Du Gesu à la Sainte Trinité…

Comme souvent lorsque je suis à Nice, je me suis laissée entraîner à flâner Place du Gesu, dans le restaurant éponyme, ma « cantine » depuis des années… Mais, comme d’habitude, la voiture avait été garée au Château. Donc dilemme : prendre l’ascenseur, encore certainement bondé de touristes flemmard-e-s, ou grimper à pied? Après les gnocchi gorgonzola et le tiramisu, la seconde solution était osée, mais semblait imposée par le bon sens… Donc en route pour l’escalinada Eynaudi… Ne pas trop lever les yeux pour se décourager… quoique…

Pour les courageux/euses…

Au premier palier, une plaque commémore Eynaudi, dont le nom a été donnée à cet escalier.

A la gloire d’Eynaudi… ou de Médecin?

Mais qui était donc Eynaudi ? La plaque le présente comme « poueta nissart », poète nissart. Effectivement, il a, comme Rondelly, Rocher et tant d’autres, célébré sa ville :

« Nissa que l’ounda baia

Souta lu mount altié

L’univers si miraia

En lou tiéu souol entié « 

Je vous laisse traduire, ce n’est pas difficile…

Ce qu’il faut surtout retenir, c’est qu’il contribua à fixer la langue locale par un Dictionnaire publié entre 1931 et 1939, qui a été complété et réédité par l’Academia Nissarda en 2009.

Juli Eynaudi était un ardent défenseur de sa culture, et l’a exprimé dans des textes, mais aussi par l’animation d’associations dont ce fut l’objet.

Un palier, deux paliers… Au second, une curieuse statue de Vierge à l’Enfant. Pourquoi « curieuse »? La Vierge est toute abîmée, l’enfant est tout neuf. Ne me demandez pas pourquoi, je n’ai pas l’explication…

Je ne suis pas parvenue à trouver de quoi il s’agissait. Nous ne sommes pas loin du Malonat, oratoire qui abrite une Vierge que l’on promène en procession en souvenir de la fin de l’épidémie de choléra en 1854… Mais s’agit-il de la même image de la Vierge?

L’escalier continue à grimper, offrant de superbes vues de la Vila Vielha (alias Babazouk).

Il mène au Camin de la Villa Auta (en haut à gauche, couleur verte, sur le plan ci-dessous).

Celui-ci serpente à l’ombre des conifères et est rejoint par un autre escalier qui monte du nord de la vieille ville.
On arrive alors à la Chapelle de la Sainte Trinité, qui jouxte les deux cimetières (catholique et israëlites).

Je suis allée revisiter le cimetière israëlite, qui fera l’objet d’un prochain article… Sachez toutefois, pour aiguiser votre appétit, qu’il y avait jadis trois cimetières, ainsi que l’atteste ce plan présenté sur le blog d’un amoureux d’histoire de la ville.

A suivre…

Clans et ses environs

Autour du 24 août se déroule chaque année à Clans un Festival du Jeu. Je l’ai découvert l’an dernier, et ai voulu renouveler l’expérience cette année.

Clans est un village perché dans la vallée de la Tinée, un village vivant, dynamique, intéressant à plusieurs points de vue. Et l’organisation d’une telle manifestation montre à quel point les habitant-e-s peuvent se mobiliser pour attirer un peu de monde. Un peu, car les touristes ne « montent » pas jusque là. Une heure de route, trop loin de la côte… Dommage? Je ne sais pas, car cela permet une authenticité qui tend à disparaître dans des villages trop proches des villes, comme Eze par exemple.

Clans: vue de la Chapelle Saint Michel

En route donc, en ce samedi matin, pour le village. A tout hasard, un pique-nique prévu, mais avec l’idée de déjeuner plutôt dans la petite auberge qui nous avait accueilli-e-s l’an dernier… Plan du Var, on admire au passage Saint Jeannet, Le Broc, Carros… etc. Vallée du Var, puis Vallée de la Tinée. Et la montée en lacets vers le village. Le parking est toujours aussi peu ombragé, tant pis… Et direction l’auberge La Clansoise.

Hélas, elle est fermée. Définitivement fermée, apprendrons-nous par Mado, charmante dame de 88 ans qui est venue, voici 28 ans, prendre sa retraite dans le village natal de son mari, face à la collégiale, et qui prend du temps à expliquer à qui est intéressé les recettes nissardes. Fermée, alors que le jeune couple venait de commencer à l’aménager, avec, je me souviens, une cour ombragée et rafraîchie par une charmante petite fontaine style japonais, où le bambou jouait avec l’eau…

Le club des boulistes nous accueille et une table est à notre disposition pour le pique-nique à l’ombre du figuier et de la vigne. Vue imprenable sur la vallée de la Tinée et les monts environnants.

