Sous le charme de Sospel. Episode 4.

Promis, c’est l’avant-dernier épisode de cette découverte de Sospel. Je vous emmène dans les rues et ruelles de la vieille ville… Pour que vous compreniez mieux, je replace le plan déjà présenté.

Nous avions commencé la partie surlignée en noir, depuis la Place de la Cabraïa jusqu’à l’arrière de la co-cathédrale Saint Michel. Poursuivons donc cette boucle noire. Suivez la guide, un peu fantaisiste certes, puisqu’elle passe sans vergogne de l’Histoire à des détails sans importance autre que celle de l’avoir intéressée, amusée ou intriguée…

A gauche, on voit un des restes des remparts qui ceinturaient la ville autrefois. Laquelle n’était accessible que par cinq portes.

Et maintenant, une petite série sans commentaires…

Pourquoi cette photo ci-dessus? Vous le devinez : je n’ai pu m’empêcher de me demander ce qu’était « La Martiale »! Eh bien, j’ai trouvé, après quelques difficultés, sur le site dont je vous ai déjà parlé. Un article très fourni porte sur les groupes musicaux à Sospel. Incroyables, leur nombre et leur variété! Je commençais à désespérer de trouver « La Martiale », lorsque j’arrivai à ceci :

Et voilà, le mystère de cette plaque, apposée là je ne sais pourquoi (ce serait à rechercher, mais je ne vais pas me ni vous fatiguer davantage!) est résolu. Et nous sommes revenus au point de départ, pour entamer la boucle rouge dans l’article suivant.

Mozart chez les Bernardins

La relation qu’entretenait Mozart avec la religion m’a souvent questionnée. D’où ma surprise lorsque j’ai découvert ce tout nouveau spectacle « immersif » proposé à Paris depuis hier…

Autre surprise : pas de problème pour obtenir une place au tout dernier moment! Et quand je dis « tout dernier »… Il était 16h20 pour une entrée à… 16h20! Car il faut retenir, pour pénétrer dans les lieux, et les flux se font toutes les 20 minutes. Le prix me paraissait assez élevé (32 euros), mais en cet après-midi où toute randonnée était exclue et tout déplacement rendu difficile par la chaleur, on ne comptait pas! Un petit café à l’ombre, avant de gagner le Collège et pour éviter la queue au soleil…

Un petit groupe d’heureux/ses élu-e-s participa donc avec moi à ce qui tient à la fois de la visite des lieux (que je n’avais jamais pu faire car les expositions et concerts déjà vus ici se tenaient au rez-de-chaussée), visite théâtralisée, de mini-concerts avec projections, de ballets, le tout impliquant au maximum le public, jusqu’à lui faire danser le menuet… Inutile de vous dire combien le rythme est soutenu pour que tout puisse se faire en 1h20.

Dès l’entrée, le petit groupe est happé par la musique et la narration…

Mais il est très vite entraîné par un joyeux Papageno vers la Flûte enchantée, où Mozart révèle son appartenance à la Franc-Maçonnerie.

Le grand réfectoire s’anime, s’illumine, prend des couleurs… et c’est ensuite le Mariage de Figaro, où Mozart reprend les critiques de Beaumarchais contre le droit de cuissage.

Papagayo nous entraîne ensuite vers le jardin, puis l’escalier menant au sous-sol. Dont je découvris donc alors avec beaucoup d’intérêt les différentes salles, servant jadis pour la plupart de cellier. Dans chacune, un accueil chaleureux, et une nouvelle oeuvre.

Loin de moi l’idée de vous en faire une présentation exhaustive. Juste trois moments forts… L’un assez ludique : deux personnes du public furent désignés comme chef-fe-s d’orchestre, devant assurer le tempo de deux symphonies sous l’oeil averti de leur hôte.

Le deuxième, magnifiquement esthétique : un mini-ballet de Mourad Merzouki sur La Petite Musique de Nuit.

Les jeux de lumière répondent à la musique et à la danse, et la petite salle voûtée se transforme…

Ambiance totalement différente dans la salle suivante, où nous sommes invité-e-s à nous recueillir pour quelques minutes du Laudate dominum.

Et je dois avouer que les projections, ici, pour moi, étaient quelque peu perturbantes une écoute intimiste.

La visite du sous-sol se termine, et la remontée dévoile le magnifique escalier, ainsi présenté sur le site de la Région:

« Cet escalier à vide central est entièrement en stéréotomie. La rampe d’appui est composée d’arcades à enroulement reliées par des étriers. Elles se rattachent à une plate-bande inférieure et supérieure par des billes. Des rouleaux sont placés entre les arcades« .

