L’orchestre de Budapest à la Philharmonie

On a beau vouloir tout découvrir – comme c’est un peu mon cas, l’avouerai-je? -, certains lieux échappent à votre curiosité, pour des raisons qu’il est difficile de définir. Tel est le cas de la Philharmonie de Paris, que je ne connaissais que de l’extérieur, notamment pour être allée à plusieurs reprises à la Grande Halle de la Villette (en particulier pour la magnifique exposition Toutankhamon) et au Musée de la Musique (à propos, n’hésitez pas, si vous êtes dans le coin, à aller à la Nuit du Rossignol, dont j’ai déjà parlé dans ce blog : c’est le 31 mars cette année). Aussi étais-je bien contente de la découvrir pour un concert en ce mardi soir encore bien frais pour la première soirée complète du printemps.

Il ne faut pas souffrir de vertige, comme moi, pour fréquenter le balcon du 6ème étage, où j’ai eu la chance d’être au premier rang, ce qui offre une vue splendide sur la salle et sur la scène.

L’architecture en est sidérante, et bat en innovation, à mon sens, celle de la Seine Musicale. J’ai entre autres apprécié son asymétrie et l’audace du balcon blanc, projeté comme un vaisseau spatial… Mais le long balcon plus calme et serein qui lui fait face n’est pas mal non plus…

La scène est disposée pour accueillir un orchestre symphonique, ainsi qu’un piano. Cela obligera d’ailleurs le chef d’orchestre, Ivan Fischer, à tourner le dos à une partie des musicien-ne-s, avant l’entracte qui fera disparaître l’instrument.

Dans cette salle, l’acoustique est telle que le moindre petit bruit des spectateurs/trices résonne partout. Ce qui contraint à un silence absolu, qui fut d’ailleurs respecté tout au long du spectacle. Mais cela permet aussi de prendre des places moins chères et d’entendre tout aussi bien! Soit dit en passant, une place comme celle que j’avais est pour moi excellente, car on y voit à merveille les doigts courir sur le clavier du piano comme sur les cordes des harpes…

Vous ne verrez pas de photos de l’orchestre, car il est interdit de saisir des images dans la salle. Je vous renvoie pour le découvrir à son site, accessible en anglais pour celles et ceux d’entre vous qui ne sont pas magyarophones. Ce Budapest Festival Orchestra a enthousiasmé la salle. Par la qualité de son jeu, et une harmonie remarquable entre ses membres, sous la direction d’un chef dynamique et original, qui termine le concert par des « mini-impros » de deux groupes de musiciens, sur des thèmes de musique hongroise, qui n’ont rien à voir avec le programme annoncé. Mais revenons à celui-ci. Je dois dire que j’ai préféré la première partie à la seconde, qui était composée de trois morceaux de Richard Strauss aux tonalités très différentes : Dom Juan, Danse des sept voiles, Till Eulenspiegel. Le dernier en particulier ne m’a pas vraiment « emportée », même si j’ai apprécié la virtuosité des artistes et la véritable sym-phonie, au sens propre du texte, de l’orchestre.

Une mention spéciale, donc, pour le début de la première partie, d’un compositeur hongrois dont je crois n’avoir jamais entendu parler : Ernö Dohnänyi (1877-1960). Les Minutes Symphoniques op.36 m’ont littéralement emportée par leur mélodie et leur poésie. J’en ai trouvé pour vous une interprétation par deux autres orchestres : la première, que je trouve personnellement moins bonne car trop « enlevée » à mon goût, mais qui vous en donnera une idée. La seconde, par un orchestre plus modeste mais à la tonalité plus proche. Il faudrait que la Tribune des Critiques de Disques consacre une de ses émissions du dimanche après-midi à cette oeuvre!

Une seconde mention spéciale pour le concerto n°4 de Beethoven. Si je devais expliquer à quelqu’un ce qu’est un concerto pour piano et orchestre, c’est sans conteste ce spectacle que je conseillerais… L’instrument et l’orchestre se complètent, se répondent, s’opposent discrètement parfois, en une synergie parfaite. Il faut dire que Rudolf Buchbinder, est exceptionnel. Ce pianiste né en Bohême d’une famille originellement allemande a maintenant 77 ans. Vous pourrez le voir et l’entendre, mais beaucoup plus jeune et avec un autre orchestre, sur cette vidéo. Après moults rappels, il a joué deux autres morceaux, seul, cette fois, et l’admiration des membres de l’orchestre était évidente. Les ovations du public sont la preuve que je n’étais pas la seule à l’admirer… Si vous voulez l’entendre, il revient jouer à Paris les 5 et 6 avril, à la Maison de la Radio et de la Musique, ce concerto mais aussi d’autres oeuvres, et avec un autre orchestre, celui de Radio France.

