« Cette œuvre m’a demandé quatre ans d’un travail exclusif et assidu, et elle est le résultat de toute ma vie active. Je la considère malgré toutes ses imperfections comme mon chef-d’œuvre. »
Ainsi Henri Matisse parlait-il de la Chapelle du Rosaire, à qui il consacra effectivement les années 1947 à 1951 (trois ans avant son décès). J’ai déjà vu maintes fois ce monument, mais je le revois toujours avec plaisir, comme à chaque fois que je le fais découvrir à d’autres. Pourtant, je ne suis pas une « fan » de cet artiste, même s’il est né dans une ville proche de mon lieu de naissance, et même si j’admire son oeuvre. Mais ce lieu aux lignes et aux décors épurés appelle profondément à la spiritualité, quelle qu’elle soit.
Venez avec moi, entrez…

Avançons jusqu’à l’autel… Matisse a conçu chaque objet, depuis le crucifix qui orne cet autel jusqu’à la nappe sacerdotale, brodée de poissons (regardez bien, vous en verrez 3 sur le pan visible sur la deuxième photo ci-dessous).


Un livre est ouvert à la date du jour… le texte fait écho à l’actualité : « Va d’abord te réconcilier avec ton frère… Mets-toi vite d’accord avec ton adversaire… »

La lumière filtrant à travers les vitraux de la façade sud se reflète dans les céramiques peintes de celle du nord, alors que le panneau du fond reste contrasté noir / blanc.





Si j’avais déjà vu la chapelle, je n’avais, par contre, jamais visité l’exposition qui relate sa conception. Elle est particulièrement intéressante, car présente des plans, des dessins, mais aussi des photos qui nous montrent les diverses phases de l’élaboration.
Hélène Adant (Hélène Mossoloff) a ainsi pris des clichés de l’artiste en pleine création. Pour information, cette photographe d’origine russe était la cousine de Lydia Delectorskaïa, qui fut le modèle et l’assistant de Matisse de 1926 à sa mort, sa dernière muse. Si vous voulez en savoir plus sur l’auteure des photos, voici quelques liens : ici et là…
On découvre qu’il y avait dans sa demeure une maquette de la chapelle, d’une taille lui permettant de créer in situ l’ensemble des vitraux et décors.

On le voit en train de concevoir le Christ qui orne l’autel.



On ressent une irrépressible émotion en lisant les extraits de missives manuscrites, comme celle-ci, qui questionne la préparation de la nappe ornée de poissons.
On le « voit » demander conseil aux religieux et religieuses qui lui apportent leurs lumières, comme ici pour les poissons, ou plus bas pour la conception du confessionnal.




Une photo le montre, peignant une esquisse en « grandeur réelle ».

























« J’avais 24-25 ans lorsque je l’ai écrit. Le thème de l’oiseau figure souvent dans nos vieux recueils de chants. Il m’avait semblé que l’on pouvait l’assimiler à l’image de la liberté. Ici apparaît le dilemme de la liberté de la personne proche que l’on souhaite posséder. Mais la liberté de ces personnes existe… il faut choisir . Ou vous attachez la personne et vous la possédez comme un oiseau en cage, ou vous aimez la personne telle qu’elle est, et alors, si elle souhaite partir, vous devez la laisser partir. C’est pour cela que je n’ai jamais possédé d’oiseau en cage. Je leur jette du pain par la fenêtre et s’ils viennent se nourrir, je les observe et je me contente de cette contemplation. Parce que c’est comme cela que je veux que les oiseaux soient… »