Vous ne savez pas ce qu’est la stéréotomie? Je l’ignorais aussi, et me suis précipitée sur le site de la BNF pour en savoir plus. Cette « technique de découpage et d’assemblage des pierres » « suppose une connaissance approfondie de la géométrie ».

« À partir du 16e siècle, cette technique fait l’objet de nombreux traités exposant des schémas complexes exécutés avec règle, équerre et compas. Cet art du trait dépend aussi du savoir-faire du tailleur de pierre, qui débite et taille les blocs, du calepineur, qui transforme les dessins de l’architecte en plans d’exécution, et de l’appareilleur qui trace ces plans directement sur le chantier.« 

Jugez par vous-même!

Le résultat?

Mais revenons à Mozart… Nous voici invité-e-s à apprendre le menuet.

De beaux fous-rires, quand nous dûmes mettre des perruques, puis apprendre en quelques minutes toute une séquence de menuet!

Genrées, les perruques! Plutôt blanches pour les femmes (ci-dessus), et grises pour les hommes (ci-dessous).

Mais la fin approchait… Dans tous les sens du terme ! Car c’est un prélat qui nous accueillit pour la dernière étape, dans l’oratoire. Je ne vous parlerai pas (ici et maintenant) longuement de ces trois extraits du Requiem, dont le Lacrimosa qui m’émeut toujours autant. Et cette ultime séquence me bouleversa. Et, une fois encore, je regrettai les projections murales qui n’auraient pas perturbé autant l’écoute si elles étaient restées telles qu’à notre entrée dans les lieux.

Inutile de vous dire, à la suite de cette narration, combien je vous encourage, quelles que soient vos idéologies et quel que soient vos âges, à participer à cette aventure. Et vous ne regretterez pas, je pense, la somme versée pour y parvenir…

Mazette! Quelles belles découvertes!

« Mazette »… Un mot que je n’avais pas entendu depuis longtemps! Et savez-vous ce qu’il signifie, hormis en tant qu’exclamation exprimant l’étonnement ou l’admiration? Un « mauvais cheval ». On ne peut dire que ce soit très valorisant, comme terme… D’autant que, par extension, il prit ensuite le sens d’ « avorton », de « personne qui manque de force, d’adresse, (etc.).

« L’humiliation profonde d’un gros personnage qui s’est fait (…) clouer le bec par une mazette de bureaucrate (Courteline, Gaîtés esc., Sans chenil, 1897, I, pp.269-270). »

« Quand il est bien avec un type quelconque, il dit tout de suite, «c’est un grand monsieur», ou «c’est un grand bougre». Pas de milieu pour Joseph: d’un côté les canailles ou les mazettes, de l’autre, les «grands quelque chose» (Duhamel, Passion J. Pasquier, 1945, p.119). » (CNRTL)

C’est pourtant le nom qui a été choisi pour le lieu que j’ai découvert hier, accosté près du port de la Râpée. Je me promenais en bord de Seine, près de la Gare d’Austerlitz et de la Cité de la Mode, quand j’aperçus cette « péniche » (mais peut-elle se mouvoir??? il semble que ce soit plutôt une barge… mystère!) en raison des coloris vifs qui la distinguaient. Vite, traverser le pont et la trouver sur le quai. Beaucoup de monde, visiblement, et j’ai failli ne pas y monter. Mais, la curiosité aidant, je décidai d’aller la découvrir. Et j’ai bien fait! Un lieu étonnant, une grande mixité selon tous critères, un vrai « lieu de vie et de rencontres ». Une DragQueen se promenait sur le pont, distribuant des papiers. J’appris par la suite qu’il s’agissait d’un jeu.

Plus de place assise. Je demandai à une jeune femme si elle acceptait de partager sa table, et elle accepta avec un beau sourire… C’est ainsi que j’ai passé une très agréable et intéressante soirée avec Mélissa et Hajar, son amie d’enfance. Nous avons beaucoup échangé, beaucoup « voyagé », et beaucoup ri. Une soirée de rêve! Avec des cocktails délicieux, comme ce « Cactus » que j’ai vraiment apprécié, et des tacos végans qui méritent le détour. Le tout à des prix très raisonnables.

J’émettrai cependant une réserve, liée au fait qu’à 22h et quelques (je n’ai pas regardé l’heure), des vigiles font évacuer le pont ouest, d’où je venais d’admirer le couchant sur la Seine, pour faire aller vers l’arrière et surtout en bas, où visiblement l’on devait danser bien tard… Mais cela, je ne l’ai pas vu : travail oblige, il fallait rentrer!

