
Non, je ne suis pas au Pays Basque, malheureusement inatteignable pour moi… jusqu’à quand??? Mais aujourd’hui, c’est jour de marché à Doullens, et je rêve aux marchés si vivants d’autrefois et de naguère…

C’est pourquoi j’ai pensé à ce tableau, et, comme j’ai trouvé sur une page recommandée par un de mes amis, Tableaux, une autre vision du marché, j’ai eu envie de faire un petit rêve de marché…

Marché
Sur la petite place, au lever de l’aurore,
Le marché rit joyeux, bruyant, multicolore,
Pêlemêle étalant sur ses tréteaux boiteux
Ses fromages, ses fruits, son miel, ses paniers d’oeufs,
Et, sur la dalle où coule une eau toujours nouvelle,
Ses poissons d’argent clair, qu’une âpre odeur révèle.
Mylène, sa petite Alidé par la main,
Dans la foule se fraie avec peine un chemin,
S’attarde à chaque étal, va, vient, revient, s’arrête,
Aux appels trop pressants parfois tourne la tête,
Soupèse quelque fruit, marchande les primeurs
Ou s’éloigne au milieu d’insolentes clameurs.
L’enfant la suit, heureuse ; elle adore la foule,
Les cris, les grognements, le vent frais, l’eau qui coule,
L’auberge au seuil bruyant, les petits ânes gris,
Et le pavé jonché partout de verts débris.
Mylène a fait son choix de fruits et de légumes ;
Elle ajoute un canard vivant aux belles plumes !
Alidé bat des mains, quand, pour la contenter,
La mère donne enfin son panier à porter.
La charge fait plier son bras, mais déjà fière,
L’enfant part sans rien dire et se cambre en arrière,
Pendant que le canard, discordant prisonnier,
Crie et passe un bec jaune aux treilles du panier.
Albert Samain, Aux flancs du vase (1898)

Didier Venturini ? Auteur, compositeur, interprète … Et poète, né à Chambéry en 1959 ; « Jour de marché
Didier Venturini
Tous ces râclements de voix
Huilent l’air dès les premières lueurs
Les trétaux éventrent le froid
De leurs pieds d’acier sans douceur
Des confins du lourd sommeil
Se déplient les jambes engourdies
Qui s’agitent entre les corbeilles
De légumes replets et de fruits
Des regards soupèsent le temps
Les premiers mots tanguent en surface
La gueule des camions géants
S’étire renifle à même l’espace
De larges mains gomment la nuit
De leurs gestes sûrs et rapides
Les couleurs se multiplient
Sur ce fond gris et insipide
Ah !
Que la vie est belle
Là sur son coin de mousse
Dans son rêve d’eau douce
Sur son bout de pouce
Comme dans un aéroport
Les halles se sont soudain gonflées
De ces balancements de corps
Cadencés au rythme des paniers
Les cris lézardent le soleil
S’habillent de rouge de jaune de vert
Roulent sous ces langues de miel
En notes chaudes libres de l’hiver
Les parfums rallongent les nez
les entraînent dans une course folle
Flirtant du sucré au salé
Comme un principe de farandole
C’en est ainsi juqu’à midi
Cet instant où la place se donne
Au silence des pavés meurtris
Par cette vie qui encore résonne
Ah !
Que la vie est belle
Là sur son coin de mousse
Dans son rêve d’eau douce
Sur son bout de pouce
Didier Venturini, 1996
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