous allez voir ce spectacle, ce que je vous recommande chaudement. De quoi oublier tous les tracas du quotidien!

Car j’ai passé une heure trente à rire, rire, rire. Voilà qui fait du bien! Et à admirer des acteurs et actrices qui jouent le rôle des pires interprètes possibles. A cela s’ajoutent tous les gags liés à la mise en scène et aux décors, sans compter les textes dits de toutes les manières possibles…

Bref, un excellent moment dans cette belle salle ancienne, où seuls les genoux se plaignent…

Les artistes offrent toute une gamme de « jeux » tout aussi réjouissants les uns que les autres, flirtant parfois avec le burlesque sans vraiment y tomber.

J’ai un peu regretté la trop grande place accordée à l’un d’entre eux, visiblement tout aussi danseur que comédien. Car cela s’est fait au détriment d’autres, beaucoup plus subtils…

Je vous laisse comparer l’état du décor : avant / après… cela vous donnera peut-être une idée du spectacle?

Le public, hélas très peu nombreux (j’ai été « surclassée »!), ne cessait d’applaudir, et il a fallu couper court aux innombrables rappels.

Un spectacle « décoiffant » à Bobino

Un jour de grève à Paris… L’injonction de télétravailler… Avez-vous déjà passé 7 heures devant un écran, à essayer de faire appréhender les joies de la rédaction à des personnes dont le rapport à l’écrit est historiquement difficile? Si oui, vous comprendrez l’envie irrésistible de se « distraire », au sens premier du terme (pas au sens pascalien, la surcharge cognitive était trop forte!). Un film? déjà allée au cinéma cette semaine. Une pièce? Pas sûr qu’elle se joue. La nocturne du Musée Branly pour l’exposition « kimono »? Annulée pour cause de grève. Reste la musique… pas trop loin, et surtout au sud de la ville, car on oublie l’idée de traverser l’axe République – Nation en ce soir de défilé. Or voici longtemps que j’ai envie de voir « Opéra locos », à Bobino. Et justement, c’est à 19h, donc pas trop tard entre deux journées de labeur. Un appel pour vérifier la non-annulation, et je file. En voiture, bien sûr : pas question de perdre du temps dans l’attente d’improbables transports en commun.

Peu de monde dans la salle. Ce qui entraîne, à la demande des placeuses, une migration généralisée à quelques minutes du début. Chacun-e peut ainsi migrer à son gré (joli, non? je ne rajouterai pas « et changer de degré », faut pas exagérer!). Aussi, avec une place bon marché, me suis-je retrouvée très bien placée, suffisamment en hauteur pour ne pas être gênée par le chignon de la dame de devant, et avec un large espace pour déployer mes gambettes lourdes d’avoir supporté la position assise autant d’heures.

J’ai passé un moment de détente extraordinaire et de plaisir joyeux, partagé avec une salle en délire. Un spectacle à recommander à toute personne peu empreinte à aller à l’Opéra ou l’Opéra Comique.

Lui, c’est le ténor. Méconnaissable dans son costume qui le rend difforme, et avec son maquillage outré…

Deux chanteuses et trois chanteurs aux voix de qualité, aux tessitures variées. Pour certain-e-s, une amplitude admirable. Notamment l’un des chanteurs, qui se joue du genre. Cinq personnes qui chantent, mais aussi jouent et dansent avec un rythme endiablé. Un burlesque un peu trop forcé, peut-être parfois. Mais j’ai beaucoup ri. J’étais par moments littéralement « pliée en deux », notamment par le décalage entre les paroles et le jeu scénique, alors que l’air était brillamment interprété.

Le spectacle, soudain, devient interactif. Et la salle chante, interprétant les airs les plus connus : Rigoletto, la Traviata… Un spectateur se retrouve même sur scène. Car, pour constituer 3 couples, il faut 6 personnes. Qu’à cela ne tienne, on va prendre la sixième dans la salle! Et tout se termine avec des spectateurs/trices chantant debout et claquant des mains dans une ambiance chaleureuse. Exactement ce qu’il me fallait après cette journée d’interactions médiées par un écran! Que vous dire de plus? Allez-y, cela vous apportera du soleil en ce triste hiver! Je n’ai pas trouvé d’extrait avec les cinq actuel-le-s, il y a visiblement eu changement côté « femmes », mais vous aurez quand même une (toute petite) idée en regardant ceci.

Le jeu d’Anatole

Le Lucernaire propose souvent des spectacles intéressants, originaux, voire drôles. C’est le cas en ce moment, avec ce que je ne sais comment la désigner, la « pièce » intitulée « Le jeu d’Anatole ou Les Manèges de l’Amour ».

Imaginez une scène exigüe, sur laquelle trois à quatre personnages tiennent à peine ensemble.

Et une mise en scène permettant de la transformer en salon, en restaurant, en salle de spectacle, et en belvédère… Une vraie gageure, un pari réussi pour le metteur en scène, Hervé Lewandowski.

Anatole est le stéréotype de l’homme assoiffé de conquêtes. Il se heurte, durant sa vie, à d’autres stéréotypes, de femmes, cette fois. Femmes diverses, tant par la condition sociale que par le style et par le caractère, par les choix de vie aussi. De la « cocotte » pseudo-artiste à la femme bourgeoise, elles se succèdent dans sa vie – et dans son lit – sans qu’il parvienne à les comprendre. Pour les interpréter, une seule actrice.

Mélodie Molinaro est surprenante, inattendue, enjouée, terriblement vivante, et impressionnante dans les diverses facettes de « la femme idéale », qui sont ainsi représentées successivement, jusqu’au dénouement inattendu. Elle chante, danse, virevolte, mais aussi pense, joue et se joue de l’Homme, et émeut…

L’ami fidèle, qui observe, commente, enregistre les méandres des amours d’Anatole, est interprété par Yann Sebile, terriblement séduisant avec sa redingote et son chapeau haut-de-forme…

Quant au troisième homme, il change de costume, de rôle, de ton, tout au long de la pièce, dans une succession incroyable de « seconds rôles ». Tous les personnes incarnés par Guillaume Sorel contribuent à « créer le décor », rendre compte de l’époque et du lieu… et faire rire les spectateurs/trices…

Enfin, proche de la scène, un acteur « invisible » mais pourtant très présent : le pianiste, qui est parfois « convoqué » par les autres, comme un des personnages. Son jeu permet d’évoquer les époques, par des interprétations situées de la musique d’Offenbach, qui accompagne les chansons ou devient fond sonore.

Car la musique est omniprésente et nous entraîne ailleurs, encore ailleurs, dans l’espace comme dans le temps.

Bref, vous l’avez compris, j’ai aimé ce spectacle, qui fait voyager, chantonner, danser sur son siège, et qui fait rire tout en étant au final très profond…

Pour en découvrir davantage, vous pouvez regarder ceci. Mais je vous le déconseille si vous envisagez d’aller voir la pièce… Mieux vaut se laisser surprendre, non?

Suite de la série « Reflets »

Il y a un peu plus d’une semaine, j’avais pris cette photographie sur la vitre d’un restaurant que je fréquente souvent, en bord de mer… Je ne résiste pas au plaisir de vous la transmettre, comme un clin d’oeil encourageant… Vu son peu d’intérêt « artistique », je ne l’avais pas publiée… Vous comprendrez aisément pourquoi je le fais aujourd’hui !

Science fiction
(mi-octobre 2020)