Huellas

Sans préméditation aucune, me voici au Théâtre du Rond-Point, en cette soirée de janvier qui s’annonçait terne jusqu’à ce qu’une invitation me parvienne, au tout dernier moment… Je ne sais pas ce que je vais voir, mais je m’y précipite, grâce à un bus qui ne marque que la moitié des arrêts, et une petite marche qui me mène du Pont des Invalides jusqu’à ce théâtre, l’un de mes préférés à Paris… Je découvre, en surfant sur mon Iphone, que le titre est « Huellas »… et, toujours sur le net, que cela signifie « empreintes », « traces »… Le site du théâtre annonce un spectacle hybride, danse et cirque. Pas fana du cirque, je suis un peu inquiète, mais j’y vais…

L’architecture des lieux me plaît toujours autant, et la gentillesse du personnel n’a pas diminué : pas de cocktails à la carte? Pas grave, on me fait le Moscow Mule que je demande, rien que pour moi!

Mais vous ne lisez pas cet article pour que je vous parle de mes goûts… Alors, venons-en au spectacle. Dé-coif-fant! Etonnant! Impressionnant! Je ne trouve pas le mot qui pourrait le mieux le qualifier. Danse, acrobatie, mais aussi musique et chant emportent la spectatrice que je suis dans un véritable tourbillon entrecoupé de silence et d’obscurité. Ce sont aussi eux qui règnent au début. Le public reste coi, plongé dans le noir et, au départ, le silence. Assez long. Soudain rompu par une voix… puis un tambour… Et cela dure pour mon plus grand bonheur. La curiosité s’exacerbe. Un flash… On découvre un corps allongé. Un deuxième. Le corps est comme en suspension. Un troisième. Des sursauts… Le chant s’amplifie, le rythme du tambour s’accélère… Et l’on assiste à des tentatives d’un homme préhistorique, qui essaie de se dresser sur ses deux membres postérieurs…

La suite, je ne vous la raconterai pas, pour ne pas déflorer le thème du spectacle, qui se révèle progressivement, dans une succession de tableaux tous plus saisissants les uns que les autres, avec des rythmes et des figures dont la diversité témoigne de la virtuosité du chorégraphe et des danseurs, mais aussi du musicien et de la chanteuse-musicienne.

Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé à la fois la musique et la danse, sur une thématique qui nous questionne au plus profond… A voir donc absolument!

En fanfare

Le titre du film m’avait intriguée, et les bribes d’informations que j’avais m’ont alléchée… Me voici donc dans une salle sombre, prête à découvrir ce que j’espérais un hymne à la fraternité et à la musique.
De ce côté, je n’ai pas été déçue. Je ne vous raconterai pas l’histoire, car cela déflorerait le sujet, au cas où vous viendrait aussi l’idée d’aller le voir…

Côté « fraternel », les bons sentiments, toujours proches des rejets, ne manquent pas. Et les deux acteurs sont si opposés et jouent si bien que ça « passe », sans trop virer à la guimauve.

Côté « musique », pas de doute, « ça baigne »! On passe de l’univers classique au jazz, via la chanson française, y compris Sardou… Le Boléro venant réconcilier tout le monde à la fin. Les amateurs de classique comme ceux de jazz seront ravis, et les fans de Sardou pas moins. On ne peut pas faire plus « consensuel »! Un peu trop, peut-être, sussurre en moi un diablotin…

Toujours côté « musique », si vous n’appréhendez pas bien en quoi consiste la conduite d’un orchestre, c’est un bon tutoriel. Vous finissez pas comprendre beaucoup de choses, y compris que diriger un orchestre symphonique de haut niveau n’est pas si différent que mener une fanfare d’amateurs/trices plutôt fantaisistes, voire fantasques.

Alors, me direz-vous, qu’est-ce qui fait qu’on vous sent « retenue »?

Les stéréotypes concernant le pays minier. Pourtant, j’avais été la première à m’extasier devant « Bienvenue chez les ch’tis ». Mais Dany Boon connaît et aime son pays, et s’est joué des stéréotypes avec brio. Ici, ce n’est pas le cas. Parfois même je me suis sentie gênée. Pourquoi? Difficile à expliciter!

Trop d’emphase autour de la solidarité des ouvriers/ères et des mineurs?

Trop de gentillesse chez dans les portraits de femmes dégoulinant de courage, d’amour et de bons sentiments?