Inutile de vous dire combien l’on vit intensément durant un tel concert, en oubliant le fracas du monde, et comme il est dur d’en sortir… mais la musique résonne encore en soi, n’est-ce pas?

Un concert comme naguère

Un concert intimiste dans une belle demeure de la Plaine Monceau, avez-vous déjà vécu cela? C’est ce qui m’est arrivé la semaine dernière, pour mon plus grand plaisir.

L’annonce était discrète, peu « alléchante ». Mais je fus attirée par le lieu insolite : un musée dont je n’avais jamais entendu parler. Je ne vous dévoile pas lequel, car je vous le ferai découvrir plus tard. Mieux vaut garder le suspens pour motiver son public, n’est-ce pas? (rires)

Imaginez un ancien jardin d’hiver, hélas dépouillé de beaucoup de ses plantes. Mais la verrière est toujours là, l’espace aussi.

Un piano. Trois sièges, auxquels font face en arc-de-cercle une vingtaine d’autres. Le public s’installe. A peine une quinzaine de personnes. Pourtant, le prix n’est pas dissuasif : 15 euros avec la visite du Musée!

Une dame, tout sourire, présente rapidement le programme. Puis nous voyons descendre trois jeunes femmes des escaliers en colimaçon. L’une avec un violon, l’autre avec un violoncelle. La troisième ne porte pas son instrument!

C’est la pianiste qui annonce la première oeuvre qui sera jouée, un trio de Beethoven. Après un bref entracte, elle poursuivra avec un trio de Mendelssohn.

« Ludwig van BEETHOVEN : Trio, opus 1 nº1 30 mn »

  1. Allegro ;
  2. Adagio cantabile ;
  3. Scherzo allegro assai ;
  4. Finale presto

Félix MENDELSSOHN : Trio, opus 66 nº2  28 mn 1. Allegro energico e con fuoco ; 2. Andante espressivo ; 3. Scherzo : Molto allegro quasi presto ; 4. Allegro appassionato »

Deux oeuvres très différentes, que les artistes jouent avec passion et finesse. Chacune montre une personnalité bien différente. La réserve de la violoniste, Anna-Li Hardel complète à merveille l’enthousiasme de la pianiste, Marina Saïki, et la profondeur de la violoncelliste, Romane Bestautte.

Pour ma part, j’ai particulièrement apprécié l’adagio de Beethoven et l’andante de Mendelssohn. Mais l’interprétation des deux oeuvres par le Trio Lazuli a été remarquable, et les rappels furent nombreux et bien mérités. Des artistes à suivre, donc… En attendant, vous pourrez voir un extrait d’une de leurs interprétations sur YouTube.

Il cello e il cielo

Comme les « ancien-ne-s » de ce site le savent, j’aime le violoncelle. Alors, comment résister, par cet après-midi pluvieux, à l’appel de cette annonce? D’autant que je ne connais pas cet endroit!

Je situais bêtement l’Oratoire au Louvre ! Que nenni! Il est situé non loin, certes, mais pas du tout dans le périmètre de celui-ci. Mais en réalité c’était vrai jadis. Car il s’agit ni plus ni moins de l’ancienne Chapelle Royale du Palais.

Et j’imaginais une sorte de petite chapelle. Que nenni! En réalité, l’édifice est de taille imposante, aussi vaste qu’une grande église.

Un peu d’histoire en passant ? C’est la Congrégation de l’Oratoire (avatar de la Société de l’Oratoire, issue de la Contre-Réforme), créée en 1612 par Marie de Médicis, qui a souhaité un lieu de prière digne de sa renommée et fait lancer le chantier en 1620. Après modification des plans, il fut achevé en 1623. C’est là qu’eurent lieu les cérémonies funèbres de Richelieu, de Louis XIII, d’Anne d’Autriche et de Marie-Thérèse. Mais la consécration de l’église n’eut lieu qu’en 1750… et cela dura peu, puisqu’elle fut désacralisée à la Révolution. C’est justement en 1789 que les protestants obtiennent la liberté de culte. Et, en 1811, la première cérémonie protestante a lieu à l’Oratoire qui, depuis, est l’un des plus grands temples de Paris. Si vous voulez en savoir plus, le site de l’Oratoire est très pédagogique.

Une mini-exposition sur le mémorial de Coligny l’est également. Toutes les explications concernant histoire, actualités de l’époque, architecture et statuaire y sont apportées.