14h, c’est l’heure du rendez-vous avec 1,2,3 CAT, qui organise une fois de plus une Chasse au Trésor; deux heures à parcourir les ruelles médiévales, à découvrir les innombrables chapelles, à tenter de résoudre les énigmes… Une fois de plus j’admire les fresques de la Chapelle Saint Antoine, je tente de dénombrer le nombre de représentations de la Vierge dans la collégiale, et apprécie le bruit de l’eau glissant sous les ruelles, emplissant le lavoir, coulant des fontaines… Elle est omniprésente ici…

Vierge noire de la Chapelle Saint Antoine
Fresques de la Chapelle Saint Michel
La collégiale

Le jeu fini, un petit tour au Festival, pour acquérir le gobelet souvenir et s’étonner de l’ingéniosité de certains costumes. Sous le chapiteau, dans les rues, sur les places, on joue, on joue, on joue à tout, depuis les jeux de rôle jusqu’aux échecs… Et tous les âges se retrouvent pour découvrir les nouveaux jeux de société. Les graphistes prennent le temps d’expliquer leurs créations, où l’histoire et le fantastique se mêlent… Une atmosphère joyeuse et calme dans la fraîcheur de la montagne.

L’heure est venue de partir, mais cette fois direction Bairols, autre village perché, de l’autre côté de la vallée.

J’ai repéré sur Internet la présence d’une auberge où un chef étoilé aurait décidé de se retirer… 7 km de montée en lacets pour atteindre ce bourg. Il subsiste dans ce village, à la mairie flambant neuve, de belles traces du passé…

L’église côté vallée de la Tinée
Un autre aspect de l’église!

L’église domine une grande partie du village. Côté pile, architecture originale. Côté face, mur en aplomb sur le rocher…

Le dernier virage en montant
Le premier virage en montant

L’accès au village se faisait par ce passage, avec virages décalés pour empêcher l’élan des chevaux d’ennemis éventuels, et orienté de telle manière que l’on ne pouvait arriver les armes à la main… droite…

De l’église à l’entrée actuelle du village

Une très belle vue sur les environs, depuis la place située devant l’église, est mise en valeur par une table d’orientation.

En regardant vers le nord-est…
… puis le sud-est… Au loin, la Madone d’Utelle

Mais déception. Trop de rénovation. Trop « travaillé ». Ce minuscule village a perdu de son authenticité… Dommage…

Et autre déception… L’auberge est fermée. On nous explique qu’elle ne fonctionne que très peu, surtout le midi ou sur rendez-vous…

Nous redescendons donc dans la vallée pour regagner Nice, nous demandant si ce village valait le détour…

Nissa la Bella

Quand j’entends l’hymne nissart, j’ai… la chair de poule… eh oui, l’émotion me prend à chaque fois en oyant cette chanson. Il faut dire que je suis nissarte d’adoption, depuis plus de trente ans… Alors j’ai envie de vous faire partager ce plaisir…

J’aime beaucoup l’interprétation qui en est faite par un de mes groupes préférés, Corou de Berra.

Je les ai entendus notamment dans la petite église de La Gaude, chantant a capella, avec la ferveur du public conquis… Un bel instant de communion…

Introduction
Viva, viva Nissa la Bella !   Vive, vive Nice la belle !

1er couplet
O la miéu bella Nissa,
Regina de li flou,
Li tiéu vièji 
taulissa
Iéu canterai toujou !
Canterai li mountagna,
Lu tiéu riche
decor,
Li tiéu verdi campagna,
Lou tiéu gran soulèu d’or !
  Ô ma belle Nice,
Reine des fleurs,
Tes vieilles toitures,
Je [les] chanterai toujours !
Je chanterai les montagnes,
Tes riches décors,
Tes vertes campagnes,
Ton grand soleil d’or !

Refrain
Toujou iéu canterai
Souta li tiéu tounela
La tiéu mar d’azur,
Lou tiéu cièl pur,
E toujou criderai
En la miéu ritournella :
« Viva, viva Nissa la bella ! »
  Toujours je chanterai
Sous tes tonnelles
Ta mer d’azur,
Ton ciel pur,
Et toujours je crierai
Dans ma ritournelle :
« Vive, vive Nice la belle ! »

2e couplet
Canti la capelina,
La rosa, lou lilà,
Lou pouòrt e la Marina,
Païoun, Mascouïnà !
Canti la soufieta
Doun naisson li cansoun,
Lou fus, la coulougneta,
La miéu bella Nanoun !
  Je chante la capelina,
La rose, le lilas,
Le port et la Marine,
Paillon, Mascouïnat !
Je chante la mansarde
Où naissent les chansons,
Le fuseau, la quenouille,
Ma belle Nanon !

3e couplet
Canti li nouòstri gloria,
L’antic  bèu calèn,
Dòu gioungioun 
li vitoria,
L’òudou dòu tiéu printèms !
Canti lou vièlh Cincaire,
Lou tiéu blanc 
drapèu,
Pi lou brès de ma maire
Dòu mounde lou pu bèu !
  Je chante nos gloires,
L’antique belle lampe à huile,
Du donjon les victoires,
L’odeur de ton printemps !
Je chante le vieux Sincaire ,
Ton blanc drapeau,
Puis le berceau de ma mère
Le plus beau du monde !

Il en existe de nombreuses versions, et des interprétations parfois étonnantes. Cet été, j’en ai entendu une tout à fait innovante, dans un balleti… elle est donc renouvelée et renouvelable, cette chanson créée au début du XXème siècle par Menica Rondelly.