Trop de caricature dans les décors, notamment la maison en briques des quartiers populaires? Sans compter l’incontournable canal…

Et le côté invraisemblable, notamment de la fin, qui fait plus « conte de fées » que film réaliste. Ce qui m’amène à la troisième raison : un « mélange des genres » pour moi assez difficile à accepter. Mais ce ne sont que mes impressions, et je vous conseille de vous faire votre propre opinion, en allant voir ce film. Car il est un bon dérivatif à la grisaille et la froideur (dans tous les sens du terme) ambiantes…

Une alternative : aller à Walincourt?

La simple vue de cette carte suffit à comprendre que l’on n’est pas en pays minier: celui-ci est situé beaucoup plus au nord! et encore moins près de la mer!

Mais pour ce qui est de la musique, vous ne serez pas déçu-e si vous y allez ce week-end…

Le Don Quichotte de Noureev

Il reste quand même celui de Cervantès, ne vous inquiétez pas! Simplement, le ballet est signé du célèbre chorégraphe… et cela se sent, cela se voit, cela s’admire. Le public ne s’y est pas trompé; il était nombreux en ce soir d’avril à l’Opéra Bastille. Et les ovations durèrent bien longtemps à l’issue du spectacle!

Qu’ai-je préféré?

Les « espagnolades » de la première partie, tout en nuance de rouge vif et vert éclatant ?

Le duo entre amoureux, contraints de se cacher pour échapper à l’ire paternelle? Le côté slave de la deuxième partie, tout en nuances de gris, de bruns et de bleus, seulement troublées par le rose et le vert pâles des tutus du corps de ballet?

Les performances des trois danseuses, dont j’ai imaginé qu’elles représentaient chacune une image de la Femme (en l’occurrence, la Femme rêvée par le poète, Dulcinée)… Rouge et Or : domination, pouvoir, aisance. La « Mère »… Or et blanc : volupté, séduction, attirance… La « Maîtresse ». Blanc : pureté, virginité, innocence. La « Dame des pensées », chère aux chevaliers et aux troubadours ou trouvères. Et, du coup, m’est venue une autre idée. Et s’il y avait un tryptique relié au « féminin », déjà discernable dans les Evangiles : Sainte Anne, Marie et Marie-Madeleine…

Mais revenons à l’Opéra. Une petite flûte, le programme… c’est bon, on y retourne!

De ma place, premier rang de corbeille, je voyais très bien tout l’orchestre et son chef. Remarquables d’un bout à l’autre de la partition.

Curieuse destinée que celle des musicien-ne-s condamné-e-s à la « fosse »… Seule la tête du chef d’orchestre doit dépasser pour les premiers rangs ! Jouer, et jouer aussi longtemps, des airs aussi variés, tout en restant invisible pour le public… C’est cruel, non? Aussi ai-je compris qu’iels filent rapidement à la fin, sans laisser loisir aux auditeurs/trices de les ovationner comme iels le méritaient! Car, s’il y eut quelques « couacs » côté danse, je n’en ai relevé aucun côté musique… or le poème symphonique composé par Strauss en 1897 n’est pas simple à interpréter. Une belle critique en est proposée sur le site de France Musique. Je vous invite à la lire, et à écouter les extraits proposés…

Côté danse, je me suis demandé pourquoi le danseur étoile paraissait plus « léger », plus « gracieux », plus « aérien » que les danseuses. Volonté du chorégraphe? Ou virtuosité rendue possible par la liberté? Sont-ce les pointes qui « vissent » les danseuses au sol?

Mais n’exagérons point : certaines figures furent remarquables, et la technique est bien là. J’ai cependant – vous l’aurez compris – regretté un manque d’ « envols »… Néanmoins, un superbe ballet… Les photos prises à la fin (pas le droit – et pas l’envie – d’en prendre pendant le spectacle) sont floues, mais je vous les transmets quand même, pour que vous ayez un aperçu des personnages.

Ici, vous découvrez le père et le prétendant évincé

Quelques « toréadors » et, à l’extrême droite, Sancho Pança

Au centre, Don Quichotte

Le Chef d’orchestre, entraîné par le Chevalier

La danseuse et le danseur « étoile »

Des étoiles, j’en avais plein les yeux, et j’étais ravie d’avoir assisté à ce beau spectacle. J’en garde beaucoup de souvenirs, impossibles à lister ici. Et mon admiration pour Noureev n’a fait que croître, en particulier pour la mixité culturelle revendiquée ici…