Comme tous les temples, très austère. Mais, pour ma part, j’ai ressenti une forme de malaise en y pénétrant. Une tristesse, un manque de « vie », en quelque sorte.

Le concert m’a fait oublier tout cela. Pas un concert ordinaire, non. Alternance de commentaire (par une pasteure) et lecture (par une autre pasteure) d’extraits de la Bible (plus ou moins) relatifs aux rêves et de morceaux interprétés au piano et au violoncelle.

Le public est séduit par la pianiste, dont il apprend très vite qu’elle n’est autre que l’organiste en titre de l’Oratoire. Ce qui m’a donné envie d’aller l’entendre à l’orgue, bien sûr. Coréenne née et élevée en Australie, elle a rejoint la France et mène une carrière internationale. C’est son jeune frère, arrivé plus récemment en France, qui est au violoncelle.

Et ce fut un délice de les entendre, dans des oeuvres extrêmement variées.

Parmi celles-ci, j’en ai particulièrement apprécié deux : Romance sans parole pour piano et violoncelle, de Mendelsohn (je n’en ai pas trouvé une aussi bonne interprétation sur le net, mais vous pouvez écouter ici pour en avoir une idée) et la Suite bergamasque de Debussy. Mais l’ensemble était bien choisi et interprété avec beaucoup de sensibilité, et, d’après un connaisseur, l’interprétation de Bach, remarquable.

Opéra en Liberté et Hymne à l’Amour

Dans le précédent article, qui vous a fait voyager dans les Cieux, je faisais allusion à l’église Saint Julien le Pauvre. Vous la connaissez, si vous lisez ce blog depuis longtemps, car j’en ai déjà parlé ici. Pour les autres, c’est cette jolie petite église plus ou moins romane, blottie dans le petit parc -jardin Viviani – qui fait face à sa grande soeur, Notre-Dame, de l’autre côté de la Seine, et fait angle avec la rue Galande.

Une église qui a vécu une histoire pleine de rebondissements (histoire que j’ai déjà narrée, je n’y reviens donc pas), et est maintenant consacrée au rite grec melkite catholique. Une petite visite, mais limitée au côté droit… je n’ai pas pu me promener dans l’église avant le concert! Et le manque de luminosité explique la mauvaise qualité des photos…

Les Grecs (ainsi dénommés non par leur origine géographique mais parce que c’est la langue grecque qui est utilisée) Melkites Catholiques sont des catholiques de rite byzantin. Ce qui explique la présence de nombreuses icônes.

Chapelle latérale

Cela explique aussi la présence de l’iconostase où se trouvent, entre autres, les peintures représentant les 4 évangélistes et leurs symboles, sujet de ma verve d’avant-hier… Observons-le de haut en bas (pour la petite histoire, le haut avait disparu à une certaine époque!)…

Quel lien avec l’Opéra et l’Amour? Tout simplement, cette église accueille très souvent des concerts, dont celui qui fait l’objet de mon discours ce jour. Vous l’aviez peut-être compris, si votre regard s’est porté sur le piano de la photographie ci-dessus!

EGLISE SAINT JULIEN LE PAUVRE - Salles de spectacles

En ce jour de fête commerciale, rien de tel, pour contrecarrer les visées économiques, que de se nourrir de musique et de chants, n’est-ce pas? Et ce fut un régal.

Le pianiste est remarquable. Il faut dire que Philippe Alègre a une carrière riche, qui l’amène à jouer régulièrement dans les salles célèbres comme Cortot et Gaveau.

Philippe Alègre au piano

« Parallèlement à sa carrière de concertiste, il est depuis 2003 le fondateur et directeur artistique des « Nuits musicales du Rouergue », festival d’été au cœur de l’Aveyron. Il est également directeur artistique de « Piano Passion », série de concerts tout au long de l’année à l’église Saint-Julien -le-Pauvre à Paris. » (source)

C’est donc, si je comprends bien, l’instigateur de ce concert. Voilà qui explique le fait qu’il s’agisse à la fois d’un récital de piano, avec des morceaux interprétés en soliste, et d’un récital d’airs chantés par deux artistes, Clémence Lévy et Matthieu Justine.