Carnaval de Vence

Sur « la Côte » (comme s’il n’y en avait qu’une!), c’est actuellement le moment des carnavals. Complètement décalés, si vous regardez le calendrier. Car, normalement, un Carnaval s’achève le Mardi Gras. Autrefois on brûlait Monsieur Carnaval. Pour ce qui me concerne, j’ai vécu ces moments au Nord comme au Sud : à Binche, ville de Belgique célèbre pour ses gilles (dont je vous ai déjà parlé) et à Nice. Le lendemain commence en effet le carême des catholiques : durant 40 jours, abstinence, voire, pour certain-e-s, des formes de jeûne. Mais dans notre actuelle société avide d’argent, il faut qu’un carnaval rapporte. Alors, fi des traditions, on le décale. Ce qui fait que, sur la Riviera, ils ont tous lieu après le Mercredi des Cendres, qui, cette année, coïncidait avec la Saint Valentin. Mon arrivée au bord de la Méditerranée s’est effectuée au moment de la Fête des Mimosas, à Mandelieu-la-Napoule, et les carnavals de Nice et de Menton ont commencé tous deux samedi, le 17 février. Jadis, un carnaval était une fête populaire, qui permettait tous les défoulements avant les 40 jours de carême… Maintenant, c’est un attrait touristique. Et, pire, inaccessible au « peuple ». Je m’explique : à Nice comme à Menton, le défilé se fait dans une zone circonscrite, fermée. Il faut payer pour y entrer. Et ce n’est pas donné : entre 14 et 28 euros par personne à Nice, entre 16 et 29 euros à Menton ! Un spectacle, donc, et non plus ce que c’était naguère : une manifestation populaire. J’ai connu le temps où chaque quartier de Nice faisait « son » carnaval…

Heureusement, il y a des Résistant-e-s. On m’a parlé d’un carnaval alternatif à Nice. Effectivement, une page Facebook lui est consacrée.

Et, bien sûr, on y retrouve la ratapignata, la chauve-souris, emblème de la résistance nissarde.

Il s’adapte à l’époque, comme on peut le voir sur cette affiche.

Je ne serai plus là pour le voir, décalage des périodes de vacances oblige; vous savez, ce qui empêche, pour que certain-e-s puissent gagner un maximum, que d’autres se retrouvent en famille, que des (arrière) grands-parents qui vivent à Paris puissent partager les vacances de leurs petits-enfants scolarisés dans une autre région?

Pour ce qui me concerne, je suis allée voir celui de Vence. Un tout petit défilé, mais où chacun-e avait sa place. De l’intergénérationnel. L’absence de « clinquant ». Et de la joie partagée, notamment avec les enfants. Alors j’ai choisi de vous le faire « vivre » autant que possible, au travers de (mauvaises) photos et (piètres) films. Pour témoigner. Pour montrer que cela est encore. Malgré tout.

Un petit mot, avant de commencer, sur la ville elle-même. Une des rares villes qui a gardé son authenticité malgré le flux touristique né avec le PLM et la « nationale 7 » et continué avec le TGV (TPV (très petite vitesse au prix de la grande!) entre Aix et Nice) et l’A8. Le centre ancien y est moins « léché » que dans les villages perchés ou les villes du bord de mer, mais on sent qu’il y fait bon vivre…

La photo ci-dessus a été prise sur la place où nous avons déjeuné. Un lieu idyllique, loin de toute agitation. Calme et silencieux. Un soleil radieux. Un accueil merveilleux. Et un déjeuner délicieux. Que demander de mieux?

Parillada de poissons pour l’une, aïoli aux légumes craquants pour d’autres, et des desserts tous plus fins les uns que les autres, comme les poires au vin que j’ai appréciées à leur juste valeur… Bravo à l’équipe du Michel Ange!

Après la charmante et sereine place Godeau (nom qui a évidemment entraîné le « en attendant » attendu…) au chevet de la cathédrale, direction la place du Grand Jardin, très ensoleillée aussi, moins historique mais beaucoup plus animée…

Une petite heure à siroter le café au soleil, et voici que l’on entend de la musique. Qui s’approche. Le défilé arrive…

Vous ne verrez pas la danse des Boufet, mais on voit déjà, dans le défilé, le costume blanc des danseurs et danseuses selon la tradition.

 » La danse des « Boufet » très répandue en Provence se retrouve sous d’autres formes dans d’autres régions comme les « soufflaculs » dans le Jura.
Comme dans toutes danses traditionnelles, les « Boufet » puisent leur origine aux sources de la civilisation agraire. L’homme a toujours essayé par des représentations d’objets ou d’animaux, des gestes spécifiques, de chasser les mauvais esprits qui pourraient entraver l’acte de régénération et d’encourager les divinités propices du sol dont sa vie dépend.

C’est ainsi que les figures précises de la danse, telle que spirale, enroulement, encerclement,dédoublement, renversement, ainsi que l’instrument employé par les « boufetaires » le soufflet, le costume blanc des jeunes gens et les grelots qui s’agitent à leurs chevilles, sont autant des symboles. »

On sait aussi que les sauts en cadence sur un pied sont des appels pressants à la
végétation, que les vêtements blancs, les grelots, mettent en fuite les mauvais esprits.

La danse des « Boufet » est donc bien un rite de fertilité comparable aux Olivettes et au au Bakubèr dans laquelle le soufflet a pour mission d’insuffler des forces nouvelles à la Nature endormie.
D’ailleurs, le caractère des paroles prononcées, le fait que les sorciers utilisaient le soufflet pour chasser les mauvais esprits, attestent le sens rituel des « Boufet », destinés à agir sur la Nature et sur les astres pour promouvoir la fertilité.
« 

« A Nice, le lancer de paillassou est une tradition. Je l’ai retrouvée, ce jour-là, à Vence. Mais ne sais si on le nomme ainsi…

Le paillassou ou pailhasso, si on l’écrit en niçois, se traduit littéralement par « homme de paille ». Son nom viendrait même de l’italien pagliaccio, qui veut dire le clown ! Tradition issue directement du Carnaval de Nice, le lancer de paillassou est même devenu un championnat du monde. 

À l’origine, il s’agit d’un jeu qui consiste à placer le bonhomme au centre d’un drap. Lancé dans les airs, on compte alors le nombre de rebonds que l’on parvient à faire. Avant tout lancer, un cri :

Un, doi, très, manda lo Pailhasso !le cri du lanceur de paillassou !

Selon la tradition, il représente les soucis, les mauvaises choses de l’année passée. Donc on l’envoie loin, le plus loin possible pour passer à autre chose dès janvier et oublier ses malheurs. En 1990, le groupe de musique Nux Vomica et son chef de file Louis Pastorelli décident de créer un  carnaval indépendant, ils donnent alors une place particulière à ce paillassou. 

Le championnat du monde du lancé de paillassou est organisé chaque année par l’association Nissa Pantai à Nice fin janvier.« 

Ce que je partage avec vous ci-dessous, c’est cette belle tradition, revue pour les enfants, avec un « mini-paillassou ».

L’heure tourne, et nous avons prévu d’aller visiter la chapelle de Matisse. Il faut arriver avant qu’elle ne ferme… Adieu le Carnaval et ses mini-carnavaliers/ères…

Kiss the One we are

Etes-vous anglophone? Moi pas vraiment… Aussi ce titre m’a-t-il interpellée. Et continue-t-il à le faire… même après avoir vu le spectacle ainsi nommé. J’ai bien une idée de ce qu’il sous-entend, mais j’aimerais avoir l’avis de celles et ceux d’entre vous qui connaissent suffisamment cette langue – et j’ajouterai la culture – pour interpréter cette ellipse… A vos claviers, pour les « commentaires »!

L’énigme du titre ne m’a pas empêchée de filer à Chaillot voir ce dont il s’agissait. Chaillot en travaux…

… comme les abords de la Vieille Dame en face, qui commencent à dévoiler la nouvelle perspective depuis la vaste salle, naguère agréable restaurant, désormais ressemblant davantage à un hall de gare avec même un mini-comptoir « speed drink ou food ».

Qu’est-ce qui m’a donné envie d’y aller? Pas d’affiche. Il n’en existe pas! Simplement le texte présent sur le site du Théâtre National de la Danse :

« Daniel Linehan a demandé aux danseurs : « What moves you ? » (qu’est-ce qui vous meut ?) Sur la base de cette question, le public assiste à l’émergence de l’intime chez les neuf danseurs : les indications physiques reçues, les réactions, la mémoire du corps… un dialogue sensible en plusieurs strates s’élabore entre les interprètes et le public sur la joie universelle de danser. »

Me voici donc installée au premier rang, en ce soir de décembre, face à une non-scène noire, plongée dans une semi-obscurité. Y arrivent les un-e-s après les autres des hommes et des femmes, revêtu-e-s d’étranges accoutrements. Iels s’installent à divers endroits, dans des postures variées: debout, allongés, assis. Et demeurent silencieux et immobiles. Pas de musique. La salle attend.

Au bout de minutes qui paraissent longues mais permettent aussi de faire la coupure avec « la vie de dehors », « la vie d’avant ». Un homme se met à émettre des cris . Vêtu de noir. Fesses soulignées par des lèvres de feu… Il crie, agite la tête de droite à gauche, de haut en bas. Ses cris évoquent les animaux, et font naître diverses associations d’idées : homme pré-historique? animal blessé? appel à la meute? souffrance ? plaisir? envie? Puis il se tait. Et tout redevient silencieux.