Le public attend encore quand s’élève une voix du fond de l’église. Vêtue d’une longue robe rouge, la couleur symbolique de cette fête, une jeune femme s’avance, doucement, s’arrêtant de temps à autres pour créer une connivence avec le public, tout en continuant à chanter… Lorqu’elle arrive au choeur, le changement de sonorité est surprenant et fait comprendre comment l’acoustique est modifiée par l’architecture. Elle est ensuite rejointe par son comparse, et l’on saisit très vite une entente étonnante entre les deux artistes, qui semble aller bien au-delà du duo de chanteur/euse…

Je ne vais pas détailler le programme, ma mémoire n’est pas assez performante et il n’y a pas eu de document écrit. Mais il fut d’une extrême variété, allant de Franck Sinatra à un Ave Maria… Cette diversité fut pour moi un peu difficile à accepter, je dois bien l’avouer, même si la thématique était claire : l’Amour, comme l’indiquait le titre du concert. Mais voir swinguer sur le « Maria » de West Side Story dans une église, alors que quelques minutes plus tôt et plus tard on était envoûté par des airs d’opéra, demandait une certaine adaptabilité. Et il a fallu toute la dynamique du trio, et surtout de la jeune femme, pour que cela constitue au total un spectacle exceptionnel, avec une mise en scène bien réglée.

Lorsque j’ai cherché à en savoir davantage sur le duo, j’ai compris. D’abord, que mon hypothèse était juste : Clémence Lévy et Mathhieu Justine forment bien un couple à la ville comme sur la scène. Ils ont d’ailleurs tourné pendant le confinement une vidéo que je vous conseille de regarder.

Toujours pendant le confinement, lorsque celui-ci s’est un peu « ouvert », ils n’ont pas craint d’aller chanter et jouer en plein air. D’autres vidéos, sur leur site officiel, les montrent dans un décor de cités.

Cela correspond à leur engagement citoyen, explicité dans ce texte:

« L’émotion au cœur.
La voix comme drapeau.
L’opéra est universel, il n’a pas d’âge, de couleur, de frontière.
Amener l’opéra et la musique classique là où on ne s’y attend pas.
Faire un pas vers celles et ceux qui pensaient ne pas y avoir accès.
Partager, toucher, vibrer ensemble aux sons des relations humaines dans une cité, une grange d’un petit village de campagne ou une école.
C’est notre engagement aujourd’hui.
Oui l’opéra et la musique classique sont accessibles à tous et l’accueil du public nous le confirme, concert après concert.
« 

On saisit mieux dès lors le nom de leur ensemble : Opéra en Liberté. Et sa devise : « L’opéra partout. L’opéra pour tous ». Car la soprano et le ténor se produisent aussi dans des contextes plus « classiques », comme on le voit sur cette vidéo.

Le public a suivi. Il a aimé. Il a vibré. Moi aussi. Vous savez, ces instants où tout à coup votre corps est parcouru par des picotements, comme une « chair de poule » généralisée? Et ceux où les larmes vous viennent aux yeux tant l’émotion est forte? Et ceux où vous vous surprenez à sourire en permanence (derrière votre masque) tant vous vous sentez heureux/euse?

Le public a applaudi. Ovations qui se sont terminées debout après deux « bis », ou plutôt deux nouveaux airs offerts.

Un peu de musique en ce monde de brutes. Billet 6

Du mal à travailler ce matin… et un SMS d’un ami qui m’indique un morceau « sympa » sur France Musique. Je me connecte donc rapidement… et découvre une oeuvre que je ne connaissais pas du tout, Suite pour flûte et piano: IV. Romance. La voici en ligne

Elle est extraite du dernier album de deux musiciennes, Juliette Hurel et Hélène Couvert, « Compositrices à l’aube du XXème siècle ».

Compositrices à l'aube du XXe siècle - Juliette Hurel et Hélène Couvert

La présentation des compositrices est proposée par Julie Depardieu ici.

Bien sûr, je n’ai pas pu m’empêcher de découvrir ces 5 compositrices… Mel Bonis, Augusta Holmès, Clémence de Grandval, Cécile Chaminade et Lili Boulanger… Comme je dois me remettre au travail, nous y reviendrons plus tard… A moins que l’un ou l’une d’entre vous ne participe… ce serait bienvenu!

Un peu de musique en ce monde de brutes. Billet 3

Je renoue ce matin avec mes réveils musicaux, et, en écoutant France Musique, découvre une pianiste au jeu épuré qui me séduit. Me voici donc en train de vous faire partager le plaisir apaisant éprouvé en l’écoutant.

Alicia de Larrocha n’est plus de ce monde depuis 10 ans, mais elle continue à nous enchanter. Je vous propose donc d’écouter la danse 2 de l’opus 37 des Danses Espagnoles d’Enrique Granados et de vous laisser transporter par cette douceur… une musique caressante s’il en est…