Encore une attente dans la pénombre et le silence. Une des jeunes femmes debout avance vers le centre de la scène, marqué par un cercle assez large, au centre duquel se trouve un objet rond. Elle se penche et allume un brasero. Un vrai. Du vrai feu. Jamais vu cela dans les ballets jusqu’à présent! Elle regagne sa place et le silence revient.

Les flammes éclairent les corps et visages immobiles des individus sur le sol, mais aussi dans la salle. Le public sent monter l’odeur du feu. Une odeur étrange, pour un univers étrange, où de rares arbustes sont accrochés, sans racines ni appui sur le sol.

Une des personnes, assise les jambes allongées sur le sol, commence à bouger légèrement. J’utilise volontairement l’épicène, car, jusqu’au bout il sera impossible de la faire entrer dans une catégorie de sexe. Elle (car « personne » est féminin!) bouge, remue les mains, les pieds, puis le corps, et finit par ramper, pour progressivement se relever, avec l’aide de deux autres, dont un homme vêtu de blanc. Blanc de deuil ou blanc de la médecine? Par la suite il me semblera médiateur, comme chaman…

Je ne vais pas vous raconter tout le spectacle. Il faut le voir. Ou plutôt il faut le vivre. Dans son originalité. Dans sa singularité. Je devrais dire « dans la singularité de chaque être ». Allier spécificité, singularité, personnalité et unicité, fraternité, solidarité… est-ce ce qu’a voulu faire le chorégraphe? Si tant est que l’on puisse parler de chorégraphie ici, tant tout apparaît comme spontané, mais un spontané travaillé. Encore un oxymore! Tout est oxymore en somme, dans ce que j’ai ressenti de ce spectacle. Peut-être est-ce ce qui le rend si vivant, à la fois léger et profond, esthétique et émouvant, prenant et prégnant… Même le décor devient partie prenante de la danse, lorsque chacun-e se saisit d’un seau de caoutchouc noir pour déverser une sorte de sable ocre rouge sur le sol, créant des vaguelettes, des creux… ou lorsque les pas de danse retravaillent ce décor, sous forme de soleil géant, de formes plus ou moins circulaires….

Si vous ne pouvez aller le voir, voici quelques extraits qui vous parleront mieux que je n’ai su le faire : un ici, qui « montre » et un autre , qui « explique » (mais en anglais!). Un texte très intéressant, aussi, est en ligne.

J’allais oublier de parler des sons. Sons vocaux, comme les cris et chants. Sons musicaux, comme celui produit par un étrange petit instrument ressemblant à un petit tambourin que l’on place sur un micro. Sons de la nature… et musique « moderne », incitant à des danses débridées. Alternance de replis et d’expansion, de calme et d’agitation, de solos et de danse à deux / trois / plus… Tout y est. L’article cité ci-dessus parle d’holisme. Pas mal vu…

Bien sûr, pas d’image. De toutes façons, j’étais trop « prise » pour en prendre. Juste, comme vous en avez l’habitude, celles de la fin (toujours aussi mauvaises!).

J’ai eu le temps, car il y a eu plusieurs rappels. Le public était ravi. Je dirais même « heureux ». Car c’est un de ces rares spectacles qui fait qu’on en sort plus « Humain » et plus « heureux/euse »…

L’incroyable créativité de Carolyn Carlson

Depuis bien longtemps je « suis » cette chorégraphe hors normes, qui m’a séduite dès que je l’ai vue en Avignon, voici… je ne sais combien d’années… La dernière fois que je l’ai vu danser, c’était au Musée d’Orsay, et elle était seule, non sur une scène mais sur le sol, devant nous qui étions assis-e-s par terre. Maintenant elle ne danse plus, je pense? Mais elle continue de créer, encore et encore. Et de nous enchanter.
Ce fut le cas cette semaine, dans la salle du Théâtre Libre, dont les « hiéroglyphes » et les « sequins-boucliers » m’interpellent.

Le public était tellement « pris » qu’il a mis du temps avant d’applaudir, à la fin du spectacle. Et les applaudissements ont duré, duré, duré… Les trois danseurs et les trois danseuses le méritaient largement. Mais aussi celle qui a imaginé un tel spectacle. A la fois onirique et authentique. A la fois inspiré de l’Histoire de l’Humanité et des histoires des humains.

On pouvait par moments revivre les grands mythes, Orphée et Eurydice, Icare, Faust… et à d’autres moments revivre les épisodes sanglants de notre histoire, mais aussi nos élans, nos amours, nos enthousiasmes… La Vie. Et la Mort. Jusqu’à la Cène « interprétée », dans tous les sens du terme. Les portes glissant sur la scène comme autant de portes vers le Bonheur ou vers la Disparition. Vers le Paradis ou vers l’Enfer.

Et ces corps qui courent, glissent, s’entrelacent, se rejettent… Jouant avec des chaises, bondissant sur des pneus ou des tables. Dans des rythmes tantôt endiablés, tantôt d’une lenteur, pour ne pas dire d’une langueur (sur)prenante… La musique est remarquablement variée, et les chansons lancinantes ou entraînantes.

Ces corps et leurs clones, dans un film projeté à la fenêtre dominant la scène. Comme autant de fantômes, de spectres, d’âmes… ou simplement de doubles, symbolisant peut-être une autre Vie, une forme de Résurrection?

Bref, 72 minutes que l’on ne voit pas passer, tant on est enveloppé – que dis-je, enlevé/élevé/transporté – par cette alternance de tourbillons spontanés de vie et de marche ralentie, réfléchie, de mortels qui hésitent parfois à franchir le seuil…

J’allais oublier… Si vous voulez avoir un aperçu, regardez cette vidéo

Un mariage (d)étonnant : viole de gambe et hip-hop

Lorsque j’ai réservé pour ce spectacle, annoncé le 7 novembre au Théâtre 13 (dont je vous ai déjà parlé à moults reprises, tant sa programmation est exceptionnelle), j’étais un peu hésitante, car le hip hop n’est pas de mes danses préférées. Mais, la curiosité aidant, me voici, en ce mardi soir bien frais, franchissant le seuil du centre commercial de la Place d’Italie. Relooké, soit dit en passant, avec une peinture plus que voyante! Je n’en ai pas trouvé de photo, mais j’irai vous en faire une dès que possible. Au fait, pourquoi ce nom d’Italie « deux »? Y a-t-il un centre « Italie un(e) »?

Mais revenons dans la salle noire et bien aménagée de ce qui fut le Grand Ecran Italie, cinéma qui permit aux promoteurs, à l’époque (fin des années 80), de construire ce complexe immobilier hideux.

C’est le chorégraphe lui-même, Mourad Merzouki, qui introduit le spectacle. Emu ou ivre? je ne sais… Toujours est-il qu’il a bien du mal à lire le texte préparé! Ce que je comprends mal, étant donné qu’il est à l’initiative de ce programme. A moins que ce ne soit un subterfuge pour ne pas avoir l’air de trop remercier les « sponsors »? Je n’ose le penser… Quoique… Bref, il explique ce qu’est le festival Kalypso, qu’il a créé en 2013, festival dédié au hip hop, puis explique comment il en est arrivé à marier deux éléments de cultures apparemment si éloignées : la viole de gambe, instrument de la Renaissance qui fut très à la mode dans certaines cours, royales ou non, avant de disparaître pour réapparaître tout récemment, et le hip hop, danse née 5 siècles plus tard, au départ dans des milieux plutôt plébéiens…

Puis ce fut le moment de la danse… Les mots me manquent pour exprimer la magie de ce spectacle…

Imaginez une jeune femme, robe ample, cheveux longs dénoués, jouant de l’instrument sur une sorte de traîneau glissant sur la scène au gré du mouvement qu’impriment les danseuses et danseurs… Une musique tantôt suave, tantôt envoûtante, tantôt vive et entraînante…

Quant à la chorégraphie, qu’en dire, sinon qu’elle est remarquable, et que les quatre artistes semblent glisser comme sur la glace, ondoyer comme des sirènes, virevolter tels des elfes gracieuses dans les brumes nordiques…

Bref, vous l’aurez compris, un spectacle enchanteur tel qu’on aimerait en voir plus souvent, tant il nous entraîne dans le monde de la Beauté Pure…

Bien sûr, je ne puis vous montrer des images du spectacle lui-même, mais je vous ai enregistré un tout petit extrait de la suite de celui-ci, lors d’un des xièmes rappels de la foule enthousiaste. Il ne restitue pas l’ensemble, car se situe un peu à part, en insistant sur l’interculturalité, comme vous le constaterez.

Mais vous pourrez voir bien d’autres vidéos, teasers comme extraits, sur les chaînes du net… Je me contenterai donc de vous offrir quelques photos de la troupe (pas toujours très bonnes, hélas, par manque de lumière et d’un appareil performant).